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Qu'est-ce que la conversion écologique ?

Qu'est-ce que la conversion écologique ?

Un article rédigé par Pauline de Torsiac, avec OR - RCF, le 15 septembre 2025 - Modifié le 20 septembre 2025
B. A. -BA du christianismeLa conversion écologique, qu'est ce que cela signifie ?

Il y a dix ans, le pape François invitait les catholiques à la "conversion écologique". Voulait-il que les fidèles deviennent des militants écologistes ? Comment comprendre cet appel lancé par l'auteur de l'encyclique Laudato Si' ? Le Temps pour la Création est l'occasion de revenir sur cette idée de conversion écologique. Il encourage les chrétiens à repenser leurs liens avec l'œuvre de Dieu : la terre, les créatures vivantes, les êtres humains... 

"Il n’y a pas de conversion chrétienne sans capacité à nous arrêter, à nous poser devant Dieu." ©Freepik"Il n’y a pas de conversion chrétienne sans capacité à nous arrêter, à nous poser devant Dieu." ©Freepik

Depuis le 1er septembre, Journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la Création, les chrétiens sont entrés dans le Temps pour la Création, jusqu'au 4 octobre. Une édition marquée par les dix ans de Laudato Si’. Cette encyclique du pape François qui restera l'un de ses textes les plus importants. Il a incité les chrétiens à une "conversion écologique" : cela veut-il dire que les chrétiens doivent devenir des militants écologistes ? Quel lien entre foi chrétienne et écologie ? En quoi les chrétiens sont-ils concernés par la crise environnementale et le changement climatique ? Réponses du Père Xavier de Bénazé, jésuite, coordinateur de l'écocentre spirituel du Châtelard, près de Lyon. Il interviendra lors du webinaire sur l’écologie intégrale, le 1er octobre 2025, proposé par le Chatelard avec le centre Teilhard de Chardin. Chacun peut s'inscrire pour y assister en ligne ou en se rendant sur place. 

Qu'est-ce que la conversion pour un catholique ?

 

« S’il est vrai que "les déserts extérieurs se multiplient dans notre monde, parce que les déserts intérieurs sont devenus très grands", la crise écologique est un appel à une profonde conversion intérieure. »
Pape François, Laudato Si’ (217)

 

Quand le pape François parle de "déserts extérieurs" et "intérieurs", il cite son prédécesseur, le pape Benoît XVI. C'est donc dans la continuité de l’enseignement de l’Église que le pape argentin a produit ce texte, à certains égards, révolutionnaire. C’est donc à cela qu’encourage la démarche spirituelle de la conversion : à la fois initier un changement en soi-même, voire un bouleversement d’envergure. Mais aussi, sans écarter l’idée de la stabilité, revenir à l’essentiel, à ce qui donne du sens à la vie. En l'occurrence, "nous avons besoin d’un changement profond dans notre manière d’être au monde, commente Xavier de Bénazé, d’être dans la création du créateur, dans ce cadeau de Dieu qui nous est fait. Ce changement profond il veut dire un changement de vision du monde."

Dans une démarche de conversion, il y a donc des choses à quitter ou dont il faut se détourner. Par exemple de ce que le pape François nomme "le paradigme technocratique". Pour le Père de Bénazé, cela se traduit par "une vision du monde comme une machine". Certes, cela nous a été utile, par exemple pour progresser dans le soin et la pratique de la médecine, "de voir le monde comme une machine que l’on démonte pour en étudier le fonctionnement". Seulement aujourd’hui, cette vision du monde montre ses limites, elle "a des impacts sur les plus pauvres et les autres êtres vivants".

Étymologiquement, se convertir c’est "se tourner vers". Mais à l'heure de la crise écologique, vers quoi pouvons-nous nous tourner ? C’est peut-être l'une des raisons de l’écoanxiété : admettre que la crise écologique est profonde mais ne pas trouver d'issue. Pour Xavier de Bénazé l’encyclique du pape incite à voir le monde comme "un tissu de relations". Il y a la relation - fondamentale - à Dieu, qui donne du sens à trois autres types de relations : à soi-même, aux autres êtres humains et aux autres créatures. Cet ensemble de relations "tisse nos vies".

 

Quelle est la priorité : Dieu ou la planète ?

