"Veiller sur elle", de Jean-Baptiste Andrea
Le 7 à Saint-Jean-de-Maurienne, le 8 à Cagnes-sur-Mer, le 12 à Charlieu, dans la Loire, le 13 à Beaune, le 14 à Neuville-sur-Saône, le 16 à Cannes… Quand on est prix Goncourt, il faut toujours avoir sa valise à portée de main ! Depuis que le prix prestigieux lui a été attribué, Jean-Baptiste Andrea ne touche plus terre. Les rencontres avec les lecteurs se succèdent dans un joyeux tour de France pour répondre aux sollicitations des médias des libraires et finalement des lecteurs.
Bien sûr, il y a d’autres prix tout aussi passionnants, mais le Goncourt quand même… Je vous révèle un peu de ce qui fait le succès du livre : c’est l’histoire de deux êtres qui n’auraient jamais dû se croiser et dont le destin est pourtant lié, Mimo et Viola, nés au début du XXe siècle, qui vont être témoins de l’histoire chaotique de l’Italie.
Une histoire enracinée dans les traditions italiennes
Avec cette dimension d’un grand roman, de presque six cents pages, un beau rendez-vous de lecture. L’histoire ? Michelangelo Vitaliani, dit Mimo, a perdu ses parents et vit sous l’ombre pesante de son oncle sculpteur et alcoolique. L’art est au cœur du roman, la sculpture qui s’impose comme l’épreuve du feu. Parce que la pierre ne triche pas, il faut aller chercher la forme dans le bloc. Quant à Viola Orsini, elle est issue d’une famille patricienne, qui compte encore dans l’Italie désargentée, bientôt gagnée par le fascisme de Mussolini, mais n’allons pas trop vite. Mimo et Viola, ces deux-là sont inséparables et ne cessent pourtant de s’éloigner l’un de l’autre. Adolescents, ils partagent de vrais secrets. A distance, ils ne se perdent pas de vue en dépit des conventions : « Je voulais te montrer qu’il n’y a pas de limites. Pas de haut ni de bas. Pas de grand ou de petit. Toute frontière est une invention. Qui comprend ça dérange forcément ceux qui les inventent, ces frontières, et encore plus ceux qui y croient, c’est-à-dire à peu près tout le monde », insiste Viola. La famille Orsini complote, l’ordre social règne encore pour quelques années mais le vieux monde se fissure.
De petite taille, Mimo se venge de cette société inégalitaire : « J’étais devenu un homme, un condensé de violence et de meurtre à peine retenu par un fil de soie », confesse-t-il. Il n’en deviendra pas moins un grand sculpteur. Viola, son âme sœur, se rebelle, prend tous les risques et le paiera cher. Les personnages secondaires se multiplient autour des deux héros, nous entraînant dans une traversée du siècle époustouflante.
Un roman fait de rebondissements…
C’est Mimo lui-même qui nous raconte son histoire : reclus dans un monastère sans être moine, il voit ses jours s’épuiser et décide de révéler ce qui a fait sa vie. Jean-Baptiste Andrea a ce talent de construire son roman d’une scène à l’autre, avec ce qu’il peut y avoir de merveilleux, d’inquiétant, de rocambolesque, de réaliste ou d’effrayant. Et si l’écriture était un peu comme la sculpture, écartant les détours faciles, se jouant de la chronologie pour aller à l’essentiel, tissant patiemment les fils d’une même histoire, en suivant conseils de son héros : « Sculpter, c’est très simple. C’est juste enlever des couches d’histoires, d’anecdotes, celle qui sont inutiles, jusqu’à atteindre l’histoire qui nous concerne tous, toi et moi, et cette ville et le pays entier, l’histoire qu’un ne peut plus réduire sans l’endommager. Et c’est là qu’il faut arrêter de frapper. »
Veiller sur elle, de Jean-Baptiste Andrea, Prix Goncourt 2023, est publié à l’Iconoclaste.
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