Un prêtre alsacien se retrouve à l’ambassade de France à Rome
Habitué à organiser des pèlerinages à travers le monde, le père Alain Moster, curé de Strasbourg, vient d'être nommé conseiller à l'ambassade de France près-le Saint-Siège.
©RCF AlsaceDans l'Église catholique, les profils de curés, hommes de terrain, tendent à occuper de plus en plus des postes à responsabilité. La nomination du père Alain Moster à la fonction de conseiller auprès de l'ambassadeur de France au Saint-Siège à Rome confirme cette tendance. Ce dernier affirme d’ailleurs avoir été surpris par la demande du Conseil permanent des évêques de France. “En principe, lorsqu'on change de mission, on reste dans son diocèse, explique-t-il. Moi, je suis prêtre diocésain, j'ai été ordonné à Strasbourg et ma mission doit rester normalement dans les deux départements du Rhin.”
Qu’est-ce qu’un conseiller ecclésiastique ?
L'ambassade de France près le Saint-Siège, représente la France au Vatican. Ses occupants sont bel et bien des postes diplomatiques. En plus de l’ambassadeur, elle compte deux conseillers : un conseiller culturel, généralement laïc, et un conseiller ecclésiastique, tous deux nommés par la Conférence des évêques de France et le Quai d’Orsay. La République française ne reconnaît ni ne salarie aucun culte. Il existe néanmoins, dans le réseau diplomatique français, deux postes en principe réservés à des prêtres : un poste à Rome, à l'ambassade de France près le Saint-Siège, et un poste à Jérusalem, le Consulat général de France à Jérusalem. Il est chargé de rédiger des enquêtes qu'il doit remettre à la fois aux responsables de l'Église catholique et aux responsables du gouvernement français. Il lui faudra aussi lire, travailler et décrypter les textes publiés par le pape pour l’équipe de l’ambassade.
Pourquoi des prêtres ? Le prêtre est censé apporter des éléments de compréhension au représentant de la République française dans ces contextes dans lesquels les religions tiennent une place essentielle pour la culture, la vie politique et les relations sociales. “Le conseiller ecclésiastique est d'abord prêtre et on lui demande d'être prêtre, explique le père Moster. Il n'organise pas de messes même si cela peut se faire pour le personnel de l'ambassade de temps en temps. Il y a d’ailleurs une chapelle à l'ambassade, petite, mais très belle. Mais ce n’est clairement pas une mission d'aumônerie, c'est une mission de nature politique ecclésiastique. Il s'agit de conseiller l'équipe en apportant l'éclairage d'un prêtre, qui a été en paroisse, qui connaît les réalités du terrain, mais qui comprend aussi les grands enjeux pour l'Église aujourd'hui et demain.”
Ce n’est clairement pas une mission d'aumônerie, c'est une mission de nature politique ecclésiastique.
Toujours plus de pasteurs diplomates
Le Conseil permanent des évêques de France a proposé son nom pour être conseiller ecclésiastique de l'ambassade de France auprès du Saint-Siège, charge qu’il occupera à compter du 1er septembre. Si lors de leur rencontre au printemps dernier, il explique au secrétaire général de la Conférence des évêques de France “être d'abord et avant tout un curé de paroisse et non pas conseiller ecclésiastique”, il est étonné de s’entendre répondre : “c'est justement ce genre de profil que nous cherchons un profil pastoral, quelqu'un qui a été sur le terrain.”
Pendant des décennies, le poste de conseiller auprès de l'ambassade de France s'appelait précisément “Consulteur canonique”, tenu par un spécialiste du droit des relations Eglises-Etat dans le droit canonique. “Ça fait maintenant un certain nombre d'années que le prêtre qui occupe ce poste s'appelle conseiller ecclésiastique. Rien que le changement de nom dit quelque chose d'un changement de mission et de profil, analyse le père Moster. Il succède ainsi au père Bernard Planche, en fonction depuis 5 ans. Ce dernier retournera dans le diocèse du Puy-en-Velay dont il est originaire et dont il était auparavant délégué épiscopal à l'information et à la vie consacrée. Un changement qui montre le souci de la conférence épiscopale, mais aussi du Quai d'Orsay, qui finalement nomme l'intéressé, d'avoir des gens qui viennent "de la base du terrain" et qui le connaissent.
De l’Alsace à Rome
Pour autant, ce type de poste diplomatique ne lui est pas totalement étranger. Directeur du service des pèlerinages du diocèse de Strasbourg pendant de longues années, le père Alain a l’habitude des voyages. Cet ancien étudiant passé par Science Po a également habité trois ans à Jérusalem, quatre ans à Rome.
“Ce que j’aime, ce n'est pas nécessairement voyager, mais proposer des destinations intéressantes, partir à la rencontre de communautés chrétiennes à droite et à gauche, raconte-t-il avec enthousiasme. Parmi les grands pèlerinages que j'ai pu faire, il y avait des pèlerinages très classiques en Terre Sainte en particulier, mais aussi des pèlerinages qu'on appelle “visitation”. On a été en Géorgie, en Arménie, en Iran pour rencontrer les communautés chrétiennes. Je pense que cet intérêt pour l'international et pour les églises a joué dans le fait que j'ai été sollicité pour ce poste.”

Les Alsaciens, des habitués de l’ambassade ?
Parmi les occupants du fameux poste, on compte une série de conseillers alsaciens au XXᵉ siècle. Celui qui a fermé l'ambassade au moment de la séparation de l'Église et de l'État en 1902, et donc de la fin des relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège, était un prêtre du Sundgau. Connu pour sa charge de député Reichstag pendant 16 ans, le prêtre mulhousien Émile Wetterlé réouvre la mission romaine quelques années plus tard. Dans les années 1980, assomptionniste bas-rhinois Antoine Wegner, spécialiste des relations entre Rome et Moscou, occupe la fonction.
Amateur d’histoire, le père Alain Moster s’est particulièrement penché sur cette dernière figure. “Il était clairement prêtre et d'abord prêtre, mais avait le souci d'un éclairage pour toutes les problématiques politiques et ecclésiastiques au sens large, et avait aussi un certain souci de la mission.”


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