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Un couple, d'Eliette Abécassis
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Un couple, d'Eliette Abécassis

Un article rédigé par Christophe Henning - RCF, le 14 avril 2023  -  Modifié le 17 juillet 2023
L'Actualité littéraire Un couple, d'Eliette Abécassis

L’histoire commence en 2022, dans le jardin du Luxembourg, à Paris, deux petits vieux, disons-le, sur le même banc, devisent tranquillement. Peut-être l’occasion de se rappeler le bon temps, en tous cas, une autre époque, moins vibrillonnante, une autre vie. Les souvenirs affluent, précis. Elle prend la parole pour faire mémoire de son amour : « Là-bas, près du bassin, ils se sont embrassés pour la première fois. Et sur ce banc, ils se sont rencontrés par un après-midi de mai. » Ensuite ?

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Ensuite, le livre décrit à rebours l’aventure de ce couple ordinaire et unique, qui a traversé soixante-dix années d’un XXe siècle agité. Pour arriver, au soir de leur vie, à cette difficulté de l’âge : « Au fond, tu n’as pas le moral parce que tu t’ennuies. C’est vrai, je ne suis plus quoi faire de moi… », répond-il. Jules et Alice forment un couple solide qui n’a pourtant pas été à l’abri des vicissitudes. En remontant le temps, on découvre combien aimer est une traversée au long cours, pris par les fragilités de chacun et par l’air ambiant. Parce qu’on n’aime pas de la même façon en 1955 ou en 2018, même si on aime à tout âge, c’est peut-être cela le secret de la longévité.

Une histoire d’amour faite de simplicité, à l’image des gens heureux sans histoire. Peut-être que l’ordinaire est-il quand même une grande histoire… Les enfants, bien sûr, sont au cœur de cette vie de couple. Des enfants qu’ils veulent protéger des aléas de l’histoire, qui, pourtant font partie de l’héritage : « Vous ne nous avez jamais parlé de votre enfance, de vos parents, de vos grands-parents, on ne sait rien ! On dirait que vous êtes nés d’une génération spontanée. Vous ne nous avez appris aucune coutume, aucune histoire, rien qui nous vienne de notre héritage, s’entendent-ils reprocher : Comment veux-tu qu’on se construise sur le silence ? » Alors, ils retracent les grandes étapes de leur existence : après l’Algérie pour lui en 1957, ils sont étudiants en 68, de gauche en 1981, bouleversés le 11 septembre 2001… La grande histoire ne parvient pas toujours à trouver un écho dans leur vie plus préoccupée de réussite et d’amour. D’amour surtout, pour un couple ordinaire, secoué par les attirances et prisonnier des habitudes. Comment résister à l’usure du temps : « On n’a plus rien en commun. Chacun vit sa vie de son côté. C’est clair, je n’en peux plus de cette mascarade. » Il y avait pourtant une telle complicité, quelques années auparavant : « A force d’être ensemble, ils sont devenus l’ombre l’un de l’autre. Ils se parlent à demi-mot, se consolent et s’excusent, ils n’ont plus la force d’argumenter, ni de se disputer. »

Pour durer, deux recettes, sans doute : l’une qui consiste à vivre dans l’instant, et peut-être se rendre compte que le temps d’une vie est passé, d’un battement d’ailes. L’autre tient d’une manière d’être : « Ils se traitent avec respect, avec humour, avec bienveillance, patience, joie et amitié… » Dans ce texte plein de délicatesse et d’admiration, on retrouve les accents de la biographie filiale qu’avait publiée Eliette Abécassis en 2022 sous le titre « Transmission », en hommage à son père philosophe Armand Abécassis et sa mère la psychanalyste Janine Abécassis. Ode à l’amour, ce roman raconte une vie et peut-être aussi un idéal : « Quand j’ai rencontré Alice, je savais que nous allions nous marier, dit le narrateur. Mais j’ignorais tout de l’incroyable aventure que nous allions vivre. Nous l’avons fait !  Il y a eu des épreuves, des hauts et des bas, des rebondissements, des erreurs, des tempêtes… » Qui a dit que la vie de couple était un long fleuve tranquille ?

Un couple, d’Eliette Abécassis, est publié chez Grasset.

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