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Microplastiques : les pneus de nos voitures polluent les océans
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Microplastiques : les pneus de nos voitures polluent les océans

Un article rédigé par Ronan Le Coz - RCF Finistère, le 4 juillet 2022  -  Modifié le 9 janvier 2024

Les pneus de nos voitures laissent derrière eux une pollution majeure aux microplastiques. Et cette pollution a ensuite un impact sur la faune marine. C'est l'une des questions qui a été abordée la semaine dernière, à Brest, lors de la conférence scientifique du groupement de recherche "Polymères et océans" dont fait partie Arnaud Huvet, biologiste à l'Ifremer.

Un pneumatique perd 4 kilogrammes de matières au cours de sa vie - ©Ronan Le Coz Un pneumatique perd 4 kilogrammes de matières au cours de sa vie - ©Ronan Le Coz

Arnaud Huvet, une part de la pollution des océans aux microplastiques vient de nos voitures et de l’usure de leurs pneumatiques ?


Les manufacturiers estiment qu’au cours de la vie d'un pneu, on perd à peu près 4 kilogrammes de matière avec l'usure ! C’est une perte de masse énorme d’où va se décrocher un certain nombre de particules. D’abord, des particules grossières qui vont se retrouver très rapidement lessivées par l'eau, mais aussi des toutes petites particules submicroniques (dans les quelques microns, voire en-dessous dans la partie plutôt nano). Une étude scientifique a montré qu'elles avaient plutôt tendance à passer dans l'air et à être transportées avant de de finir, un jour ou l'autre, dans l'environnement fluvial et/ou marin. Cette étude avait aussi estimé que 29 millions de tonnes de déchets caoutchouc issus des pneumatiques pouvaient finir chaque année dans l'environnement marin!

Vous travaillez plus spécifiquement sur l'impact de ces polymères sur les huîtres ?


Pour l'instant, nous n’avons pas encore d’idée des quantités exactes de fragments de pneumatiques dans la nature. Sur les huîtres, nous avons pris le parti de faire des études expérimentales pour savoir si cela pouvait avoir un effet toxique ou pas. Les pneumatiques sont constitués jusqu'à 50% de leur masse en molécules chimiques, en additifs, en métaux, en dérivée d'hydrocarbures… Nous avons d'abord voulu tester cet effet chimique en faisant tremper nos pneumatique dans de l'eau de mer comme si ces fragments de pneus se retrouvaient dans l'environnement marin. Et le mélange obtenu, on l'a distribué avec plus ou moins de concentration à des huîtres adultes, puis nous avons mesuré des paramètres comme la prise alimentaire et la respiration, qui font des très bons indicateurs de leur état de santé. Nous avons vu les mêmes effets, de la première dose jusqu'à la plus forte, avec des réductions de prise alimentaire de 50 % sur les huîtres qui étaient exposées à ces molécules chimiques libérées dans l'eau de mer. Nous avons aussi vu environ 20% de diminution de respiration, donc de consommation d'oxygène. Les bilans énergétiques de ces huîtres exposées étaient vraiment défavorables! Nous n'avons pas continué l'expérience, mais cela voudrait dire qu’il y pourrait y avoir aussi des effets sur d'autres grandes fonctions comme la croissance, la défense, et la reproduction…

 

Arnaud Huvet, biologiste à l'Ifremer (archive) - ©Ronan Le Coz

C'est vertigineux quand on imagine le nombre de pneus qui sont en circulation rien que sur la métropole de Brest…


Effectivement ! D’ailleurs, nous avons des collègues de l'Université de Nantes qui travaillent spécifiquement sur ce que l'on peut récupérer sur les bordures d'une route très empruntée, l'accès au pont de Cheviré, avec environ 80 000 véhicules par jours estimés! Ils nous disent aujourd’hui que c'est l'environnement le plus contaminé par les particules de plastique, et que c’est même plus fortement contaminé que les boues de station d'épuration qui sont pourtant parmi les plus contaminées de ce qu'on pouvait analyser...

D'autres polluants sont également très présents dans les océans, en particulier les fibres synthétiques ?


Oui, un rapport de 2007 de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) a montré que, sur nos côtes européennes, les petits microplastiques qui rentrent directement dans l'environnement fluvial et marin sont les fibres synthétiques issues de nos textiles et les fragments de pneumatiques.

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