Didier Cornaille "Les trois chats de Chamasson"
Trois chats plus ou moins sauvages ont élu domicile dans le fenil d'une ferme perdue au fond des bois. Ils y sont tranquilles jusqu'à l'arrivée de Sylvestre, la soixantaine bien engagée, qui vient se réfugier dans la maison familiale. Mais il y a l'agriculteur voisin qui lorgne sur ses terres et aussi une communauté de contestataires plus ou moins écolos, dont la belle Aurélie. Et il y a ce fils et ce petit-fils qu'il ne connaît pas encore. Aurélie et Agathe, une vieille complice, vont pousser Sylvestre à renouer les liens avec la vie.
Chronique de Jacques PLAINE publiée dans L’Essor
Didier Cornaille - Les Trois Chats de Chamasson - Presses de la Cité - 19 €
Observateur passionné du monde rural dont il est issu, Didier Cornaille lui a consacré sa carrière comme journaliste spécialisé puis comme romancier. Connu « comme le loup blanc » dans le Morvan, il l’est aussi à la Fête du Livre de Saint-Étienne.
Après s’être fait la main sur les barricades en 1968, Sylvestre a enchaîné les luttes. Du Larzac à Notre-Dame-des-Landes en passant par les centrales de Plogoff et du Cornet, la ferme des mille vaches et l’enfouissement des déchets nucléaires de Bure. Il était partout, à la tête de tous les conflits, remonté comme une pendule : « en matière de contestation, tu es notre père à tous ! » dira même Aurélie - l’écolo du village - qui question manifestations, rassemblements, forums de la contestation en tous genres, en connaît elle aussi un sacré rayon.
Et puis la soixantaine bien engagée - après avoir vécu toutes les misères, les injustices, les luttes vaines et les mesquineries les plus crasses - sans un sou en poche, usé par tant de causes perdues et largué par sa femme, il plie les gaules et rentre à la maison. Celle dont quarante ans plus tôt il a claqué la porte, pensant alors avoir mieux à faire qu’aider son père à retaper la vieille ferme dans laquelle il envisageait de poser ses rames d’instituteur.
Aujourd’hui ses parents sont morts. Les voisins, non. Un vieux couple de fermiers retraités, heureux de retrouver celui qu’ils ont connu jadis et de panser ses plaies à l’âme qu’ils découvrent abyssales. « Un illuminé », un simple illuminé estime pour sa part Eugène Ravalot. « Un dépendeur d’andouilles » qui ne sait plus ce qu’était la vraie campagne, celle des paysans à trois vaches et quatre chèvres, et qui ne jure que par celle de la biodiversité, des altermondialistes, et des écosystèmes.
Un homme blessé en tous cas, prêt à se laisser marcher sur le ventre par ce primate de Ravalot, le roi de la coupe à blanc et du sapin de Noël à prix d’usine. Un froid businessman des champs, des bois et des pâtures qui trouvera sur sa route Aurélie. Aurélie, « la rouquine au camion pourri » qui ne veut pas que Sylvestre, « le père de toutes les contestations » se couche aux pieds de cette ordure de Ravalot.
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