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Antoine Besson | L’industrie des scam centers, un danger pour les plus pauvres

Antoine Besson | L’industrie des scam centers, un danger pour les plus pauvres

RCF, le 29 septembre 2025 - Modifié le 29 septembre 2025
Loin des yeux, près du cœurAntoine Besson | L’industrie des scam centers, un danger pour les plus pauvres

LA CHRONIQUE DES ENFANTS DU MEKONG - Antoine Besson aborde le sujet des scam centers, des usines à fraudes qui mettent en danger de nombreuses personnes. 

Antoine Besson © DRAntoine Besson © DR

On les surnomme parfois les brouteurs.  On croit qu'ils viennent essentiellement d’Afrique, pourtant l’Asie et tout particulièrement le Cambodge ou la Birmanie, abrite depuis plusieurs années des dizaines de centres d’escroquerie en ligne à grande échelle. Ces Scam center fonctionnent comme de véritables usines à fraude, ciblant des victimes à travers le monde par le biais d’escroqueries romantiques, d’investissements fictifs en cryptomonnaies et d’autres stratagèmes sophistiqués. 

Un rapport récent de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC) s’inquiète de l’expansion quasi industrielle de ces plateformes criminelles au Cambodge, utilisant des infrastructures technologiques avancées et où est exploitée une main-d’œuvre déshumanisée et soumise à des conditions de travail déplorables. La plus importante de ces plateformes aurait facilité des transactions illégales à hauteur de plus de 24 milliards de dollars depuis 2021.

Des données à surveiller

Le modèle de ces Scam Center repose sur l’exploitation de travailleurs, souvent victimes de trafic humain depuis d’autres pays asiatiques ou africains. Ces hommes et ces femmes sont enfermés dans des complexes clos et contraints de manipuler des victimes en ligne selon des scripts préétablis. Le site Nikkei Asia détaille dans une enquête des journées de travail de 16 heures, des coups et des électrocutions faute de résultats, ou encore de minuscules chambres partagées par plusieurs personnes. Entre 2022 et 2025, près de 2 500 Indiens, « attirés dans divers pays d’Asie du Sud-est avec de fausses offres d’emplois » ont été secourus ; sur cette même période, plus de 22 000 citoyens partis, avec un visa, en Thaïlande, en Birmanie, au Vietnam et au Cambodge ne sont pas revenus. C’est tout simplement de l’esclavage moderne.

Une telle activité dans de telles proportions n’est pas anodine. Elle prolifère dans un pays en développant un écosystème mafieux et criminel qui favorise la corruption, l’exploitation et l’économie informelle. Elle favorise la précarisation des familles les plus pauvres et, de ce fait représente un danger pour les enfants dont nous avons la charge.

De quel danger parle-t-on ?

Les statistiques sont claires : la précarité économique et sociale est les principaux facteurs qui influent sur l’accès à la scolarisation et le travail des enfants, selon l’Organisation internationale du travail. Un pays qui connait une croissance économique favorable a une forte tendance à protéger les enfants. À l’inverse, un système qui favorise l’économie informelle et la corruption précarise les familles. Aujourd’hui, au Cambodge, des villes comme Sihanoukville, Phnom Penh ou Poipet, frontalière avec la Thaïlande, sont identifiées comme des plaques tournantes de ces activités criminelles. Des villes où nous avons des programmes et où les inégalités sont criantes.

Autre conséquence collatérale : l’élite politique dépendante de ces rentes a tendance à faire des choix dangereux pour protéger ces industries et détourner l’attention. C’est ainsi que le conflit frontalier avec la Thaïlande a été instrumentalisé pour faire taire les protestations de la communauté internationale qui réclamait au Cambodge plus de sévérité vis-à-vis des scam center. Un conflit qui a fait une quarantaine de morts et plus de 300 000 déplacés, dont de nombreuses familles avec enfants. Face à la violence et aux promesses fallacieuses d’argent facile, seule l’éducation académique et morale peut se dresser comme un rempart pour un meilleur avenir. C’est tout l’enjeu du parrainage.

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Loin des yeux, près du cœur
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