Médiation animale : quand les animaux pansent nos maux
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Depuis l'affaire Orpéa, beaucoup de familles ont peur de confier leurs aînés à un Ehpad. Pourtant, il y a des établissements qui placent en priorité le bien-être des résidents et qui n'hésitent pas à investir dans du matériel de pointe. Et ce au bénéfice des personnes âgées comme des professionnels. C'est le cas de la Maison Nazareth, en Haute-Loire. Un établissement géré par l'association Habitat et Humanisme.
Le sourire des résidents, des professionnels heureux d'y travailler, du matériel de pointe... La Maison Nazareth, au Puy-en-Velay (Haute-Loire) n'est pas un Ehpad tout à fait comme les autres. Géré par la branche Soin d’Habitat et Humanisme, association à but non lucratif, il est doté de 88 chambres et d'un accueil de jour. Un environnement soutenant et bienveillant pour des personnes fragilisées par le grand âge. Alors que tant de familles ont peur de confier leurs aînés, la Maison Nazareth offre une autre image de l'Ehpad. Béatrice Soltner s'y est rendue.
Robert comme Josette font partie des onze personnes accueillies pour la journée à la Maison Nazareth. Ils vivent non loin de là, au Puy ou dans les alentours, et ont chacun un conjoint qui les attend à la maison. L’accueil de jour, c’est justement ce qui permet de soulager les aidants. "Quand la personne est ici, les aidants ont leur journée à eux, décrit Patrice, aide médico-psychologique à la l’Ehpad Nazareth. Ils peuvent prendre une journée de répit parce que c’est des maladies qui sont épuisantes et souvent l’aidant il craque avant la personne qui est malade."
La Maison Nazareth accueille notamment des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de troubles de la mémoire. C’est au matin, quand les participants sont "encore assez réceptifs", que Patrice propose des exercices de mémoire. Agnès, elle, vient animer des ateliers – mémoire mais aussi peinture, décoration, sport…. Ce qui l’intéresse dans son métier ? "Tout, répond-elle, c’est super intéressant ! Pour les personnes, on voit leur évolution, c’est des personnes qui sont attachantes, et puis on les fait travailler, surtout la mémoire."
Se souvenir de la date du jour, mais aussi de son prénom et de son nom, garder les gestes du quotidien… Pour soutenir chaque personne dans son évolution psycho-cognitive, la maison Nazareth propose aussi des cours de danse adaptés. "Même si on est en fauteuil, même si on n’arrive pas à se mettre debout, on arrive à suivre. Ce n’est pas le fait de danser mais le fait de suivre et d’écouter, c’est déjà bien, ça remotive le corps", explique Anissa, accompagnatrice éducatif et social (AES).
Le confort est essentiel pour les personnes très âgées. C’est une priorité à la maison Nazareth. L’Ehpad a investi dans du matériel technologique très innovant pour faire autrement qu’avec le tout-médicament. Fauteuils relaxants, sièges zéro gravité, douches hydro-moléculaires, chaussures antichute… Des dispositifs qui bénéficient autant aux résidents qu’aux professionnels.
Ainsi, les chaussures minimalistes permettent-elles par exemple la prévention des chutes. Elles favorisent l’appui sur les orteils. La directrice Isabelle Keirle en porte elle-même depuis longtemps. C’est lors du confinement qu’elle a eu l’idée de les proposer aux résidents. Avec le soutien de l’Agence régionale de santé (ARS), "on a pu monter un atelier de prévention des chutes avec une recherche autour du port de chaussures minimalistes". Chaque semaine la Maison Nazareth propose des ateliers animés par des podologues ou des réflexologues.
Quant à la douche hydro-moléculaire, elle permet de laver le résident dans son lit, sans avoir à le déplacer. "Souvent les gens très dépendants sont lavés à deux et là ça permet d’avoir des soins sans qu’il y ait quatre mains sur le corps, on y va plus doucement", décrit Isabelle Keirle. Même si la douche hydro-moléculaire permet d’aller plus vite, ce n’est pas l’objectif de la maison, au contraire. "Ça permet surtout de donner des soins de confort et d’avoir plus d’une douche par semaine pour des résidents très dépendants. Ce qui est un luxe puisque souvent ils sont opposants aux soins, parce que pour eux c’est traumatisant, on les tire dans tous les sens… Alors que là, on les caresse avec de l’eau en les lavant."
Suite à un cancer j’ai voulu me tourner vers le social pour rendre un peu ce que j’avais reçu. On m’a beaucoup aidée quand j’ai eu mon cancer du sein...
Veiller au moral des résidents, cela passe par un environnement agréable. La Maison Nazareth est entourée de jardins, il y a une chapelle, des terrasses d’où l'on peut admirer la vue sur la cathédrale Notre-Dame-du-Puy… Mais il faut aussi veiller au bien-être des professionnels. Nadia, qui sert les repas, a une attention particulière pour chacun. Avant de travailler à la Maison Nazareth elle était dans le secteur de la mode haut de gamme. "C’était complètement différent !"
Travailler dans le secteur du grand âge, c'est l'aboutissement d'une reconversion professionnelle. "Suite à un cancer j’ai voulu me tourner vers le social pour rendre un peu ce que j’avais reçu, confie Nadia. On m’a beaucoup aidée quand j’ai eu mon cancer du sein. Donc j’ai cherché une autre manière de rendre ce qu’on m’avait donné." Nadia est donc là par volonté. Elle a trouvé dans le métier du soin "l’intériorité, la profondeur, le vrai..."
Pour soutenir, encourager, soigner, les professionnels de l’Ehpad Nazareth peuvent compter sur une quarantaine de bénévoles. "Être bénévole, on l’a dans le corps ou on ne l’a pas", déclare Jean-Paul, qui se dit touché par "le sourire des résidents". Il trouve en revanche "pénible de voir que les gens n’ont personne à qui se confier, des gens qui ont de la famille et qui disent : Mais mes enfants l’ont pas le temps…" Cet ancien élu municipal le constate, la Maison Nazareth n’est pas un établissement "tout à fait comme les autres". Pour lui, il y a "un esprit" insufflé par Habitat et Humanisme, à la suite des religieuses et prêtres qui ont fondé l'établissement.
En 2022, le scandale Orpea a mis en lumière des cas de maltraitance dans les Ehpad. Pour Isabelle Keirle, la réponse est dans la "transparence avec tous les acteurs". "Je pense que si on a de la transparence avec les résidents, avec les proches, la confiance, elle existe." La directrice de la Maison Nazareth pointe toutefois du doigt les "dérives administratives". Rendre des comptes, remplir des tableaux de bord… à force, "ça nous coupe aussi du sens de notre travail", regrette-t-elle. "Les pouvoirs publics devraient se soucier de ça, faire attention de ne pas nous submerger de toutes ces tâches pour qu’on soit auprès des équipes, auprès des familles."
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