La Zarzuela. Du Pays basque aux terres andalouses.
Si nombre de Zarzuelas seront ancrées dans le décor madrilène, mettant en scène une large représentation des mœurs et coutumes liées à la capitale, notre Zarzuela se déclinera également avec brio, du Pays basque aux terres andalouses, portée en cela par des compositeurs d’exception. Il faut savoir que de manière générale, nos compositeurs de Zarzuela ne se frotteront pas aux autres formes musicales, d'une part, parce que la Zarzuela est un genre codifié, d'autre part, parce que nos compositeurs seront tributaires des directeurs de théâtre. Il leur faudra être productif. On leur passera commande et chaque saison théâtrale verra la production de nouvelles créations. Ce sera donc une véritable machinerie qui se mettra en place, avec peu de temps pour nos musiciens, d’aller voir ailleurs.
Photo Philippe Soler
Il s’appelait Amadeo Vives.
Cet immense compositeur va recevoir une formation d’une grande solidité, auprès de Felipe Pedrell, Pedrell figure incontournable de l'histoire de la musique de la péninsule. Musicologue de premier ordre, il sera un des premiers à effectuer des recherches poussées et approfondies sur le répertoire folklorique espagnol, toutes régions et provinces confondues, et puis d'autre part, sur la musique espagnole sacrée et profane du Moyen-âge et de la Renaissance. Pedrell enseignera avec le souci de responsabiliser ses élèves, face aux origines de la musique espagnole. Un bagage sans faille. Albeniz, Granados, Falla, Turina passeront entre ses mains et retiendront la leçon. Amadeo Vives fera partie de cette même race de compositeur. Il aura les outils, mais il n'aura pas la force de s'engager vers d'autres genres musicaux, à cause d'un handicap physique. En effet, Amadeo Vives était atteint de Poliomyélite et son état de santé sera un frein dans sa production. Blessures du corps, mais également blessures de l'esprit. Ecrire lui demandera des efforts, une prouesse au quotidien quasi surhumaine, et la critique regrettera qu'il n'ait pas abandonné le genre de la Zarzuela pour se consacrer à une musique « entre guillemets » beaucoup plus noble.

Jesus Guridi chantre du Pays basque.
Il y a quelques années de cela, je tombe sur la partition d’un recueil de mélodies basques de Jesus Guridi. Un véritable choc pour moi. Alors ma curiosité me pousse à partir à la découverte de ce compositeur. Qui était-il ? Un musicien basque, considéré comme le chantre de sa région natale, lequel saura mettre en avant le folklore de son pays, s’en allant rejoindre par là même les Grieg, Smetana, Borodine et quelques autres. Son œuvre sera parfaitement équilibrée entre Zarzuelas, opéras, œuvres pour piano, orgue, musique de chambre. Il suivra l’enseignement de la Schola à Paris sous la direction de Vincent D’Indy, pour ensuite aller étudier à Bruxelles et à Cologne. Il sera nommé professeur et directeur du Conservatoire de Madrid en 1944. Sa Zarzuela « El caserio » est considérée comme une œuvre maitresse, où tambourins, flûtes, se mêlent aux voix, à ces chœurs dont seuls les basques auront le secret, perpétuant, gardant vivant leur amour, la culture du chant, en une forte tradition orale, encore et toujours présente de nos jours.

Tomas Breton ou quand la Zarzuela rivalise avec l’art lyrique international.
Tomas Breton, immense compositeur, pas si évident que cela à cerner, assez paradoxal dans le sens où le genre de la Zarzuela ne l'attirera pas. Ce qu'il veut, c'est donner à l'Espagne ses lettres de noblesse en matière d'opéra pur. Il dira que l'opéra national ne doit pas être la résultante de la Zarzuela moderne, celle-ci possédant sa propre physionomie, ses objectifs, son public d'aficionados. Pour lui, il faut sortir de cette impasse, et il se mettra à composer de nombreux opéras, dont il écrira du reste, les livrets. Mais dans le même temps, il ne pourra éviter la case Zarzuela. Alors sans grand enthousiasme, il se mettra à l’ouvrage avec « La Verbena de la Paloma », la Fête de la colombe. Et là ? Surprise ! Le succès sera foudroyant, cette zarzuela devenant emblématique, une œuvre maîtresse de ce que l’on appellera « le genre chico » le petit genre. Un acte d'une perfection absolue jamais démentie à ce jour. Que d'ambiguïté chez Breton. Lui qui refusera de se laisser enfermer dans le genre de la Zarzuela, sera reconnu contre son gré comme le Maître en la matière. Il y a peut-être une explication à cela ? A force de travailler à jeter les bases d'un opéra espagnol pur, Breton en maîtrisera l'écriture à la perfection, et sans le vouloir, il fera œuvre de fondateur dans le domaine de la Zarzuela. Il va la dépoussiérer de tous ses restes d'italianisme. Il va devenir une balise pour les musiciens à venir, une référence de l'art lyrique espagnol, dont Manuel de Falla se souviendra.

Je ne peux passer sous silence, cet extraordinaire livre de Virginia Sanchez Rodriguez, sur Tomas Breton. Un livre qui se concentre sur les dernières années du compositeur, chef d'orchestre, conférencier, administrateur, professeur et écrivain. Documentation très poussée et fournie. Virginia Sánchez Rodríguez est titulaire d'un doctorat en musicologie de l'Université de Salamanque, ainsi que d'une licence en histoire de l'art, d'un master en musique hispanique. Elle possède l'agrément national de professeure d'université, de maître de conférences. Elle est secrétaire et coordinatrice éditoriale de la revue Cuadernos de Investigación Musical (CIDoM). Elle collabore régulièrement comme évaluatrice externe pour des revues indexées, tant au niveau national qu'international. Elle a écrit sept livres et plus d'une centaine de chapitres et d'articles publiés dans des revues nationales et internationales.

Mais d’où vient le mot Zarzuela, quelle est son étymologie ?
Il nous faut nous reporter, au tout début du dix-septième siècle. Il était une fois, au nord de Madrid, un terrain forestier peuplé de ronces. Le Roi d'Espagne, Philippe IV venait y chasser régulièrement. Il demandera à un architecte de construire un pavillon de chasse, pavillon de chasse qui s'agrandira au fil du temps, pour devenir la résidence estivale du Roi et de sa cour. Ce petit Palais étant construit sur un terrain qui à l'origine était envahi de ronces, on lui donnera le nom de Palais de la Zarzuela car en espagnol, ronce se dit « Zarza » Le Roi afin de se distraire, fera venir dans son palais des compagnies de théâtre. Des pièces y seront représentées et elles prendront avec le temps une couleur particulière. En effet on y mélangera la danse et la musique. Un nouveau genre théâtral et musical est en train de s’affirmer. Nous sommes autour de 1650. Au bout de quelques années ce genre musical prendra le nom du lieu qui l’a vu naître, Zarzuela.
Philippe Soler.
Lundi 10 novembre à 16h
La Zarzuela de A à Z. Du Pays basque aux terres andalouses. Acte 2/3
Lundi 24 novembre à 16h
Histoire de la Cancion Cuplé, ce pur dérivé de la Zarzuela Acte 3/3
Pour mémoire.
Lundi 3 novembre à 16h
La Zarzuela de A à Z. Une belle et noble inconnue Acte 1/3


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