Le combat non-violent, un esprit de vie

RCF, le 23/12/2019 à 10:00
 -  Modifié le 05/12/2022 à 09:51
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Le combat non-violent, un esprit de vie

C'est avec l'action de Gandhi (1869-1948), que naît le terme de "non-violence". Le néologisme vient probablement d'un journaliste anglais, il a été popularisé en français grâce à Romain Rolland en 1923. Il sous-entend trop souvent l'idée de non-action, voire de passivité. Ce que nie Jacques Sémelin, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de l'histoire de la violence. Pour lui, la non-violence est un combat, une force collective de non-coopération. Il est l'auteur en 2000 de "La non-violence expliquée à mes filles" (éd. Seuil).

Wikimédia Commons / Marc Riboud, 1967 Wikimédia Commons / Marc Riboud, 1967

"Un combat non-violent"

 

Les deux termes que Gandhi utilisait en sanskrit pour parler de sa doctrine renvoient, d'une part au rejet de la violence pour ne pas nuire à autrui et d'autre part à l'idée de force collective. Pour Jacques Sémelin, la formule de "combat non-violent" est, en ce sens, fidèle à la pensée de Gandhi - il rappelle que l'une des premières définitions de la violence est "abus de la force" (citée en 1214).

 

Les influences chrétiennes de Gandhi

 

On ne le cite pas souvent, observe l'historien, mais Gandhi a été inspiré par Léon Tolstoï (1828-1910). Le célèbre écrivain russe et le dirigeant indien ont entretenu une correspondance fournie, qui permet de penser que le christianisme a fortement influencé ce dernier.

 

D'ailleurs, avec Origène, l'un des premiers Pères de l'Église, mais aussi les franciscains, les quakers ou les mennonites, il y a tout un courant chrétien, qui est très proche de l'esprit de Gandhi. "Ce serait une erreur de limiter la non-violence à une approche religieuse ou philosophique", précise cependant Jacques Sémelin, car dans l'esprit de Gandhi c'est surtout une forme de pragmatisme.

 

Une stratégie de non-coopération

 

"Il y a une manière d'établir un rapport de force collectif basé sur le traité de la coopération", explique l'historien. En ce sens, Gandhi est un héritier d'Étienne de La Boétie (1530-1563), quand il évoque la coopération des opprimés :

 

"Je désirerais seulement qu’on me fît comprendre comment il se peut que tant d’hommes, tant de villes, tant de nations supportent quelquefois tout d’un tyran seul, qui n’a de puissance que celle qu’on lui donne, qui n’a pouvoir de leur nuire, qu’autant qu’ils veulent bien l’endurer et qui ne pourrait leur faire aucun mal, s’ils n’aimaient mieux tout souffrir de lui, que de le contredire."
Étienne de La Boétie, "Discours de la servitude volontaire" (1576)

 

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