Il est des personnes qui rêvent leur vie. D'autres qui réalisent leurs rêves : William Kriegel est de ces derniers. Il a même réalisé plusieurs de ses rêves : rêves d'aventures entre 18 et 25 ans, rêve américain avec une success story en Californie, il a développé l'une des plus importantes entreprises privées de production électrique. Et rêve d'équitation, il possède un ranch dans le Montana - La Cense Montana, un modèle d’élevage écolo et rentable - et a fondé le Haras de la Cense, à Rochefort-en-Yvelines. Mais le plus étonnant dans toute cette histoire, c'est que rien n'était gagné d'avance. Dans son livre, "À mon allure" (éd. Actes Sud), William Kriegel aborde tout de suite le sujet de sa maladie. Car c'est là où s'enracine sa volonté de fer. Et sans doute sa formidable philosophie de vie tournée vers l'autre.
Il commence par nous dire ceci : "Ma vie commence à 11 ans." Si William Kriegel n'a pas ou très peu de souvenirs de sa vie avant 11 ans, c'est à cause du choc terrible de cette journée de juillet, une journée de souffrance intense causée par une occlusion intestinale gangrennée. Né en 1945 en région parisienne, le jeune homme a vu sa vie basculer. "Je me suis retrouvé dans une situation difficile avec moi-même de non acceptance de la souffrance et de ses complications, d'injustice profonde qui m'a choqué, agacé, et je me suis interrogé assez rapidement dans des fausses valeurs existentielles sur pourquoi je subissais tout ça et comment je pourrais vivre avec tout ça."
Il faudra trois ans pour que sa maladie soit décelée : la maladie de Crohn. Dans son livre il se souvient d'un séjour à l'hôpital : "C'est une émotion immense qui me déborde complètement, un adolescent malade qui hurle pour lui-même 'Bagarre-toi !' Je n'ai jamais oublié cette colère, elle remonte dès que j'y pense", écrit-il. De se savoir malade, de souffrir et de voir les autres souffrir à l'hôpital, il comprend : "Je ne peux pas accepter que ça soit mon destin." C'est là où il a décidé de se battre. "Et que ne pas accepter la maladie ferait partie de moi-même."
Son enfance - "malheureuse" - il la passe en grande partie chez ses grands-parents, non loin d'un club hippique. Il ne sait pas bien comment l'idée lui est venue mais un jour il a voulu monter à cheval. "Contrairement à ce que l'on pourrait croire je ne suis pas tombé amoureux du cheval comme on tombe amoureux d'une belle poupée." Mais en montant sur cet animal, tout en puissance et en muscles, l'adolescent a senti qu'il pouvait le dominer. "Quand on est sur un cheval il y a un effet de pouvoir." Lui qui avait des difficultés à l'école a eu pour "médiateur d'éducation" le cheval.
"Quand on fait du cheval on ne regarde jamais les pieds du cheval, on ne regarde pas sa tête on regarde l'horizon. Quand vous regardez l'horizon le cheval sans le savoir suit votre regard." Dans son livre, William Kriegel parle très souvent d'horizontalité. "Je pense que dans la relation avec les autres, on peut les regarder d'en haut ou se faire regarder d'en haut ce qui n'est pas très agréable, ou on peut essayer de regarder les êtres de façon horizontale." Pour lui "horizontaliser" le rapport c'est gagner et recevoir le "respect" de l'autre, c'est un "leader" qui vous dit cela : "Les autres vous apportent ce que vous n'avez pas... Donc on a besoin de donner aux autres une capacité d'exister, de s'exprimer et d'être."
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