Elle a été la première ministre des droits des femmes en 2012, avant de passer à l'Education Nationale. Un beau parcours pour cette native du Maroc qui a gravi les échelons politiques tout en restant engagée, notamment en faveur des minorités et de l'égalité des chances. A l'occasion de la sortie de "Réfugiés, ce qu'on ne nous dit pas" (Stock), petits secrets de bonheur d'une porte-parole et pas seulement de gouvernement.
Najat Vallaud-Belkacem, ancienne ministre de l'Education et du Droit des Femmes, ex adjointe municipale à Lyon, ancienne directrice d’une collection littéraire, actuellement conseillère régionale Auvergne Rhône-Alpes et présidente de France Terre d’Asile, sans oublier maman de jumeaux. Ça fait beaucoup. Mais de toutes ces facettes, quelle est celle où vous vous êtes sentie la plus heureuse, la plus épanouie ?
Waouh, quelle question ! Je dirais la vie familiale.
Devenir ministre, c'est moins important qu'être devenue maman ?
C'est exaltant évidemment de devenir ministre, je ne vais pas mentir, mais ce qui vous remue le plus profondément, ce qui introduit un changement quasi ontologique en vous, je pense que c'est davantage la maternité.
En tout cas, si l’on vous sent particulièrement motivée dans tous vos engagements, dans la vie quotidienne, quels sont vos petits secrets de bonheur ? Vous allez nous le dire.
Quand vous vous levez le matin, est-ce que c'est tout de suite d'humeur joyeuse, genre François Bayrou, qui vient de passer le cap des six premiers mois comme Premier ministre ? Ou c'est plutôt en mode mauvaise humeur, façon Jean-Luc Mélenchon, à la veille de déposer une motion de censure ?
(rires) Très franchement, ça dépend des rêves ou des cauchemars qui se sont amoncelés dans ma tête pendant la nuit. Donc ça dépend un petit peu dans quel état je me suis endormie la veille au soir en réalité.
Parce que ça "rumine" beaucoup dans la nuit ?
Oui, un petit peu. Et puis, pour être honnête, j'ai un regret : c'est que je n'arrive pas à m’empêcher, dès que j'ouvre les yeux, de prendre mon téléphone et de le regarder. Et ça, c'est une erreur que j'apprends le mieux possible à mes enfants à ne pas commettre. Mais voilà, ce réflexe, il est tellement installé en moi que, du coup, c'est surtout un moment, le réveil, où on ne s'écoute pas, où on prend connaissance des urgences. Puis après, on se lève, on prépare le café. Sans doute qu'après le café, ça va un peu mieux !
Quand vous avez un petit coup de déprime, qu'est-ce que vous faites pour vous remonter, le moral ? Est-ce que vous réécoutez du Brassens ou du Goldman comme dans votre enfance ? Est-ce que vous appelez votre mari, Boris Vallaud, à l'Assemblée nationale (président du groupe socialiste Ndlr ) ?
Alors, en fait, j'ai remarqué une chose, mais je le dis en toute honnêteté, parce que si ça pouvait être utile à d'autres …C'est qu'en fait, quand j'ai un coup de déprime, la meilleure façon d'en sortir, c'est de consacrer de son attention à quelqu'un qui est plus mal en point que soi-même. Et le fait de concentrer son attention sur l'autre personne, de lui apporter quelque chose, de l'aider, ça vous fait oublier votre propre déprime. Donc, depuis que je l'ai compris, j'avoue que j'essaye au maximum de faire ça.
J'ai aussi lu dans un entretien accordé au magazine Gala qu'un des moyens de vous vider la tête, c'était d'écrire un texte à partir d'un mot.
C'est tout à fait vrai. J'aime beaucoup jouer avec les mots et les sonorités. En réalité, si ça avait eu le succès que ça a aujourd'hui dans mon enfance, je pense que j'aurais pu faire du slam. Je vois bien l'espèce d'appétence qu'on peut avoir, pour croiser des mots aux consonances voisines.
Mêler le rythme du mot au rythme de la musique, c'est ça qui vous aurait plu ?
Oui, tout à fait. C'est vrai que j'ai écrit beaucoup de textes en partant d'un seul mot et en tournant tout le texte autour de lui. Mais pas mes discours politiques. Ce serait quand même un peu pervers.
Des discours politiques en slam, ça pourrait être une première !
Oui, il me reste encore des choses à découvrir. C'est chouette !
Question gratitude : Est-ce qu'il y a une personne qui a beaucoup compté pour vous, sur le plan personnel ou professionnel et à qui, aujourd'hui, vous avez vraiment envie de dire merci ?
Alors oui. Il y en a eu plusieurs Et ce n’est pas simple de sélectionner une personne en particulier. Mais bon, je pense que ça vous sera aussi venu à l'esprit, j’ai bien envie, tout de même, de rendre hommage à Gérard Collomb.
L’ancien maire de Lyon ...
Oui Et qui est mort trop tôt.(25 Novembre 2023 Ndlr) Il a beaucoup compté dans ma vie politique, naturellement, et il a fait cet effort incroyable de donner sa chance, pas simplement d'ailleurs à ma personne, mais à plusieurs autres jeunes pousses. Et tout ça a beaucoup compté pour moi.
Dernière question. Vous connaissez le dicton "pour vivre heureux, vivons, cachés." Mais pour vous, pour vivre heureuse, il faudrait vivre comment ?
En fait, Je crois que pour vivre heureux, il faut se donner la possibilité de jouer sur toutes les gammes de la vie. Un peu comme on jouerait de plusieurs instruments de musique à la fois. En fait, Je pense que c'est tout un orchestre, si je devais poursuivre l'analogie, qui fait la richesse et la multi dimensionnalité d'une vie. Et donc, pour être heureux, il faut bien se souvenir qu'il y a toutes ces dimensions-là et, si possible, ne passer à côté d'aucune d'entre elles. Par exemple, on peut avoir une carrière extrêmement riche et pleine de succès, mais que si, à côté de ça, on oublie sa vie personnelle et familiale, la vie passe tellement vite, Et après, on a des regrets, on n'est pas vraiment heureux, et vice-versa.
Prendre donc en compte toutes ces dimensions ….
Oui, y compris celles qu'on ose, peut-être parfois un peu moins investir. On a tous, je pense en nous, une dimension artistique. On est plus ou moins talentueux, on est bien d'accord. (sourires) Mais elle est en nous, néanmoins. On a tous une dimension spirituelle, d'une façon ou d'une autre, quelle que soit la forme qu'elle prend. Et donc, je pense que c'est important d'essayer d'investir tout ça. C'est ça, le bonheur !
Mais Najat Vallaud-Belkacem, avouez : une vie sans engagement, ce serait quand même une vie un peu triste pour vous, non ?
Bien sûr ! L'engagement est une de ses dimensions, absolument. Et d'ailleurs, Il peut prendre, là encore de multiples formes. Mais je crois que ce qui le caractérise, c'est l'intranquillité, c'est le fait de ne pas se faire à la fatalité, de ne pas se faire à l'idée que c'est comme ça, ça a toujours été comme ça. Bah, oui, Les pauvres sont pauvres.
Donc, ne pas baisser les bras ?
Voilà. Et donc, il faut absolument continuer à se battre. Et puis, en plus, pour le coup, je trouve que ça maintient vivant !
Son actualité : Sortie de "Réfugiés, ce qu'on ne nous dit pas", co écrit avec Benjamin Michallet, économiste et spécialiste des déplacements forcés. Editions Stock - 2025
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