Accueil familial : l'entreprise MonSenior s'implante en Auvergne
Alternative à la maison de retraite, l'accueil familial est pourtant peu développé. Les derniers chiffres officiels parlent de moins de 8500 accueillants familiaux en France avec des territoires qui ne sont pas dotés de ce type de solution de vie. En Auvergne, MonSenior, reconnue entreprise solidaire d'utilité sociale, prévoit d'ouvrir plusieurs hameaux dédiés aux professionnels qui souhaitent se lancer. Claire Peillon, infirmière coordinatrice de l'entreprise, répond aux questions de Stéphane Longin pour RCF.
Claire Peillon dans un hameau MonSenior @MonSenior 2025Stéphane Longin : Mon Senior arrive en Auvergne avec plusieurs projets de hameaux d’assistantes familiales. De quoi s’agit-il ?
Claire Peillon : L’accueil familial n’a pas été inventé par MonSenior, il existe depuis plus de 30 ans. Il est né d’une pratique d’après-guerre : dans les campagnes, la femme de l’agriculteur accueillait souvent sa grand-mère ou une voisine âgée. Petit à petit, l’État a encadré cette pratique et en a fait un véritable mode d’accompagnement et d’hébergement pour les personnes fragiles. Il s’adresse aux personnes âgées de plus de 60 ans ou en situation de handicap. L’accueillant familial, agréé par le Conseil départemental, héberge une à trois personnes fragiles au sein de son domicile et partage son quotidien avec elles.
SL : Son quotidien mais aussi son logement. MonSenior propose aujourd’hui des maisons aux accueillants familiaux ?
CP : Exactement. Le premier métier de MonSenior était d’identifier des accueillants familiaux agréés et de les mettre en relation avec des familles intéressées par ce mode d’hébergement. Mais nous avons vite constaté des freins, en particulier au niveau du logement, parfois inadapté, ce qui ne permettait pas toujours des conditions d’accueil optimales. Nous avons donc imaginé des maisons spécifiquement pensées pour ce mode de vie partagé. Elles sont toujours construites par trois, d’où le nom de “hameau”.
SL : Comment accompagnez-vous les personnes qui veulent se lancer dans ce mode de vie ?
CP : Nous les conseillons et les aidons à obtenir leur agrément. Chez MonSenior, nous avons choisi de travailler uniquement avec des professionnels du médico-social ayant au minimum cinq ans d’expérience — auxiliaires de vie, aides-soignants, infirmières ou aides médico-psychologiques — avec en moyenne dix ans de pratique. Car il s’agit d’un mode de vie sédentaire, destiné à des personnes en recherche de stabilité. Nous les accompagnons dans toutes les démarches administratives et, une fois agréés, nous mettons à leur disposition des outils pour les aider à trouver un équilibre dans ce mode de vie intense, 24 h sur 24 et 7 jours sur 7, auprès de personnes fragiles.
SL : C’est l’un des freins à ce type d’activité. Être accueillant familial, c’est toute la journée, toute l’année…
CP : Oui, mais malgré cela, nous recevons énormément de candidatures ! Ce sont principalement des professionnels de santé qui ne souhaitent plus exercer dans les conditions imposées à l’hôpital, en EHPAD ou à domicile. Alors oui, c’est du 7 jours sur 7, mais pour seulement trois personnes avec lesquelles on peut vraiment prendre le temps et créer du lien. Pour beaucoup, c’est un retour au sens premier de leur métier, dans des conditions plus humaines et en accord avec leurs valeurs.
"Une accueillante familiale perçoit en moyenne 3600 euros par mois"
SL : Mais le métier reste très prenant et exigeant !
CP : Évidemment. C’est pourquoi nous avons mis en place un réseau d’entraide et de remplacement. Les accueillants ont droit à cinq semaines de congés par an et peuvent bénéficier de relais. Le hameau est aussi une force, car les familles peuvent s’entraider et se relayer entre elles. Enfin, la question de la rémunération compte aussi : une accueillante familiale qui héberge trois personnes en contrat permanent perçoit en moyenne environ 3600 € par mois.
SL : Qui sont les personnes accueillies dans les hameaux MonSenior ?
CP : L’accueil familial est une alternative entre le maintien à domicile et l’entrée en établissement médico-social. Nous n’accueillons pas les personnes nécessitant un accompagnement médical lourd, mais plutôt celles avec un niveau d’autonomie intermédiaire (GIR 3 ou 4). Elles ont besoin de soutien et de structuration, mais disposent encore de capacités à développer. Tout l’enjeu est de maintenir cette autonomie par les gestes du quotidien et une vie de famille. L’âge moyen est d’environ 80 ans. Nous veillons aussi à préserver l’indépendance : chaque personne doit pouvoir continuer à recevoir ses proches. C’est pourquoi chaque hameau comprend une petite salle dédiée à ces visites, que nous appelons “l’orangerie”.
"Nous veillons à préserver l'indépendance : chaque personne doit pouvoir continuer à recevoir ses proches"
SL : Comment sélectionnez vous les communes où vous vous implantez ?
CP : Nous avons des critères précis : la présence d’un réseau médical est essentielle. Pour les accueillants familiaux, il est indispensable de pouvoir s’appuyer rapidement sur un cabinet infirmier, un médecin généraliste, un kinésithérapeute… Cela conditionne l’accès aux soins pour les personnes accueillies.
SL : D’autres projets sont-ils prévus en Auvergne, avec une attention particulière au monde rural ?
CP : Oui, nous avons une vraie volonté de développement national, et la ruralité est au cœur de notre mission. Nous voulons permettre aux personnes issues de villages ou de petites communes de rester sur leur territoire malgré la perte d’autonomie, sans être déracinées ni coupées de leurs amis et de leurs repères.
SL : Quel est le coût pour s’installer dans une structure comme la vôtre ?
CP : Le coût couvre l’ensemble de la vie quotidienne : participation au loyer, budget alimentation et hygiène, charges d’eau et d’électricité, salaire de l’accueillant familial, et coordination médico-sociale assurée par MonSenior. Après déduction des aides légales, il faut compter environ 2200 € par mois par personne accueillie. Nous aidons bien sûr les familles à solliciter toutes les aides disponibles pour réduire le reste à charge. En moyenne, nous restons 20% moins chers que la plupart des EHPAD, tout en offrant un accompagnement très qualitatif dans un cadre familial à taille humaine.


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