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Assistantes maternelles : vers la pénurie dans le Rhône ?

Assistantes maternelles : vers la pénurie dans le Rhône ?

Un article rédigé par Anaïs Sorce - RCF Lyon, le 30 septembre 2025 - Modifié le 30 septembre 2025
Tempo · Le podcast d'actualité de RCF LyonAssistantes maternelles : risque-t-on la pénurie dans le Rhône ?

Les assistants maternels sont le premier mode de garde des parents employeurs. Dans le Rhône, ils représentent 57% des places proposées, contre 36% pour les crèches et 3% pour les gardes à domicile. Mais d'ici 10 ans, près d'un assistant maternel sur 2 partira la retraite, d'après l'Observatoire de l'Emploi à Domicile. Risque-t-on la pénurie d’assistants maternels dans le Rhône ? 

Il manquera 5 800 assistants maternels dans le Rhône dans 10 ans - © Kindel Media via PexelsIl manquera 5 800 assistants maternels dans le Rhône dans 10 ans - © Kindel Media via Pexels

Les assistants maternels sont autant aimés des parents qu’ils sont méconnus du grand public. Salariés par un parent employeur, ces professionnels de la petite enfance peuvent accueillir à leur domicile de 1 à 4 enfants de quelques mois à 6 ans, après délivrance d'un agrément par le département ou la Métropole de Lyon. Mais le métier souffre d'un déficit d'attractivité. Entre 2022 et 2023, le Rhône aurait perdu 500 de ses 3 000 assistantes maternelles. Une baisse continue depuis 2014, liée en partie au recul des naissances (-6,6% en un an). Mais entre la progression démographique prévue par l'INSEE dès 2026 et les départs massifs à la retraite, il manquera 5 800 assistants maternels dans le Rhône dans 10 ans. Une situation qui inquiète la FEPEM, unique syndicat des particuliers employeurs, représenté en région par Grégory Perret.

Nous sommes sensibles à la tendance assez alarmante du nombre d'assistantes maternelles qui diminue d'année en année. On se dit que la montagne à gravir est gigantesque, c'est l'Everest qui est face à nous. Il y a forcément de l'inquiétude. On croit vraiment qu'il y a un effet très incitatif des politiques publiques sur la natalité : les parents nous disent que leur désir d'enfant est aussi fonction des capacités d'accueil. Plus on les développe, plus on donnera envie aux futurs parents de passer le cap et de faire des enfants. Mais dans une période de contraintes budgétaires, on n'a pas encore trouvé la baguette magique qui va nous permettre de gravir la montagne sans trop toucher aux finances publiques.

Pour tenter de contenir cette hémorragie, depuis le 1er septembre 2025 la CAF a réformé le complément du libre choix du mode de garde (CMG) qui aide les parents à payer leur nounou. Objectif : rapprocher le coût entre un accueil en crèche et l'emploi d'un assistant maternel, en prenant mieux en compte les ressources du foyer, le nombre d'enfants à charge et le nombre d'heures de garde comprises dans le contrat. « C'est vrai que des familles sans ressources ou modestes vont peut-être plus naturellement vers l'accueil collectif et sur des territoires ruraux, ça peut être une vraie contrainte » reconnaît Grégory Perret qui rappelle aussi une spécificité du département du Rhône : « on est le troisième département de France dans le taux de recours aux gardes d'enfants à domicile après les Hauts-de-Seine et Paris. Ça marche bien mais ça ne pallie pas la pénurie d'assistantes maternelles parce que la garde d'enfants à domicile s'adresse à des familles qui ont des revenus un peu plus élevés. C'est aussi pour ça que sur une grande ville comme Lyon, ce mode de garde se développe beaucoup. Mais moins d'offres de garde, c'est des parents qui sont contraints de rester à domicile pour garder leur enfant, bien souvent les femmes ». D'après l'INSEE, 29% des parents de jeunes enfants en France ne disposent ni de places d'accueil, ni d'une aide financière. 

