Notre société change, et nos politiques ont du mal à suivre
A la veille d'enjeux électoraux, dans quel état se trouve la France? Tous les sondages le confirment, les Français se sentent heureux. C'est d'ailleurs le paradoxe de la société française, que le sociologue Jean Viard résume ainsi: "Une société du bonheur privé et du malheur public". Une société en crise, mais qui a de formidables atouts, où la révolution collaborative met les pouvoirs publics au pied du mur.
l'abandon des pouvoirs publics
Il faut reconnaître la crise profonde qui touche notre pays. "Crise de l'emploi, nous dit Vincent Potier, qui touche de plus en plus de familles." Et aussi, il y a "la pauvreté qui s'aggrave, la désertification, la crise écologique, crise sociétale, le repli identitaire, les clivages, le rejet de l'autre et des autres, les révoltes, le terrorisme et le fanatisme..." La crise, ceux qui la constate sont en premier lieu ceux qui l'éprouvent. Ce sentiment d'être abandonné par les pouvoirs publics: que peuvent-ils contre les effets de la mondialisation ou du réchauffement climatique?
A l'approche des élections présidentielles, le journal La Croix a lancé une grande enquête "A la rencontre des Français". Le quotidien a enquêté dans les zones désindustrialisées des Ardennes, les déserts ruraux de l'Ariège et les zones périurbaines de la vallée de la Drôme. Conclusion, nous dit François Ernenwein: "On est frappé en France entre ce sentiment un peu de désespérance, de scepticisme par rapport au fonctionnement institutionnel, et dans certains territoires d'être abandonné par la puissance publique."
"Ce que n'a pas su faire le politique: raconter l'espérance de celui qui n'est pas au cœur du modèle."
la solidarité de proximité
"Quand on se promène en France on voit la capacité de s'inventer de grands bonheurs individuels." Ce que François Ernenwein a également constaté dans les territoires isolés: une forte capacité à se mettre en mouvement, à "inventer une forme de résilience, des solutions créatives".
On peut certes se réjouir de cette solidarité de proximité "qui fonctionne assez bien" mais qui échappe aux politiques. "Incapables, selon le rédacteur en chef de La Croix, d'aller puiser dans ce qui monte du pays". Pour Jean Viard c'est précisément "ce que n'a pas su faire le politique: raconter l'espérance de celui qui n'est pas au cœur du modèle." Et par cœur du modèle il entend le dynamisme des "12 métropoles où l'on crée de l'emploi".
la révolution collaborative
La société française est "une société d'individus qui ont acquis une liberté extraordinaire", note Jean Viard. Et ça n'est pas près de s'arrêter. En 10 ans, 3 milliards de personnes connectés au Web - les politiques ne pourront plus longtemps l'ignorer. L'un des principaux effets de la révolution numérique, la révolution collaborative, "une culture de l'urbain", de l'usage, de l'échange, du gratuit, qui est en train de bouleverser profondément notre pays et ses institutions. Pour Jean Viard "les politiques ont un mal fou à entrer dans ce monde-là".
Quel projet partager? Vincent Potier lance un cri d'alarme: "On a des richesses, des atouts, des leviers, des boucliers qui sont précieux et qu'il faut se garder de critiquer à tort et à travers, sinon tout peut s'écrouler." Il ajoute: "Il faut que les services publics jouent leur rôle de bouclier et de levier pour cultiver le bien commun."
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