Accueil
Tentative de suicide : une adolescente hospitalisée tous les deux jours en Vendée

Tentative de suicide : une adolescente hospitalisée tous les deux jours en Vendée

Un article rédigé par Paul Boyer - RCF Vendée, le 10 septembre 2025 - Modifié le 10 septembre 2025
Ils font l'actu en Vendée Les 12-17 ans et les 45-49 ans touchés par le suicide en Vendée

Ce 10 septembre marque la Journée mondiale de prévention du suicide. Lancé en 2003, le thème choisi pour 2025 est « Changer le discours ». Alors que l’on parle de plus en plus de santé mentale, la parole reste difficile sur le sujet du suicide dont la situation est pourtant préoccupante. Dominique Bader, formateur en premier secours en santé mentale, revient sur l’état des lieux en Vendée, et sur les solutions mises en place pour prévenir le risque de suicide, et accompagner les personnes concernées.

Numéro de prévention du suicide : 3114Numéro de prévention du suicide : 3114

Ce qu'il faut retenir :

  • "Un jour sur deux, une jeune fille de 12 à 17 ans est hospitalisée en Vendée après une tentative de suicide."

Comment se situe notre département en matière de tentatives de suicide et de suicides, par rapport au reste de la France et de la région ?

On dispose de statistiques que je trouve inquiétantes pour la Vendée. Les Pays de la Loire sont la troisième région de France où l’on compte le plus de décès par suicide. Cela signifie que, pour la Vendée, en 2023, 161 jeunes filles âgées de 12 à 17 ans ont été hospitalisées, soit plus du double par rapport à 2019. Autrement dit, un jour sur deux, une jeune fille de 12 à 17 ans est hospitalisée en Vendée après une tentative de suicide.

Ce sont principalement ces adolescentes qui sont à risque ?

Non. On observe également un pic chez les femmes et les hommes âgés de 45 à 49 ans.

Qu’est-ce qui peut nous alerter ? On entend souvent les proches dire : « si je l'avais su… je ne l'avais pas vu venir ». Certaines familles sont complètement sous le choc et n’avaient rien remarqué – je pense notamment à des témoignages de familles d’agriculteurs recueillis ici sur RCF.

Je pense qu’il faut être vigilant dès qu’une personne parle de suicide, de se tuer, écrit autour de la mort, manifeste un grand désespoir, exprime de la colère ou se sent piégée, comme s’il n’y avait aucune issue. Ce sont des signaux à prendre au sérieux. Mais cela nous touche très fort de sentir un proche qui parle de ces choses-là. On est parfois mal à l’aise pour en parler ou pour rebondir, pourtant ce sont tous ces signes : une augmentation de la consommation d’alcool, le fait que la personne s’éloigne de ses amis, qu’elle ne trouve plus de raison de vivre ou de but. Ce ne sont pas forcément des personnes qui vont passer à l’acte, mais il peut y avoir des idées suicidaires. Il faut distinguer les idées suicidaires des tentatives de suicide. Les idées suicidaires peuvent disparaître, et c’est important de pouvoir le dire aux personnes concernées. Parfois, cependant, elles peuvent mener à une tentative. 

Il est également essentiel, lorsqu’on remarque que quelque chose ne va pas, d’apprendre — comme dans nos formations — à poser une question simple, en se préparant bien à la poser : « Est-ce que tu as des idées suicidaires ? » Aussi simplement que cela. Cette question permet de réduire l’anxiété de la personne, de lui offrir un espace où elle peut s’exprimer, car c’est forcément quelque chose de honteux. Une étude menée auprès de personnes ayant fait des tentatives de suicide a révélé qu’elles avaient bien émis des signes d’alerte, mais que, dans leur entourage, ces signes n’avaient pas été entendus, du fait du tabou autour du sujet. Il faut donc vraiment prendre cela au sérieux, ne pas minimiser ni dire : « Mais quand même, tu as tout ce qu’il faut pour vivre. » Il ne faut pas chercher à rationaliser, mais vraiment écouter ce que la personne vit, même si cela nous dérange profondément. C’est pour cela que les formations aux premiers secours en santé mentale ont été développées : pour apprendre à poser ce type de questions et à engager la conversation avec la personne.

