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Poésie Musiques et Chansons. Coup de chapeau à l’ami Prévert. Hommage à Georges Brassens.

Poésie Musiques et Chansons. Coup de chapeau à l’ami Prévert. Hommage à Georges Brassens.

Un article rédigé par Philippe Soler "Tous mélomanes" - RCF, le 29 août 2025 - Modifié le 30 août 2025
Poésie, musiques et chansonsCoup de chapeau à l'ami Prévert et hommage à Brassens

Coup de chapeau à l'ami Prévert, un homme simple, lequel restera émerveillé toute sa vie par l'enfance, cette enfance qu'il ne voudra jamais quitter. On l’imaginera déambulant dans les rues de Paris, sa cigarette au coin des lèvres, sa casquette de Titi Parigot sur la tête. L’ami Prévert familier, proche des autres, menant sa vie de bohème, difficilement classable, prenant ses distances à l'égard des courants littéraires, certainement parce qu’il ne pouvait pas faire autrement qu’être lui-même, faire autrement qu'être Prévert.

Fernand Léger Oiseaux Photo Philippe SolerFernand Léger Oiseaux Photo Philippe Soler
photo philippe soler

 

T'as de beaux yeux tu sais… 

Jacques Prévert sera intimement lié au cinéma, le cinéma en noir et blanc. Il sera un prodigieux scénariste, inventant des personnages hors du commun, des situations, des répliques pleines de fantaisie, de tendresse, des répliques pleines d'amour. «T'as de beaux yeux tu sais ». C'est de lui, c'est du Prévert. « Quai des brumes ». Michel Morgan. Jean Gabin. Et puis il y aura « Les enfants du paradis » ce conte de fées, chef-d'œuvre poétique, car oui, le cinéma pourra se faire poésie. Prévert mettra en scène des histoires d'amours tragiques, avec des personnages évoluant dans des décors populaires, des décors urbains, le plus souvent crépusculaires comme dans « Les portes de la nuit » avec ces enfants qui s'aiment.

 

photo philippe soler

 

Dans ma maison vous viendrez…

Chez Prévert, il n’y aura pas que les enfants qui s’aiment. Les adultes aussi, avec leurs doutes, leurs peurs, l'angoisse de se donner. « Dans ma maison vous viendrez » Quelle poésie ! On ne sait pas qui est cette femme, on ne sait pas à qui est cette maison. Nous sommes dans l'inconnu, celui d'un amour naissant.Il y aura des piments rouges accrochés aux murs blancs. Quelle belle image ! Le rouge étant synonyme de désir, le blanc synonyme de virginité. Et puis la confiance va grandir, le doute va laisser, petit à petit, place à la certitude. Il pourra arriver, en attendant, que l'on pousse des cris d'animaux, que l'on joue avec ses pieds. C'est très intelligent les pieds. L’auto-dérision sera de rigueur dans ce poème, avec un jeu musical sur le langage, un troupeau de Bonaparte, un Pinson, un homme qui s'appelle Tim Tam Tom. Et puis tout d'un coup, tout s'arrête, le silence. Et le vous se transforme en tu. Le passage au tutoiement sera d'un effet saisissant ! Les portes s'entrouvrent. Ils vont se donner l'un à l'autre. 

 

photo philippe soler

 

Rappelle-toi Barbara, il pleuvait sans cesse sur Brest.

En 1944 la ville de Brest est bombardée, complètement détruite. Prévert dans son imaginaire, sera témoin d'une scène. Un couple, dont l'amour bouleversé par cette guerre poussera un cri, un cri de douleur, un cri d'impuissance. Ce poème est d’une beauté fascinante, et il va éveiller en nous, une multitude d'images. En effet, il y aura quelque chose de cinématographique dans la poésie de Prévert. Nos amants se retrouvent au centre de l'écran. Le fait que Prévert, sans les connaitre, les tutoie, donne plus de proximité à la scène. Et on va se poser la question de savoir si, le principal crime de guerre ne serait pas, au bout du compte, de séparer nos amants. Pourtant le décor tragique, en arrière-plan, met en avant le triomphe du néant, le triomphe de la mort. Mais la désespérance de ce couple sera universelle. Peu importe le lieu, peu importe le prénom de la fille. Beaucoup de couples se retrouveront dans ce texte. Barbara ? Un hymne à la paix.

