Apprendre à consoler et à être consolé avec Christophe André
Peut-on apprendre à consoler ou à être consolé ? Pourquoi est-ce parfois si difficile d'accepter la consolation, et si délicat de la proposer ? Le psychiatre Christophe André est aujourd'hui l’un des meilleurs spécialistes français de la psychologie des émotions. Ancien praticien de l’hôpital Sainte-Anne à Paris, devenu en quelques années l’un des plus célèbres vulgarisateurs de la méditation, il vient de publier "Consolations, celles que l'on reçoit et celles que l'on donne" (éd. L'Iconoclaste). S’appuyant sur ses expériences personnelles à la fois de malade et de médecin, il nous invite à réfléchir sur la consolation, cette relation si fondamentale entre les êtres humains.
Le rôle du soignant n'est pas seulement de guérir mais aussi de consoler
"Il a fallu que je tombe malade moi-même pour m'apercevoir que, comme tous les soignants, j'avais beaucoup consolé" se souvient le médecin psychiatre Christophe André. Son nouveau livre porte sur la consolation. Une thématique dont il a pris conscience assez tardivement en luttant lui-même contre la maladie. Il en explique les ressorts dans "Consolations, celles que l'on reçoit et celle que l'on donne" publié aux éditions de l'Iconoclaste.
En sortant d'un schéma de guérison médical traditionnel, Christophe André a pu comprendre l'importance de la consolation. "Les médecins veulent obtenir des résultats minimaux, même si on ne prétend pas tout guérir, on veut quand même que les choses soient nettement améliorées pour nos patients. Alors qu'en réalité, la consolation, elle est presque à l'inverse de ça ou disons que c'est le complément de cette logique. La consolation, c'est tout ce qu'on peut offrir à quelqu'un lorsqu'on ne peut pas transformer sa situation".
La consolation, c'est tout ce qu'on peut offrir à quelqu'un lorsqu'on ne peut pas transformer sa situation.
En 2015, Christophe André lutte contre un cancer des poumons. En prenant lui-même la place de ses patients, il réalise l'importance des gestes de consolation. "J'ai compris au travers des mille et un moment de la vie de patient que j'avais besoin de consolation. [...] On est dans une vulnérabilité absolue et là on perçoit, on reçoit le moindre geste de consolation, le moindre sourire. Ce sont des trucs tout-petits" explique-t-il.
Pour accepter d'être consolé, il faut accepter d'être blessé
"La vie humaine c'est souffrir, vieillir, mourir" rappelle Christophe André. Cette lecture de la vie peut sembler assez pessimiste pourtant pour le médecin c'est un moyen de ne pas prendre "ces histoires de consolations, de bonheur à la légère."
Certaines blessures sont-elles inconsolables ?
Pour Christophe André, il est évident que certaines blessures laissent les gens inconsolables pour un temps ou pour une vie. Il prend l'exemple de parents ayant perdu un enfant. "Pratiquement tous les parents endeuillés disent qu'une part d'entre eux est morte avec leur enfant" constate le médecin psychiatre. Certaines blessures sont inconsolables mais elles n'engagent qu'une partie de nous. "L'enjeu avec la consolation ce n'est pas qu'on veut tout réparer, tout solutionner, qu'on veut effacer la tristesse, qu'on veut consoler tout le monde à 100%. L'enjeu c'est que cette part d'inconsolabilité ne reste qu'une part, que ce ne soit pas l'intégralité de la vie de cette personne qui soit marquée par ce côté inconsolable" analyse-t-il.
L'enjeu c'est que cette part d'inconsolabilité ne reste qu'une part, que ce ne soit pas l'intégralité de la vie de cette personne qui soit marquée par ce côté inconsolable.
Malgré les certaines blessures qui sont difficilement consolables, Christophe André est persuadé d'une chose : la vie nous répare. Cela commence avec notre entourage qui, dans la désolation, est une vraie source d'attention et de présence. Ensuite, la personne, fortifiée par l'affection de ses proches va pouvoir s'engager dans "les autos-consolations" c'est à dire "accepter de s'ouvrir à tout ce que la vie a de beau et de bon, la nature, les animaux, les rires des enfants ... tout ce qui va à la fois écarter notre attention de la souffrance, il ne s'agit pas de supprimer cette souffrance, de l'oublier totalement mais se dire "j'ai cette blessure je ne cherche pas à la faire disparaitre mais je ne veux pas qu'il y ait que ça".
C'est un chemin de résilience long et laborieux que d'accepter d'abord sa souffrance puis d'être consolé. Il ne faut pas précipiter les choses ou essayer à tout prix de consoler selon Christophe André. "On a juste à redonner un tout petit peu le goût de la vie, l'espoir dans le fait de faire des choses simples" explique le médecin pour qui la chose la plus importante pour celui qui console est d'être plutôt que de faire.
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