Vous allez proposer ces formations, Dominique Bader, les 5 et 6 novembre à Montaigu. À qui s’adressent-elles ? Parce que, autant la formation aux premiers secours pour apprendre à faire un massage cardiaque ou un garrot me semble accessible, autant je peux craindre de me demander si une formation aux premiers secours en santé mentale est vraiment utile.

C’est essentiel. Ces formations sont ouvertes à toutes les personnes de plus de 18 ans qui s’intéressent à ces sujets et souhaitent aider leur entourage — qu’il s’agisse d’amis, de collègues ou de membres de la famille. C’est cette motivation qui est primordiale. C’est une formation que l’on qualifie de « citoyenne », c’est-à-dire ouverte à tous les citoyens. Elle aborde de manière générale les troubles psychiques : que faut-il dire ? Que ne faut-il pas dire ? Comment approcher les personnes en souffrance ? Après la formation, on se sent mieux armé, et les participants rapportent souvent se sentir plus légitimes.

L’autre jour, lors d’une formation, une stagiaire m’a dit : « Je ne vais pas pouvoir aider tous ceux qui vont mal autour de moi avec cette méthode. » Mais elle a ajouté : « Je vais choisir une personne et l’accompagner correctement. » Car l’idée de cette formation est d’apporter un soutien jusqu’à ce qu’un relais professionnel puisse prendre le relais.

Nous avons évoqué la question : « Est-ce que tu as des idées suicidaires ? », que nous, proches, devons être capables de poser. Vous avez aussi parlé du relais assuré par les professionnels. Cela peut être compliqué, quand on se sent mal ou en détresse, de se dire qu’il faut aller consulter quelqu’un. Vous mentionniez tout à l’heure la honte ; est-ce que ce tabou persiste encore ?

Oui, tout à fait. Cette honte est très forte, et c’est une des raisons pour lesquelles les personnes ont du mal à en parler. C’est pourquoi il est important d’être de plus en plus nombreux à pouvoir échanger librement et simplement sur ces sujets difficiles. Il y a aujourd’hui environ 220 000 secouristes en santé mentale en France. En posant cette question, la personne peut, d’une certaine manière, repousser ses idées suicidaires — au moins temporairement. Cela ne les fait pas disparaître, bien sûr, mais cela lui permet de trouver quelqu’un à qui en parler, si une telle personne est présente.

Il existe aussi un numéro gratuit et national, le 3114, ouvert 24h/24 et 7j/7. Il est destiné aux personnes ayant des idées suicidaires, mais pas seulement : il s’adresse aussi à celles qui côtoient des personnes en souffrance et ne savent pas quoi dire, à celles qui ont été touchées par un suicide, ainsi qu’aux professionnels confrontés à ce type de situation.

Merci beaucoup, Dominique Bader, d’avoir été avec nous. Je rappelle que vous animerez une formation aux premiers secours en santé mentale les 5 et 6 novembre à Montaigu. Ces formations citoyennes concernent déjà plus de 220 000 personnes formées en France, et il est nécessaire de continuer à les développer.

 

@RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Ils font l'actu en Vendée
@RCF
Découvrir cette émission
Cet article vous a plu ? Partagez-le :

Pour aller plus loin

Suivez l’actualité nationale et régionale chaque jour

Votre Radio vit grâce à vos dons

Nous sommes un média associatif et professionnel.
Pour préserver la qualité de nos programmes et notre indépendance, nous comptons sur la mobilisation  de tous nos auditeurs. Vous aussi participez à son financement !

Faire un don
Qui sommes-nous ?

RCF est créée en 1982, à l'initiative de l'archevêque de Lyon, Monseigneur Decourtray, et du Père Emmanuel Payen. Dès l'origine, RCF porte l'ambition de diffuser un message d'espérance et de proposer au plus grand nombre une lecture chrétienne de la société et de l'actualité.

Forte de 600.000 auditeurs chaque jour, RCF compte désormais 64 radios locales et 270 fréquences en France et en Belgique. Ces 64 radios associatives reconnues d'intérêt général vivent essentiellement des dons de leurs auditeurs.

Information, culture, spiritualité, vie quotidienne : RCF propose un programme grand public, généraliste, de proximité.Le réseau RCF compte 300 salariés et 3.000 bénévoles.