Producteur de cinéma et réalisateur, Alain Jaspard a signé plusieurs adaptations de séries animées, notamment Tom-Tom et Nana et Les contes de la rue Broca. « Les Bleus étaient verts » est son deuxième roman. Le premier, « Pleurer des rivières » a obtenu le prix Dubreuil du premier roman SGDL 2018 et le prix des lecteurs de Notre Temps 2019.
Alain Jaspard - Les Bleus étaient verts - Editions Héloïse d'Ormesson - 17 €
Saint-Etienne, juste avant les « Evénements d'Algérie », Guy Mollet « le Quadrillage », le plan Challe et le FLN. Un soir le petit Max, quatorze ans, programmé mineur de fond - comme moi libraire - déclare à ses parents que la mine n'est pas son truc. Sa mère fond en larmes, son père piqueur au puits Pigeot « tombe de l'armoire », fait une grosse colère, claque la porte…et va finir sa partie de boules à l'amicale laïque de La Ric.
En 1961 Max a vingt ans et comme les copains part sous les drapeaux. C'est la guerre dans les Aurès ou plus exactement « les opérations de maintien de l'ordre » partout en Algérie : Marseille, la Joliette, la Ville d'Oran, Alger la Blanche, un GMC pourri et le voilà à Cherchell. Cinq ans plus tôt, rappelé, j'avais fait le même parcours, Marseille, la Joliette, la Ville d'Oran… plus vingt-cinq kilomètres : Gouraya tout le monde descend. Avec comme lui un passé dans les chasseurs alpins mais en ce temps-là, le cessez-le-feu n'était pas encore en ligne de mire.
« Les Bleus étaient verts » une parenthèse d'histoire qui avec la Ville d'Oran m'a embarqué sans parachute dans un passé endormi. Etonné et pas mécontent de revivre dans les pas de Max des souvenirs engourdis. Merci Alain Jaspard de cette piqure de rappel badigeonnée d'humour car dans les pires moments on rigole encore dans les chambrées : le crapahut dans les djebels, le soleil qui cogne, les oueds à sec, les défilés où l'on s'accroche au PM, les MAS 36 qui tirent tout seuls, les lits Picots qui réclament la retraite, les 33 Export et les Orangina qui attendent preneur dans les bacs à glace et le Paul Robert à 14 degrés. Sans parler des sujets qui fâchent, la gégène ou les copains les couilles dans la bouche.
Mais Max c'est aussi un petit gars au zob d'artichaut qui vit une sexualité de l'instant avec une préférence appuyée pour une micro-Berbère de quinze ans. Un petit gars qui a un copain, un vrai, Ali. Ali qui prendra un autre chemin. Son chemin. Et puisqu'on est chez les Verts disons que ce chemin c'est celui d'un autre de par ici, Rachid. Rachid de Sétif un footeux qui dribblait comme pas deux. Ou comme un Dieu, c'est selon.
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