 

« Mais nous devons aussi reconnaître que certains chrétiens, engagés et qui prient, ont l’habitude de se moquer des préoccupations pour l’environnement, avec l’excuse du réalisme et du pragmatisme. D’autres sont passifs, ils ne se décident pas à changer leurs habitudes et ils deviennent incohérents. Ils ont donc besoin d’une conversion écologique, qui implique de laisser jaillir toutes les conséquences de leur rencontre avec Jésus-Christ sur les relations avec le monde qui les entoure. » 
Pape François, Laudato Si’ (217)

 

Dans Laudato Si’, le pape François engage donc les chrétiens à se tourner vers l’écologie. Lucide, il pointe du doigt ceux qui s’en moquent ou peut-être ceux qui croient que le progrès technologique permettra de venir à bout de la crise environnementale. Mais François fait précisément de la conversion écologique une démarche de foi, avant tout. 

La finalité de l’engagement écologique, c’est le Christ, dit-il. Et c’est aussi "notre attachement au Christ qui va nous amener à prendre soin de la relation - non seulement de la relation à nous-mêmes et aux autres humains, mais aussi à toute la création, explique le Père de Bénazé. On le fait parce que l’on se sent appelés par l’amour du Christ."

D’ailleurs, l’engagement écologique n’est pas une fin en soi. "Il ne s’agit pas de se convertir à l’écologie, au vert etc.", comme le précise le jésuite. On pourrait dire pour reprendre un langage biblique qu’en aucune façon il fait de l’engagement écologique le lieu d’une quelconque idolâtrie. La conversion écologique trouve son élan dans la relation d’amour que l’on a avec Dieu et a pour finalité l’amour de Dieu.

 

Voir, juger, agir : la méthode de la doctrine sociale de l’Église

 

« Vivre la vocation de protecteurs de l’œuvre de Dieu est une part essentielle d’une existence vertueuse ; cela n’est pas quelque chose d’optionnel ni un aspect secondaire dans l’expérience chrétienne. »
Pape François, Laudato Si’ (217)

 

Si, le pape François peut avoir "des mots très forts", comme le remarque le Père de Bénazé, c’est parce que "son cœur de pasteur a écouté la clameur de la terre et la clameur des pauvres". En d’autres termes, il a regardé la réalité en face. C’est la première étape de la méthode Voir, juger, agir, au cœur de la doctrine sociale de l’Église. (Cet ensemble de textes par lesquels l’Église catholique apporte une réflexion sur les liens entre l’Évangile et les réalités sociales, politiques, économiques.)

Les chrétiens sont donc invités à "regarder honnêtement ce qui se passe" et à "se renseigner sur la profondeur de la crise", "même si parfois c’est douloureux", encourage le jésuite. Ils sont invités à "juger" c’est-à-dire à discerner. Pour enfin "agir de la juste manière et à la bonne proportion".

 

Conversion écologique : par où commencer ?

 

« L’accélération continuelle des changements de l’humanité et de la planète s’associe aujourd’hui à l’intensification des rythmes de vie et de travail, dans ce que certains appellent “rapidación”. »
Pape François, Laudato Si’ (18)

 

De manière générale, "il n’y a pas de conversion chrétienne sans capacité à nous arrêter, à nous poser devant Dieu, prévient le Père de Bénazé. Il faut du temps pour que Dieu œuvre dans un cœur." La conversion écologique passe donc par le fait de ralentir et aussi de contempler. "Se rendre attentif à la beauté et fragilité de la création, percevoir quelque chose d’heureux…" Et garder en tête que ce "chemin de conversion me permet d’enrichir ma vie".

Et si on voulait un exemple concret pour entrer dans une démarche de conversion écologique, Xavier de Bénazé attire notre attention sur le rapport à la nourriture. "On mange trois fois par jour, c’est un acte profondément relationnel, dit-il. Si je vous demande de penser à l’assiette que vous avez mangée au dernier repas : êtes-vous capables de dire qui a produit votre repas ?" 

Quels hommes, quelles femmes ont travaillé pour produire cette nourriture ? Quelle créature a été impliquée ? Dans quelles conditions ? "C’est un exercice d’écologie intégrale de se dire : Je vais choisir une nourriture dont je sais où elle est produite et par qui… Je vais enrichir ma vision relationnelle. Je vais prendre soin et je serai en plein dans une conversion écologique concrète qui a du goût."

Pour qui souhaite approfondir cette notion de relation, prendre le temps de considérer de quelles relations est fait le tissue de sa propre vie, il y a toujours la possibilité de pratiquer les exercices spirituels de saint Ignace. "Ils aident à réordonner sa vie à Dieu, LA relation source de toutes les autres. Ils aident à choisir dans sa propre vie, comment se positionner dans la relation à soi, aux autres, à la création." Il suffit de se rendre dans l’un des cinq centres spirituels jésuites en France et en Belgique, et de s’inscrire à une retraite d’initiation aux exercices spirituels. 

 

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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