Le tout numérique peut-il tuer la vie de l'esprit ?
Socio-économiste et théologien, Ingmar Granstedt nous alerte sur la menace existentielle que fait peser le « tout numérique » sur notre humanité et la « vie de l'esprit » au micro de l'émission Inspiration sur RCF Lyon. Son livre intitulé Libérer la vie de l'esprit en temps de péril , expériences de mort imminente, mémoire, conscience et résurrection, publié chez Peuple Libre, est un appel vibrant à retrouver notre souveraineté intérieure face à la puissance d’un système qui semble vouloir tout saisir et menace notre capacité d'attention.
Le tout numérique fragilise la vie de l'esprit-Photo de Kampus Production - © from PexelsL'érosion de l'attention et du désir face au système envahissant du numérique
Le « tout numérique » n'est pas qu'un simple outil, mais un « système envahissant » qui s’est répandu à une vitesse pandémique. Cette omniprésence vient fragiliser les fondements mêmes de la vie de l'esprit, à commencer par l'attention. Selon Ingmar Granstedt, elle est pourtant essentielle : « Si on ne fait pas attention aux choses, attention à la beauté, attention à la personne qui est en face, attention à l'enfant que vous avez à côté de vous, attention à ce qui se passe, eh bien, on passe à côté ».
Avec la multiplication des sollicitations (SMS, réseaux sociaux,...), nos conversations sont interrompues et « saucissonnées ». L'attention étant « constamment sollicitée, canalisée, fractionnée » par les écrans, elle ne permet plus aux choses de s'approfondir et de nourrir notre « mémoire profonde ». De même, le désir humain, qui est par nature « tendu vers quelque chose au-delà » et qui dépasse toujours, est menacé. Harcelé par la publicité et les propositions marchandes, l’être humain est constamment « ramené, rabaissé au niveau du
consommateur ».
Cultiver la résonance face à la rationalité sans âme de l'IA
Le danger principal du tout numérique est de disqualifier le vivant en tant que tel. L'intelligence artificielle, l'IA, n'est qu'une intelligence machine. Elle ne repose que sur la rationalité, c'est-à-dire le calcul et l'efficacité, alors que la raison humaine est beaucoup plus large et inclut les sentiments, les affects et les jugements.
L'IA ne fait qu'organiser une suite de mots en fonction de probabilités, puisant dans des milliards de données. Elle ne comprend pas ce qu'elle dit, elle « ne fait que singer finalement l'humain ». Elle est un « double de nous, mais un double qui n'a pas de vie ».
Face à cela, Ingmar Granstedt nous invite à cultiver la résonance. La résonance, c'est le plaisir d'écouter en soi ce qui se prolonge après une expérience, comme une note de musique. Quand la résonance est forte, elle inscrit un souvenir durable, un « trésor inépuisable » qui nourrit la mémoire profonde. Ce trésor est menacé par le rythme effréné, l'excitation constante et le cadre de vie « très pauvre en soi » imposé par la rationalisation.
Le grand autre, le système numérique, est un double de nous, mais un double sans âme et sans cœur
Une invitation à se connecter à la « vie résurrectionnelle » dès maintenant
L'enjeu est de ne pas devenir esclave de ces technologies en leur confiant tout. Le fil rouge proposé par Ingmar Granstedt pour rester maître de soi est la « critique de la puissance ». Le thème principal de son ouvrage est de retrouver une connexion avec la vie résurrectionnelle. Il ne s'agit pas seulement d'une vie après la mort, mais d'une transformation totale, qui a déjà commencé et que nous pouvons expérimenter « dès
maintenant ». Elle est un don premier et un mystère inépuisable. Cette énergie, qui est « la plus créatrice qui soit », s'enracine dans notre liberté la plus intime.
Pour y parvenir, l’auteur invite chacun à poser des actes : « Éveillez votre capacité d'attention aux autres », « prenez le temps de vous attarder », « réservez-vous des moments réguliers de silence pour écouter au dedans ». C'est en disant oui à cet amour et à la présence de l'Esprit Saint en soi que l'on peut « apprendre à discerner ce qui est de la vie ou ce qui est de la mort finalement ». Cela peut être notre contribution pour « limiter le chaos et garder l'avenir ouvert ».


Des itinéraires inspirants, des cafés philo, du conseil conjugal et familial et de la Communication Non Violente, le samedi à 16h50 et le dimanche à 9h30.
Lætitia de Traversay donne la parole aux hommes et aux femmes qui construisent ce monde, discrètement et passionnément : spécialistes du couple et de la famille, philosophes, formatrices en CNV (Communication Non Violente), des personnes qui osent s'engager et relever des défis, portées par leur foi en Dieu et leur foi en l'Homme.