« S'occuper d'un enfant, c'est un métier qui a beaucoup de contraintes »

Dans le Rhône, les assistantes maternelles sont agréées par le département. Lubka Turpin est cheffe de bureau « Accueil de l'enfant, service de la protection maternelle et infantile » (PMI). Avec 150 nouveaux agréments chaque année, elle concède une stabilité voire une baisse du nombre de professionnels : « on a plus de personnes qui partent pour différentes raisons. Parfois, elles se rendent compte qu'entre ce qu'elles imaginaient et la réalité du métier, c'est quand même compliqué. S'occuper d'un enfant, c'est un métier qui a beaucoup de contraintes. Parfois, elles estiment qu’elles sont trop contrôlées ou qu’elles ont trop de comptes à rendre auprès des parents, des institutions, de nos services. Parfois, c'est plus facile d'exercer avec plusieurs autres professionnels. Pour l'instant, on n'a pas tellement de carences mais la baisse est constante ». Pas de catastrophisme dans les services de l’Etat qui se concentrent sur la promotion du métier pour inciter de jeunes professionnels à se former alors qu’aujourd’hui « ce serait plutôt des femmes qui entrent dans le métier avec la naissance des enfants et qui, à l'adolescence de ceux-ci, décident de sortir du domicile ».

L'invité de M Comme Midi · RCF LyonLes Petites Familles révolutionnent les modes de garde à Lyon

Pour lutter contre ce sentiment de solitude d'exercer seule à la maison toute la journée, les maisons d'assistantes maternelles (MAM) ont été créées en 2010. Elles permettent à 2 à 4 assistantes maternelles d'exercer ensemble dans un local dédié adapté aux besoins de jusqu'à 16 tout-petits. La région en compterait 400, dont 27 dans le Rhône mais seulement 8 dans la Métropole de Lyon. Si la collectivité se défend de toute réticence au dispositif, plusieurs assistantes maternelles affirment pourtant s’être heurtées au mur des services de la Métropole pour qui « les MAM sont réservées à la campagne » d’après deux d’entre elles, rencontrées dans l’Est Lyonnais. Après 11 ans d’exercice à Caluire-et-Cuire, Sandra Sicot a fini par s’installer début septembre à la MAM des Moineaux, à Villeurbanne après avoir tenté de créer une MAM sur sa commune. Mais le prix des locaux y étaient dissuasifs et elle déplore que la Métropole ne soit plus aidante. « On n'est pas une crèche mais on a beaucoup, beaucoup de contraintes. Il nous faut un jardin, un rez-de-chaussée… »

À Caluire-et-Cuire, seulement 7 demandes d'agréments en 2024

La MAM des Moineaux a été l’une des premières à être créée, dès 2011, par Hélène Boni, assistante maternelle de 53 ans représentante nationale pour les MAM du syndicat professionnel des assistants maternels et des assistants familiaux (SPAMAF).

Sur Villeurbanne, depuis mars, on constate une baisse importante des demandes d'accueil. Tout le monde nous a dit que ça allait repartir au mois de septembre et ça ne repart pas. Aujourd'hui, il y a une vingtaine de réponses par annonce. Des parents négocient les tarifs par téléphone. Énormément d'assistantes maternelles proches de la retraite vont se mettre au chômage. Plus ça va, plus la classe d'âge vieillit et on va se retrouver avec un déficit. Les pouvoirs publics s'y prennent un peu tard parce que toute la nouvelle génération ne veut pas du tout entendre parler de devenir assistante maternelle.

En 2018, Villeurbanne comptait 900 assistantes maternelles adhérentes des relais petite enfance (RPE) contre 632 en 2023. La situation est pire encore à Caluire-et-Cuire où le RPE comptabilisait, en 2023, 380 enfants accueillis chez une assistante maternelle sur les 1 253 moins de 3 ans. La commune bénéficiait également de 223 berceaux en crèche municipale, trois crèches d'entreprise et neuf micro-crèches. Le nombre de demandes d’agréments y est passé de 30 en 2016 à seulement 7 en 2024 et près de 33% des assistantes maternelles en activité en 2023 avaient plus de 55 ans. D’après Sandra Sicot, une inquiétude commence à se distiller en réalisant que « dans 5 ans, il y a énormément d'assistantes maternelles qui partent à la retraite et que les demandes d'agréments se font plus rares ». Pour Hélène Boni, « tous les jeunes tertiaires, dès qu'ils le peuvent, achètent en extérieur de Lyon et Villeurbanne. Ça fait un changement et un renouvellement de population. Et il y a aussi, je pense, l'effet télétravail ».

Sans compter la réforme de la CMG, dont les parents n’ont vu les effets que fin septembre, au moment de payer leur salariée, avec parfois des baisses importantes du montant de leur aide. 

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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