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État de droit ou de travers ?

Un article rédigé par Louis Daufresne - RND, le 4 avril 2025 - Modifié le 6 mai 2025
Depuis la condamnation de Marine Le Pen, on parle beaucoup de l’État de droit, comme si la décision visant le chef de file du RN en était l’expression même et que ceux qui la déplorent le menaceraient dangereusement. L’État de droit est l’expression de la souveraineté populaire. Le politologue Stéphane Rozès prend soin de rappeler l’équilibre entre les deux : l’un n’existe pas sans l’autre, et surtout pas contre l’autre.
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Depuis la condamnation de Marine Le Pen, on parle beaucoup de l’État de droit, comme si la décision visant le chef de file du RN en était l’expression même et que ceux qui la déplorent le menaceraient dangereusement. Cette vision des choses me paraît caricaturale. Les partisans du RN se réclament aussi de l’État de droit : ils estiment même que l’exécution provisoire le malmène fortement. Ce n’est pas rien d’interdire au candidat favori de se présenter au scrutin suprême, de rayer son nom d’un trait de plume. Vu les enjeux, n’est-ce pas trop pour les épaules de Bénédicte de Perthuis, le magistrat à l’origine de cette sanction ? Poser la question ne revient pas à minimiser les errements du RN, tant s’en faut ! La même remarque vaudrait s’il s’agissait de Jean-Luc Mélenchon. Le chef Insoumis s’empressa de dire que « la décision de destituer un élu devrait revenir au peuple » (Le Figaro). Dont acte.

Rendre les décisions de première instance immédiatement exécutoires permet d’éviter la récidive. C’est alors une mesure salutaire de protection et d’éloignement. Si une personne détourne des fonds publics, il ne faut pas qu’elle puisse continuer à « taper dans la caisse ». Dans le cas de Marine Le Pen, outre que son casier judiciaire soit vierge, elle n’est plus député européen et son parti a tout intérêt à bien se tenir. Les faits incriminés vont de 2004 à 2016. On voit mal le RN, placé sous surveillance comme il l’est, continuer comme avant.

Comme je l’ai écrit dans cette tribune (Aleteia), l’exécution provisoire questionne le rapport à la vérité. L’épithète est mal choisie : ce qui est qualifié de « provisoire » est en fait « définitif » puisque la décision rendue s’applique avant que les faits soient rejugés. La justice se limite alors au premier degré de juridiction. Gérald Pandelon, avocat pénaliste, observe que cette peine complémentaire est très rarement requise, y compris contre des narcotrafiquants au casier bien garni.


L’État de droit est l’expression de la souveraineté populaire. Le politologue Stéphane Rozès prend soin de rappeler l’équilibre entre les deux : l’un n’existe pas sans l’autre, et surtout pas contre l’autre. Animés par des passions politiques fortes, les Français ont besoin de se référer à des institutions qui ne les divisent pas. Que le RN soit condamné se justifie, le dossier étant largement étayé. Mais on ne peut lui réserver un régime d’exception. Or nul ne peut nier que ce parti n’est pas traité comme les autres et que quelque 11 millions de Français, frappés d’illégitimité, sont rejetés aux périphéries, dans les ténèbres extérieures à l’arc républicain. Le risque, c’est de radicaliser les partisans de Marine Le Pen qui a beau jeu de s’en prendre aux « juges rouges » du très puissant syndicat de la magistrature.

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