Accueil
Être attaché au service public et défendre son pré carré, le paradoxe français ?
Partager

Être attaché au service public et défendre son pré carré, le paradoxe français ?

RCF,  -  Modifié le 17 juillet 2023
Émission Spéciale Journées Saint-François-de-Sales - Débat "À quoi tenons-nous vraiment ?"

La crise du Covid n'a fait que renforcer le rêve des Français : avoir un lieu à soi, un foyer refuge où fuir la pandémie, la crise écologique et l'insécurité. Mais alors qu'ils se replient sur leur pré carré, nos concitoyens tiennent énormément à leur "sacro-saint service public". État des lieux de notre société, de ses paradoxes et de nos consciences citoyennes à l'approche de l'élection présidentielle.

 "Les Français tiennent énormément à leur environnement de proximité, leur cocon protecteur", selon Jérôme Fourquet ©Corinne SIMON/CIRIC "Les Français tiennent énormément à leur environnement de proximité, leur cocon protecteur", selon Jérôme Fourquet ©Corinne SIMON/CIRIC

Le 24 janvier, c’est la fête de saint François de Sales, patron des journalistes : traditionnellement, autour de cette date que la Fédération des médias catholiques (FMC) réunit les journalistes de la presse catholique. À cause de la pandémie, l’événement a été reporté. C’est toutefois l’occasion d’organiser un débat sur le thème qui avait été choisi pour la rencontre : "À quoi tenons-nous vraiment ?"

À quoi tenons-nous vraiment pour bâtir le monde de demain ? Quelle est la hiérarchie des choses importantes pour les Français au sortir d’une crise qui les a affectés parfois durement ? Quels sont aussi nos projections et nos projets d’avenir ? Interroger les désirs c’est aussi regarder les peurs, dont on devine la trace dans certains discours politiques.

Un débat présenté par Philippine de Saint Pierre, directrice générale de KTO, animé par François Ernenwein, de La Croix, avec Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion à l’Ifop, auteur de "L’Archipel français" (éd. Seuil, 2019) et coauteur de "La France sous nos yeux" ; Jérôme Chapuis, directeur de la rédaction de La Croix ; Aymeric Christensen, directeur de la rédaction de La Vie.


 

Tant que le Covid masque la campagne...

À quoi tenons-nous vraiment ? C’est certainement la question que se posent tous les candidats à l’élection présidentielle, que l'on suppose désireux de faire écho dans leurs programmes aux attentes des Français. Mais alors que depuis plusieurs mois on parle de la "cinquième vague" de l’épidémie de Covid-19, difficile pour eux de se faire entendre. Jérôme Fourquet le constate, le virus "vient masquer la campagne électorale".

Malgré tout, virus ou pas, il faudra bien transpercer la "couche de défiance et de distance qui s’est installée" entre les Français et ses élites dirigeantes. Qu’est-il sorti des centaines de milliers de pages du "Grand débat national" demande Jérôme Fourquet ? "Ces dernières années, que ce soit dans la crise des "gilets jaunes" avec les cahiers de doléances, la Convention citoyenne sur le climat ou les états généraux de la bioéthique, il y a des mises en scène autour d’une écoute et d’une prise en compte de la parole des Français, et que derrière, ce n’est pas suivi d’effets", note Aymeric Christensen, qui ajoute : "C’est ressenti très très fortement."

 

Une maison avec jardin, le rêve Français

Que veulent les Français ? La question est d’autant plus cruciale que "l’on a de plus en plus de mal à trouver un horizon dans lequel on se projette", pour Aymeric Christensen. Mais ça c’est si on guette un grand élan collectif. Ce que veulent les Français, c’est, plus prosaïquement, "le modèle de la maison avec jardin", qui, précise Jérôme Fourquet, séduit 75 à 80% de nos concitoyens. "L’un de postes de dépenses qui a le plus augmenté ces dernières années, c’est l’équipement de la maison." Et cela montre à quel point "les Français tiennent énormément à leur environnement de proximité, leur cocon protecteur".

 

Le "sacro-saint service public"

Dans notre "civilisation du cocon", comme l’appelle l’essayiste Vincent Cocquebert, ce besoin de home sweet home est d’autant plus fort qu’au dehors c’est la crise écologique et l’insécurité. Paradoxalement, les Français ont beau se replier sur leur pré carré, ils ont de fortes attentes à l’égard de l’État. Avec le "quoi qu’il en coûte", il a semblé qu’en période de crise l’État recommençait à occuper une place déterminante pour que la société tienne.

Notre "sacro-saint service public" est ce à quoi nous tenons le plus après le refuge du foyer, pour Jérôme Fourquet. Est-on prêts pour autant à sacrifier l’intérêt personnel à l’intérêt général ? Cette question résume à elle seule tout le paradoxe d’une société tendue entre une individualisation croissant et une demande criante de protection. 

 

Conscience de citoyens et rêves de consommateurs

Il était fortement question de dignité sur les ronds-points occupés par les "gilets jaunes". Et aussi d'une demande de reconnaissance pour ces "travailleurs de la première ou de la deuxième ligne" relayés aux périphéries géographiques et professionnelles. Une soif de reconnaissance qui passe par le salaire, mais, comme le note Jérôme Fourquet, qui est "également plus globalement, une forme de reconnaissance de citoyens de plein exercice".

La reconnaissance passe aussi pour beaucoup par la consommation. "Beaucoup de Français, notamment ceux des ronds-points disaient : si à 40 ans tu ne peux pas acheter du Nutella ou des Nike à tes enfants alors tu n’es rien." Jusqu’où pèse cette injonction sur les individus, leur conscience de citoyens et leur liberté intérieure ? Comme le dit Jérôme Fourquet, il y a de quoi questionner les médias chrétiens.

 

Cet article vous a plu ?
partager le lien ...

©RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Émission Spéciale

RCF vit grâce à vos dons

RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation  de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !

  • Ce don ne me coûte que 0.00 € après déduction fiscale

  • 80

    Ce don ne me coûte que 27.20 € après déduction fiscale

  • 100

    Ce don ne me coûte que 34.00 € après déduction fiscale

Faire un don