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La levée de l'anonymat pour les donneurs de gamètes, une loi qui "apaise"

La levée de l'anonymat pour les donneurs de gamètes, une loi qui "apaise"

RCF, le 1 mars 2023  -  Modifié le 7 août 2023
Où va la vie ? La bioéthique en podcast Les nouvelles filiations après la levée de l'anonymat des dons de gamètes (1/3)

Les personnes nées d'un don de gamète peuvent désormais savoir qui sont leurs donneurs. On ne privilégie donc plus le droit au secret des parents. Si l'accès aux origines a mis du temps à être voté, il y a un consensus dans notre société en faveur de plus de transparence. Pour beaucoup, cette loi va dans le sens d'un apaisement.

De plus en plus, les donneurs de gamètes qui ne cachent pas leur fierté d'avoir pu aider à la création d'une famille ©Unsplash De plus en plus, les donneurs de gamètes qui ne cachent pas leur fierté d'avoir pu aider à la création d'une famille ©Unsplash

Depuis le 1er septembre 2022 les personnes nées de don de gamète peuvent avoir accès à leurs origines. La demande ne peut être faite que par l’enfant lui-même une fois majeur. Que dit vraiment la loi ? Pourquoi a-t-on levé l’anonymat qui était jusque-là la règle ? Qu’est-il des droits des donneurs ? 

 

La levée de l’anonymat : plus de transparence 

 

La loi permet aujourd’hui d’avoir accès à des données identifiantes – c’est-à-dire le nom, le prénom la date de naissance et le lieu de naissance du donneur - ou non identifiantes – comme des informations socio-économiques, de famille, sur la motivation du donneur, etc. Ces données non identifiantes permettent à l’enfant de se "créer une histoire" mais "on voit beaucoup d’enfants qui n’ont absolument pas envie de rencontrer leur donneur", remarque le Dr Emmanuelle Mathieu d'Argent, praticien hospitalier, médecin de la reproduction à l'hôpital Tenon. Pour d’autres en revanche, c’est très important. 

 

"Depuis la loi, il y a beaucoup de demandes. Et ça ne fait pas du tout peur aux donneurs, précise de médecin, au contraire, on a même des donneurs – et moi je m’occupe plus particulièrement des donneuses – qui ont attendu que la loi soit passée pour pouvoir donner." Des donneurs qui ne cachent pas leur fierté d'avoir pu aider.

 

Cette loi va dans le sens de l'apaisement, selon le Père Bruno Saintôt, jésuite, directeur du Département d'éthique biomédicale du Centre Sèvres. "J'étais un militant de la levée de l’anonymat", confie-t-il - même s’il reconnaît que "ça a fait débat dans l’Église catholique". Selon lui, cette loi va dans le sens de la "personnalisation des relations". "Je suis très attentif à ce désir de construire une histoire... Les personnes cherchent quelqu’un. Il y a quelqu’un dans l’histoire qui a permis que je suis là. Ce quelqu’un a besoin de recevoir une incarnation, c’est quand même intéressant. Le corps est signifiant."

 

La levée de l’anonymat : qui est concerné ?

 

En 2020, selon l’Agence de la biomédecine, 662 enfants sont nés par assistance médicale à la procréation (AMP) avec don de spermatozoïdes et 289 sont nés par don d’ovocyte, sur les 20.223 nés par AMP. L’accueil d’embryon n’a concerné que 45 enfants. 

 

L’accueil d’embryon est plus rare car il est perçu comme un processus d’adoption. "Et l’adoption, ça rappelle une histoire d’abandon. On n’est pas du tout, du tout dans la même démarche, selon le Dr. Mathieu d'Argent. Je pense que pour des couples qui demandent un don de gamètes ils souhaitent ne pas affronter cette question de l’abandon." Les couples concernés préfèrent généralement avoir recours au double don de gamètes. L’idée d’embryons cyroconservés "dans un état étrange" suscite "des tas de représentations" autour d’un "enfant déjà potentiellement là" et "associé à une forme d’abandon". Pour le jésuite, "cela réactive ce que l’on ne voulait pas voir : le statut éthique de l’embryon". 

 

Pourquoi a-t-on levé l’anonymat qui était jusque-là la règle ?

 

Lever le secret sur le mode de conception ou sur l’anonymat des donneurs ? L’un et l’autre sont liés mais ne sont exactement la même chose. Pour aboutir à cette loi, "les deux ont été discutés", rappelle Bruno Saintôt. Si auparavant on privilégiait le droit des couples au secret, cette fois on a entendu la souffrance des enfants. Elle "a mis du temps à trouver une place", observe le jésuite. "L’écoute de la souffrance des enfants qui sont nés avec un tiers qu’ils ne peuvent pas identifier a mis du temps à émerger et à être reconnue socialement ou politiquement. Ça c’est très intéressant pour moi, c’est qu’il y a des souffrances dans la société qui ne sont pas entendues."

 

Aujourd’hui, les psychologues, psychanalystes, psychiatres, tous sont d’accord, "il y a un consensus pour dire : pas de secret". "Les familles ont intégré ça, observe Bruno Saintôt, mettre des mots sur une histoire même si elle est compliquée complexe c’est toujours mieux que d’enterrer quelque chose dont on a honte."

 

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©RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Où va la vie ? La bioéthique en podcast

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