Vers une rencontre Trump–Poutine à Budapest : Zelensky prêt à s’inviter à la table
Un sommet très attendu pourrait bientôt avoir lieu à Budapest. Une rencontre entre Donald Trump et Vladimir Poutine. La date n’est pas encore connue ni confirmée, mais Volodymyr Zelensky a déjà indiqué être prêt à se joindre à ce sommet s’il recevait une invitation. Au cœur de cette rencontre, évidemment, l’avenir du conflit russo-ukrainien. « Il y a beaucoup de travail de fond à faire », a déclaré le porte-parole du Kremlin lundi 20 octobre, quelques jours après une nouvelle rencontre tendue entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump. Décryptage avec Cyrille Bret, expert à l’Institut Montaigne.
15 août 2025, Anchorage (Alaska), États-Unis : le président américain Donald Trump (à droite) accompagne le président russe Vladimir Poutine (à gauche) sur le tapis rouge lors de la cérémonie d’accueil à la base militaire conjointe Elmendorf-Richardson, à Anchorage, en Alaska. Trump reçoit Poutine pour des discussions visant à mettre fin à la guerre menée par la Russie en Ukraine © Benjamin Applebaum/ ABACALes discussions entre Donald Trump et Vladimir Poutine pourraient porter sur un gel des lignes de front et d’éventuelles concessions territoriales.
Occuper l’espace médiatique et diplomatique
Le chef de l’État américain n’a cessé de changer de position face au conflit russo-ukrainien depuis sa prise de fonction en janvier 2025. Tour à tour, il exerce une pression ou des menaces sur Vladimir Poutine ou Volodymyr Zelensky. Selon Cyrille Bret, Donald Trump poursuit avant tout l’intérêt de court terme de sa présidence, qui est d’apparaître comme celui qui aura « débarrassé les Américains du fardeau », faisant référence ici à la guerre sur le sol ukrainien. « C’est surtout une façon d’occuper les écrans et de dicter son rythme et ses humeurs à la scène internationale », conclut l’expert de l’Institut Montaigne.
C’est surtout une façon d’occuper les écrans et de dicter son rythme et ses humeurs à la scène internationale.
Ces négociations se trouvent néanmoins très loin de celles qui seraient nécessaires pour établir la paix. La conclusion d’une paix, après trois ans de guerre et près de quinze ans de tensions, nécessite un travail de fond extrêmement long. Les négociations devront aborder les questions d’alliances, de militarisation de l’Ukraine, le sort des populations civiles ukrainiennes qui se trouvent en territoire occupé par la Russie, ainsi que les questions économiques, avec notamment celle des avoirs russes et des enjeux énergétiques. « Donc, ça ne se règle pas en un tweet, et Donald Trump n’est pas un ami du long terme », déplore Cyrille Bret.
L’Europe doit s’imposer au cœur des négociations
Le risque encouru par l’Ukraine, avec l’exercice d’une pression constante par Donald Trump, est d’amener le président ukrainien à faire des concessions qu’il ne veut pas faire et qu’il ne peut pas faire, au risque de ne plus être suivi par la population ukrainienne. « Donald Trump est mû, à l’égard de la Russie, par une complaisance qui risque d’amener l’Ukraine à renoncer à ses prétentions territoriales, juridiques et économiques. » C’est pour cette raison que Cyrille Bret souligne le rôle crucial des Européens : qu’ils s’invitent à la table des négociations pour rappeler le droit international.
Donald Trump est mû, à l’égard de la Russie, par une complaisance qui risque d’amener l’Ukraine à renoncer à ses prétentions territoriales, juridiques et économiques.
Les gouvernements européens se trouvent dans l’antichambre des négociations, décrit l’expert à l’Institut Montaigne. « C’est la tactique délibérée de Donald Trump de saturer l’espace pour rendre les Européens invisibles, inaudibles, inefficaces, et ensuite les blâmer pour ce motif-là. » Or, depuis juin, selon l’Institut allemand de Kiel, l’Europe a fourni environ 95 milliards de dollars d’aide militaire à Kiev, contre 75 milliards pour Washington. Ils sont non seulement les premiers fournisseurs de matériel de guerre à l’Ukraine, mais également engagés dans une stratégie de long terme de sanctions contre la Russie et la Biélorussie, contrairement aux États-Unis, dont les annonces ne sont pas suivies d’actes.
Anticiper l’après-guerre
« Donald Trump est là encore pour trois ans. Il peut profondément nuire aux intérêts européens en Ukraine en obtenant de la part du gouvernement ukrainien des concessions exorbitantes par rapport au rôle qu’il joue au service de l’intégrité territoriale ukrainienne », prévient Cyrille Bret. Ce que les Américains ont fait en Irak, c’est-à-dire préempter absolument tous les contrats publics de reconstruction des infrastructures, des réseaux d’eau, de télécommunications ou de normes, tout simplement. C’est-à-dire que si l’Ukraine est reconstruite selon les normes techniques des États-Unis, les entreprises américaines auront un avantage comparatif conséquent lorsqu’il s’agira de reconstruire le pays. Selon l’expert, le risque serait que les Européens payent le budget de l’État ukrainien pour engager des entreprises américaines.


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