51e Festival de Deauville : Zoey Deutch à l’affiche de « Nouvelle Vague » reçoit un Nouvel Hollywood des mains de Claude Lelouch.
Ce vendredi soir, c’était au tour d’une étoile montante du cinéma américain de recevoir son trophée du Festival du cinéma américain de Deauville : un Nouvel Hollywood, récompensant chaque année un(e) jeune comédien(ne) symbole de la nouvelle génération du cinéma américain.
Claude Lelouch remet son Nouvel Hollywood à Zoey Deutch © Pierre GermayCette année, c’est à Zoey Deutch que cet award a été remis. Cette jeune comédienne très prometteuse, qui présente tout de même déjà une filmographie riche de vingt-cinq longs-métrages, a débuté dans des séries télé pour Disney Channel avant d’être en 2024 à l’affiche de « Juré n°2 » de Clint Eastwood où elle interprète l’épouse enceinte du juré n°2.
Jean Seberg dans « Nouvelle Vague » le film de Richard Linklater
Aujourd’hui, elle est l’héroïne de « Nouvelle Vague » de Richard Linklater. Elle y interprète l’actrice Jean Seberg, partenaire de Jean-Paul Belmondo dans « À bout de souffle », le film-culte que Jean-Luc Godard a tourné en 1959 (sorti en salles en 1960).
Et c’est précisément le tournage de ce film mythique de la Nouvelle Vague du cinéma français que restitue le cinéaste américain Richard Linklater. Et que ce soit un Américain qui s’y atèle symbolise à merveille le lien que le Festival de Deauville tisse entre cinéma américain et cinéma français, année après année depuis plus de cinquante ans.
Son film « Nouvelle Vague » est une vraie leçon de cinéma en même temps qu’une bouffée d’oxygène, une comédie irrésistible où l’on voit un Jean-Luc Godard truculent, soutenu par François Truffaut et Claude Chabrol, tenter péniblement de convaincre des producteurs de financer son film. Loin d’être un film intello – prise de tête, c’est aussi un hommage rendu à Raoul Coutard, son chef opérateur, passé maître des tournages faits de bouts de ficelles astucieux et réalisés dans un noir et blanc aussi lumineux que nostalgique.
En présence de Claude Lelouch
Pour remettre ce prix à la jeune lauréate, qui mieux que l’un des derniers survivants de l’époque de la Nouvelle Vague (à laquelle il n’a jamais appartenu) du cinéma français et de la revue « Les Cahiers du cinéma », à savoir Claude Lelouch. Sur la scène du Centre International de Deauville, le réalisateur de « Un homme et femme », palme d’or à Cannes, en 1966, s’est d’abord félicité de remettre ce Nouvel Hollywood à « une actrice incroyable, très jeune et déjà au sommet de son art ».
Avant de se souvenir d’une anecdote qui sent bon le vécu : « À l’époque, j’étais jeune, j’étais projectionniste de la salle où « À bout de souffle » fut projeté pour la toute première fois à Jean-Luc Godard et toute son équipe. À la fin de la projection, il n’y avait que des mines sombres : Belmondo était triste, Jean Seberg déçue, tout le monde était très inquiet au vu du résultat. On pensait même que le film ne sortirait jamais ! ».
Zoey Deutch authentique… à la Godard !
Très honorée de recevoir ce prix, Zoey Deutch a alors expliqué qu’elle provenait « d’une famille d’artistes où se côtoyaient musicien de jazz, peintre, acteur et réalisateur. J’ai baigné toute ma jeunesse dans ce milieu artistique, devenir actrice était naturel pour moi ».
Très impressionnante sous les traits de Jean Seberg dans cette reconstitution en noir et blanc du tournage du film de Godard qui la voit maîtriser étonnamment bien la langue de Voltaire, Zoey Deutch confie alors que « La France est pour moi une seconde maison. Cette immersion dans les classiques de la Nouvelle Vague du cinéma français m’a permis d’être authentique comme Godard l’était lui-même. C’est un hommage au cinéma français. Je savoure ce privilège, cette chance d’avoir participé à ce tournage ».
Grâce aux lunettes de Godard
Guillaume Marbecq, le comédien français qui campe Jean-Luc Godard à l’écran, rejoint ensuite Zoey Deutch sur scène pour présenter le film de Richard Linklater et se souvient avec amusement du casting au terme duquel il a décroché le rôle :
« J’avais passé un premier casting pour lequel j’avais eu l’idée de mettre une paire de lunettes comme celles de Godard. Je n’avais plus de nouvelles quand la production me rappelle pour passer un second casting. En chemin, je m’aperçois que j’ai oublié les lunettes de Godard. Je téléphone alors à un ami opticien qui a dû dare-dare rouvrir sa boutique pour m’amener les lunettes en question. Résultat : je suis arrivé en retard ! Ce que la production n’a pas manqué de me faire remarquer. Mais quand je leur en ai expliqué la raison, ils ont bien ri. Ce deuxième casting, avec tous les autres comédiens du film, a duré huit heures. Et j’ai eu le rôle. Grâce aux lunettes de Godard ! ».
La leçon de cinéma
Et de conclure combien il avait savouré son expérience : « J’ai aimé cette façon de faire du cinéma de Jean-Luc Godard : tous les matins, vous inventez sans trop savoir ce que ça va donner, on tournait en rue, puis dans une chambre d’hôtel, la plus petite parce que la moins chère… ! ».
Bref, le cinéma comme seul Godard savait en faire. Et que Richard Linklater reproduit ici avec nostalgie et amour. Un régal !
