Saint-Honorat, une île-monastère au large de Cannes

En cette année 2025, pour la Semaine sainte et Pâques, les équipes RCF et Radio Notre-Dame sont accueillies à l'abbaye de Lérins. Du 17 au 20 avril, les offices du Triduum pascal seront diffusés en direct depuis ce lieu unique en France, l’île Saint-Honorat, la seule île-monastère de la Méditerranée. Découverte.

Saint-Honorat, une île-monastère

Pour se rendre à Saint-Honorat, il faut embarquer à Cannes et prendre la navette qui conduit vers l’archipel de Lérins. Quinze à 20 minutes de navigation suffisent pour rejoindre ce petit bout de terre de moins de 40 hectares. Entre 90 000 et 100 000 personnes s’y rendent chaque année. En été, jusqu’à 1 000 touristes et habitués viennent chaque jour goûter au charme de l'île et à la fraîcheur des sous-bois.

L’île Saint-Honorat est le lieu idéal pour fuir l’agitation de la côte cannoise. Entre les deux, "il y a un contraste saisissant", admet Frère Vladimir, l’abbé de Lérins. La communauté cistercienne accueille volontiers les visiteurs sur leurs terres, auxquelles beaucoup d'entre eux sont particulièrement attachés. "C’est quelque chose qui me frappe beaucoup, confie Frère Vladimir, le nombre de gens pour qui l’île est un souvenir d’enfance. Pour nous la communauté, c’est très touchant ! On marque des familles en fait !"

Car poser un pied sur l’île Saint-Honorat, c’est en effet pénétrer dans l’espace monastique. Le monastère, c'est l’île toute entière. "Ce n’est pas une île où se trouve un monastère, c’est une île-monastère, quelque part, décrit Frère Vladimir. Depuis la fondation du monastère au Ve siècle, les moines ont toujours considéré qu’il n’y avait pas un monastère sur l’île, mais que toute l’île en était un. Aujourd'hui d’ailleurs, canoniquement, notre clôture, c’est l’île."

Ça a été très développé sur cette île, l’assimilation à la vie monastique comme quelque chose qui évoque déjà le paradis

Déjà le paradis ?

Les moines sont présents sur l’île Saint-Honorat depuis seize siècles, avec deux interruptions. S’il se sont installés là et non pas sur l’île voisine Sainte-Marguerite, c’est parce qu’il y a de l’eau à Saint-Honorat. "Dans la Vie de saint Honorat, rédigée au Ve siècle, on dit que saint Honorat a fait jaillir l’eau en arrivant, rapporte Frère Vladimir. Les géologues ont une autre opinion de la question, peut-être que les deux sont vraies !"

C’est l’eau de la Siagne, une rivière qui se jette dans la baie de Cannes dont une résurgence passe sous l’île, qui fait vivre les moines de Lérins depuis le Moyen Âge. Et leur permet de cultiver la vigne, les oliviers, les arbres fruitiers ou les plantes aromatiques… Plantées au centre de ce petit espace de terre, les cultures sont protégées des embruns par la forêt qui borde les côtes. C’est peut-être de cette répartition de l’espace que naît le sentiment profond d’harmonie qu’éprouvent tant de visiteurs sur l’île.

L’île Saint-Honorat serait-elle le paradis des moines ? "Ça a été très développé sur cette île, l’assimilation à la vie monastique comme quelque chose qui évoque déjà le paradis, rapporte Frère Vladimir. Saint Eucher, qui est un moine du Ve siècle qui a écrit un traité qui s’appelle L’Éloge du désert, dit, en parlant de l’île, que les moines la regardent tel le paradis qu’ils contempleront plus tard."

La tour-monastère, le monument insolite de l’île Saint-Honorat

Les vestiges militaires montrent cependant que l’île n’a cependant pas été épargnée par les conflits. Sa situation stratégique a attiré les Sarrasins au VIIIe siècle, les Génois, les Espagnols, les troupes napoléoniennes ou encore les troupes allemandes. Tous ont laissé des traces de leur passage.

Parmi elles, la tour-monastère, monument emblématique de Saint-Honorat, est en restauration depuis 2020. Cette tour sarrasine comme on en trouve dans les villages de Provence a été aménagée à la fin du XIVe siècle en monastère, avec un cloître sur trois étages. 

On n'explique pas pourquoi les moines ont décidé de s’y installer mais on sait qu'ils y sont restés jusqu’en 1788, année de la fermeture du monastère. À leur retour, en 1869, les moines se sont installés non loin de là. La tour-monastère reste le modèle unique d’une tour de défense romane à l’architecture sacrée.

Les anciens philosophes grecs le disaient, puis les premiers chrétiens : il n’y a rien de plus beau que la lumière de la Méditerranée !

Goûter à la quiétude d'une île méditerranéenne

Aujourd'hui, l’île vit au rythme de la vie monastique. 17 h 45, les cloches sonnent l’arrêt du travail pour les moines de Lérins - elles sonnent suffisamment fort pour qu’on les entende de tous les points de l’île. Dans une heure, ce sera l’office des vêpres pour la communauté.

Le temps d’une retraite, chacun peut séjourner à l’abbaye, par exemple pour la Semaine sainte. Une occasion unique d’être à son tour, et comme les moines depuis le Moyen Âge, témoins de la douce quiétude des fins d’après-midi de printemps. "Les anciens philosophes grecs le disaient, puis les premiers chrétiens, conclut l'abbé de Lérins. Il n’y a rien de plus beau que la lumière de la Méditerranée !"