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Livres – Les parents laissent parfois un héritage fait de blessures
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Livres – Les parents laissent parfois un héritage fait de blessures

RCF, le 18 janvier 2023  -  Modifié le 17 juillet 2023
Au pied de la lettre Les parents laissent parfois un héritage fait de blessures

Ne parlez pas d’un amour de père ou d’une mère aimante : il arrive que les parent ne soient pas si généreux et sympathiques. Il en résulte des blessures profondes, parfois cachées souvent inavouables. Elles sont au cœur du roman de Caroline Dorka-Fenech, "Tempêtes et brouillard" (éd. La Martinière), et de celui que signe Virginie Mouzat, "Le dernier mot" (éd. Flammarion).

Virginie Mouzat ©éditions Flammarion / Filep Motwary ; Caroline Dorka-Fenech ©Photo DR / La Martinière Virginie Mouzat ©éditions Flammarion / Filep Motwary ; Caroline Dorka-Fenech ©Photo DR / La Martinière

 

Un père qui déshérite ses enfants

Pour Karina, les liens avec son père sont distendus. Quand ils décident de déménager pour s’installer à Marrakech, Karina ne comprend pas. Est-ce une fuite, un aveu, une nouvelle lubie ? Que reste-t-il de l’amour paternel ? 

 

Après "Rosa dolorosa", en 2020, qui racontait la quête obsédante d’une mère pour prouver l’innocence de son fils, Caroline Dorka-Fenech perce la relation père-fille. Pour son deuxième roman, "Tempêtes et brouillard", elle s’est inspirée d’un fait réel, la mort de son père. "Et les circonstances qui ont entouré sa mort puisqu’il a déshérité ses trois enfants, moi y compris." Cela a été "le point de départ" du livre. Caroline Dorka-Fenech envisage l’écriture de fiction comme "une exploration", "comme un moyen de connaissance du réel et de l’intimité."

 

Qui est vraiment ce père ? Un homme qui entretien de lui-même l'image d'un père modèle. "Il s’héroïse, il héroïse sa vie." Il n’a donc plus rien à devoir à ses enfants. Un jour il leur annonce qu’il laissera tous ses biens à sa nouvelle femme. Celle qu’il a épousée au Maroc, pour qui il s’est converti à l’islam. Si l’héritage en question ne représente pas une somme importante, ce qui compte c’est la rupture symbolique. "On a l’impression d’être rayé de l’existence."

 

Dans ce livre, on comprends, "par bribes", décrit la romancière, que le père a été "extrêmement violent, déviant, pervers". Pourtant, on n’arrive pas totalement à le détester. "C’était important pour moi d’écrire dans la suspension du jugement, explique Caroline Dorka-Fenech, de ne pas écrire à charge, d’essayer de voir les aspects de cet homme vraiment dans sa complexité." L’héroïne, elle, va devoir composer avec sa grande blessure, celle "d’avoir douté de l’amour de ses parents". Sa mère qui est partie, son père violent : "Elle ne sait pas ce que c’est que cet amour, teinté de perversion..."

 

Une mère qui a cessé de l'être

Virginie n’en peut plus de cette mère qui tient toute la famille en otage. Les incompréhensions s’accumulent. Avec le décès maternel la tentation est grande de reconstituer l’histoire, de chercher à percer le mystère de cette distance, de l’incapacité d’être une mère aimante. À moins que…

 

"Le dernier mot" (éd. Flammarion) est le cinquième livre de Virginie Mouzat, journaliste de mode devenue romancière. C'est une sorte d'enquête intime qu’elle mène, sur la relation entre une mère et sa fille. L’auteure ne dit pas qu’elle est inspirée d’une histoire vraie. "Le dernier mot" est "un roman où tout est faux", affirme Virginie Mouzat. "Dès qu’on se rappelle quelque chose et qu’on l’écrit, c’est faux. Ça passe au filtre de nos subjectivités, donc on rentre dans le faux, de plain-pied et en conscience et intentionnellement, bien sûr !"

 

Le personnage de la mère est plein d’énigmes. "Ce qui m’intéressait dans ce personnage, raconte Virginie Mouzat, c’est la fuite devant l’obligation du maternel." La romancière voulait décrire une figure maternelle qui "se démet" de ses fonctions. "C’est une maternité qui s’inscrit avant tout dans le refus en creux, par défaut, c’est là que je trouve intéressant d’aller fouiller."

 

La dépression de la mère rend son entourage prisonnier. Dans son roman, Virginie Mouzat montre un entourage dans "l’obligation de marcher sur des œufs" car "à chaque fois il y a l’horizon de la blessure". Ce faisant, la mère "fait de son état de victime une surpuissance qui nous réduit nous l’entourage, à l’état de victime". Cette mère qui a accepté, au moment de son mariage, de changer de prénom... "Avec quel horizon, avec quelle promesse elle accepte ça ? À partir de son mariage, jusqu’à la fin de ses jours elle va vivre à côté d’elle-même. Je trouve ça fascinant, fascinant et glaçant !"

 

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©RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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