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L'art de la parodie chez Johann Sebastian Bach
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L'art de la parodie chez Johann Sebastian Bach

Un article rédigé par Michel Trémoulhac - RCF Saint-Étienne, le 18 janvier 2023  -  Modifié le 17 juillet 2023
Musiques en vie L'art de la parodie chez J.S. Bach

Nous parlerions aujourd'hui de "remix" ! Mais cette pratique ne date pas d'hier et l'allemand Jean-Sébastien Bach "parodiait" déjà fréquemment au XVIIIe siècle, ses propres oeuvres ou celles de ses contemporains. 
La raison en est toute simple : une charge de travail énorme !

Portrait de Bach peint vers 1720 (Köthen) par Johan Jakob Ihle Portrait de Bach peint vers 1720 (Köthen) par Johan Jakob Ihle

La fin d'une période heureuse

Au service de Léopold d'Anhalt-Köthen, J.S. Bach aura connu une période très heureuse. Le prince est plus qu'un protecteur, c'est un véritable ami. Mais les choses changent à la cour à partir de 1721 : le prince se remarie et sa nouvelle épouse n'est guère attirée par les arts. Le génie du compositeur la laisse indifférente. De plus Léopold se doit de réduire son train de vie pour participer davantage à l'entretien de ses régiments, en tant qu'officier prussien. Bach qui a déjà perdu son épouse en 1720 veut changer d'air, quitter la principauté et trouver un poste dans une ville universitaire pour ses enfants.

 

Léopold d'Anhalt-Köthen

 

A Leipzig, une charge de travail considérable

Suite au décès de Johann Kuhnau, le poste de Thomascantor de Leipzig se libère en 1722. C'est un titre moins prestigieux que celui de Kapellmeister de la cour de Köthen mais qu'importe, Bach pourra y scolariser ses enfants et commencer une nouvelle vie, loin des trop douloureux souvenirs de sa chère épouse défunte Maria-Barbara. En s'installant à Leipzig en mai 1723, il ne mesure sans doute pas le travail qui sera le sien. Outre sa charge de Cantor de St-Thomas, il doit "alimenter" en musique les quatre autres églises de la ville. Durant les premières années à Leipzig il devra composer une nouvelle cantate chaque semaine ! A cela s'ajoute l'enseignement, à l'école qui jouxte l'église St-Thomas : catéchisme, latin, surveillance de l'internat. C'est la mission qu'il apprécie le moins.

 

St-Thomas

 

Enfin au plan municipal, il est Director musices. La visite d'un personnage important, la naissance ou le décès d'un notable de la ville, les fêtes, commémorations, hommages, sont autant d'occasions pour le conseil municipal de lui demander de nouvelles compositions, qu'il doit diriger après avoir fait répéter les musiciens et chanteurs.

 

Un véritable art de la réutilisation

Bach n'est pas le seul, les musiciens de l'époque baroque, souvent au service d'un prince ou d'une église, se devaient de composer sans cesse à la demande de leur protecteur. Parfois en manque d'inspiration, ils n'hésitaient pas alors à emprunter d'autres musiques de compositeurs de leur époque, ou à réutiliser leurs propres oeuvres, qu'ils parodiaient en les adaptant aux besoins présents.

On comprend aisément que face à la sollicitation que Bach subissait à Leipzig, il ait eu recours à la réutilisation des oeuvres qu'il jugeait les meilleures. Réutilisation avec d'autres paroles, pour d'autres circonstances, mais toujours réadaptées pour coller parfaitement à la nouvelle utilisation qu'il décidait d'en faire.

C'est cet art de la parodie, de "l'adaptation heureuse" dans lequel Bach excellait, qui est présenté dans cette émission. Raphaël Pichon, chef de l'ensemble Pygmalion, évoque par exemple cet aria "Erbarm dich mein Gott" (Prends pitié Ô mon Dieu) de la Passion selon saint Matthieu, que Bach va reprendre pour l'ode funèbre qu'il compose à la mort de son ami le Prince Léopold. La musique reste la même, mais le texte devient "Erhalt mich mein Gott" (Préserve-moi, mon Dieu) et s'inscrit parfaitement dans cette Trauermusik.

Les exemples sont nombreux de réutilisations "heureuses" des pages les plus belles ou les plus émouvantes de Bach et surtout, cela nous renseigne sur les airs qu'il considérait comme les plus réussis, dignes d'être repris dans différentes oeuvres, son best of personnel !

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