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Synode : des propos improvisés du pape François créent la surprise

Synode : des propos improvisés du pape François créent la surprise

Un article rédigé par Pauline de Torsiac, Étienne Pépin, Odile Riffaud - RCF, le 27 octobre 2023  -  Modifié le 30 octobre 2023

 

Ce mercredi, le Vatican a publié la retranscription en espagnol de propos improvisés du pape François. Le souverain pontife s'exprimait devant les participants au synode sur l'avenir de l'Église.  Une prise de parole virulente qui a créé la surprise, voire suscité la polémique. Explications.

 

Ce mercredi 25 octobre dans l’après-midi, peu de temps après la publication de la "Lettre au peuple de Dieu", un texte du pape François a été diffusé, créant la surprise (Photo : le 6/10/2023, Vatican ©Vatican Media) Ce mercredi 25 octobre dans l’après-midi, peu de temps après la publication de la "Lettre au peuple de Dieu", un texte du pape François a été diffusé, créant la surprise (Photo : le 6/10/2023, Vatican ©Vatican Media)

 

C’est la dernière ligne droite pour les 354 pères et mères synodaux. Les participants à la première session sur l’avenir de l’Église s’apprêtent à voter ce samedi le document final, la synthèse de leurs discussions sur la gouvernance de l’Église, la place des laïcs ou le statut des femmes. Jusqu'à présent, il était difficile pour les journalistes de sentir la teneur des échanges. Le Vatican a toutefois publié des textes au cours de ces quatre semaines : parmi eux, la retranscription d'une prise de parole improvisée du pape François, qui a créé la surprise.

 

Synode : la communication du Vatican étonne

Il y a d’abord eu un "jeûne médiatique" qui a surpris les journalistes. Après le déchaînement médiatique à la rentrée, rien n’a filtré des échanges à huis-clos salle Paul-VI au Vatican. "Pour nous ça a été un synode compliqué à couvrir", admet Jean-Charles Putzolu, rédacteur en chef de la rédaction francophone de Vatican News.

Au cours des quatre semaines qui viennent de s’écouler, il y a eu toutefois des briefings à la presse. Briefings au cours desquels "on est resté en superficie du synode", regrette Jean-Charles Putzolu. Ce que, de son côté, Jean-Marie Guénois, du Figaro, résume par une "forme d’improvisation" avec "peu d’informations ou des informations parcellaires" et "pas mal de confusion"...

 

 

→ À LIRE : "Le synode du silence"

 

 

Le 15 octobre, en plein synode, le pape François a publié son exhortation apostolique "C'est la confiance". Un texte dans lequel il encourage les fidèles à redécouvrir la spiritualité de sainte Thérèse de Lisieux, et dont il souligne le "grand amour" de la sainte pour l'institution ecclésiale.

Et enfin, ce mercredi 25 octobre, les pères et mères synodaux ont publié leur "Lettre au peuple de Dieu". "Beaucoup de journalistes ont dit : Tout ça pour ça !" rapporte Cyprien Viet, de l’agence iMédia à Rome. Et puis un texte du pape François a surgi, très peu de temps après cette Lettre… créant la surprise et suscitant la polémique.

 

Une prise de parole improvisée crée la surprise

Ce mercredi 25 octobre dans l’après-midi, peu de temps après la publication de la "Lettre au peuple de Dieu", un texte du pape François a été diffusé, créant la surprise. Ces propos improvisés, que le pape a tenus en espagnol devant les participants et experts au synode ont été retranscrits et publiés (dans la langue originale) sur le site du Vatican.

Pourquoi ce texte a-t-il fait polémique ? Il a été perçu comme une invective de la part du pape aux délégués synodaux, comme s’il venait contrarier le message que ceux-ci venaient d’envoyer. Et puis parce que le pape a eu l’air de s’en prendre aux prêtres.

 

"Ou bien l'Église est le peuple fidèle de Dieu sur le chemin, saint et pécheur, ou bien elle finit par être une entreprise de services variés. Et quand les agents pastoraux empruntent cette deuxième voie, l'Église devient le supermarché du salut et les prêtres deviennent de simples employés d'une multinationale. Voilà la grande défaite à laquelle nous conduit le cléricalisme. Et c'est bien triste et scandaleux (il suffit d'aller dans les ateliers de tailleurs ecclésiastiques à Rome pour voir le scandale de ces jeunes prêtres essayant des soutanes et des chapeaux ou des aubes et des robes en dentelle)."
Pape François, le 25 octobre 2023*

 

Des propos forts contre le cléricalisme

En réalité, c’est au cléricalisme que le pape s’en prend, dans le contexte du synode sur l’avenir de l’Église. "Le cléricalisme est un fouet, un fléau, dit-il, une forme de mondanité qui souille et abîme le visage de l'épouse du Seigneur ; il asservit le peuple saint et fidèle de Dieu. Et le peuple de Dieu, le peuple saint et fidèle de Dieu, continue avec patience et humilité, supportant le mépris, la maltraitance et la marginalisation du cléricalisme institutionnalisé."*

Entendre le pape critiquer le cléricalisme, cela ne devrait pourtant pas nous étonner. "Pour ceux qui traitent le pape du lundi au vendredi, 365 jours par an, François nous a largement habitués à ses discours qui peuvent parfois choquer", rappelle Jean-Charles Putzolu. Le rédacteur en chef à Vatican News rappelle que "le cléricalisme et la mondanité, c’est quelque chose qu’il ne supporte pas chez les prêtres et il ne manque jamais une occasion pour le dire avec des mots forts".

C’est sans doute la tonalité des propos qui heurte tout spécialement. Et si le pape évoque le cléricalisme au cours du synode, c’est parce que pour lui, "un prêtre mondain ou ce cléricalisme va à l’encontre de l’esprit synodal, selon Jean-Charles Putzolu. On est précisément en face de gens qui ne sont pas disponibles à l’écoute et c’est précisément ce qui met François hors de lui."

 

Le "paradoxe" du pape François

Ce texte vient en quelque sorte pointer du doigt "le paradoxe perpétuel et éternel du pape François", comme le résume Cyprien Viet. C’est-à-dire à la fois une volonté affirmée de conversation et à la fois une autorité verticale. "Il prône la synodalité mais lui-même est autoritaire", admet le journaliste de iMédia.

"Un pape qui tranche, ça peut faire du bien à l’Église qui parfois ronronne un peu", reconnaît Jean-Marie Guénois. Pour le rédacteur en chef au Figaro, ce qui transparaît dans ce texte et qui "inquiète" le vaticaniste qu’il est, "c’est la stigmatisation d’une catégorie un peu virtuelle – parce que moi j’aimerais bien connaître des prêtres mondains qui achètent des dentelles et des soutanes pour avoir une sorte d’image du prêtre… Il y a des styles et des sensibilités différentes dans l’Église et c’est bien ça la question. François appelle à la conversion de l’Église… pour que chacun y ait sa place. Tout le monde fait partie de l’Église."

Des remarques sur les prêtres qui interviennent alors qu’un certain nombre d’entre eux, comme aime le rappeler Cyprien Viet, "se sont sentis déstabilisés par les réunions synodales vécues comme un procès contre l’autorité du prêtre". Sur ce point, des réajustements devraient être mis en place d’ici la session d’octobre 2024.

 

 

*Merci à nos confrères de Radio Notre-Dame pour la traduction en français

 

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©Communication du Vatican
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Synode : réinventer l'Église catholique ?

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