 

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Prévert en mode « Inventaire »

Prévert et sa boîte de Pandore. Sa poésie pourra se faire inventaire. Il y aura beaucoup de monde là-dedans. Quel désordre ! Quoique ce désordre, à y regarder de plus près, sera plutôt bien agencé, ce qui ne sera autre que, la caractéristique de la mouvance des surréalistes. Des collages, un assemblage, comme en dessin, comme en peinture. Un inventaire entre ordre et désordre, une succession d'images loin d'être hasardeuse. Prévert ne se contentera pas de nous livrer une liste arbitraire. Il a connu deux guerres et observe de ce fait, en surplomb, les décombres d'un monde. Et attention, prenons garde aux ratons laveurs !

 

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Deux et deux quatre. Quatre et quatre huit. Huit et huit font seize.

Ah, la belle époque, celle où nous usions nos fonds de culotte sur nos bancs d'école, où nous regardions par la fenêtre d'un air rêveur, où nous attendions avec impatience que la cloche sonne, pour partir à la rencontre d’un grand chemin de fer, qui nous amènera tout autour de la terre, dans un wagon doré. Rencontrer des coquillages, des îles parfumées. Voir la lune et les étoiles, sur un bateau à voiles partant pour le Japon, et les cinq doigts de la main tournant la manivelle d'un petit sous-marin plongeant au fond des mers, pour chercher des oursins. Cacher, dans son pupitre d’écolier, un oiseau. Entendre sa chanson, ne plus écouter le Maître pendant que les murs de la classe s’écroulent tranquillement. Et les vitres redeviennent sable. L’encre redevient eau. Les pupitres redeviennent arbres. La craie redevient falaise. Le porte-plume redevient oiseau.

 

photo philippe soler

 

Georges Brassens, troubadour des temps modernes.

Au tout début des années 1950, Georges Brassens et sa guitare aura été pour beaucoup, le déclencheur, celui par qui tout a commencé, celui qui nous apprendra à écouter, non pas la musique d'une chanson, mais les mots. Brassens intemporel par bien des aspects, renouant avec l’écriture des textes anciens, issus tout droit des fabliaux, comme la chasse aux papillons, les sabots d’Hélène. Brassens qui connaît ses classiques, et qui, de par son écriture, l'agencement des strophes, les rimes, les répétitions calculées de certains vers, se hissera à la hauteur des plus grands poètes de son époque. Quel luxe pour la chanson française d'avoir eu un tel auteur !

 

photo philippe soler

 

Faire la tombe buissonnière.

Brassens sera en proie, tout au long de sa vie à une terrible angoisse à l'idée de rejoindre l'éternel. S'il faut aller au cimetière, je prendrai le chemin le plus long, je ferai « la tombe buissonnière », je quitterai la vie à reculons, nous chantera-il. Dans « Oncle Archibald » la mort sera représentée par une femme, une femme de petite vertu, arpentant le trottoir d’un cimetière. Madame la mort, cette catin qui dira à Brassens, je cite : Ça fait longtemps que je t’attends, ça fait longtemps que t'aime, et notre hymen à tous les deux, était prévu depuis le jour de ton baptême. Quelle belle image, quelle écriture.

 

Poésie, musiques et chansons. Acte 8/8 « Coup de chapeau à l’ami Prévert. Hommage à Georges Brassens »

Samedi 30 aout à 16h, dimanche 31 aout à 00h et 20h. Philippe Soler. 

 

 

©RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Poésie, musiques et chansons
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