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La défense européenne fragilisée par Trump et Poutine

La défense européenne fragilisée par Trump et Poutine

RCF, le 6 mars 2025 - Modifié le 6 mars 2025
L'Invité de la MatinalePrise de parole d'Emmanuel Macron : l'analyse de Bruno Tertrais

Mercredi 5 mars, Emmanuel Macron s'est adressé aux Français à 20h."La patrie a besoin de vous", a-t-il affirmé avec gravité, revenant sur la situation internationale. La volte face des Etats Unis, et le rapprochement inédit entre Donald Trump et Vladimir Poutine forcent l'Europe à réagir. Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique "Prise de parole", nouvelle édition de "La Guerre des mondes" (Alpha 2025) analyse la situation au micro de Pierre-Hugues Dubois. 

Bruno Tertrais © DR Bruno Tertrais © DR

"La patrie a besoin de vous" . C'est par cette formule choc qu'Emmanuel Macron s'est adressé aux Français. A quoi sert d'utiliser un vocabulaire martial ? "Pour essayer de persuader l'opinion du caractère sérieux, du caractère grave, de l'atmosphère dans laquelle nous sommes désormais", souligne Bruno Tertrais.

Le déclenchement d'une guerre idéologique 

"Vladimir Poutine a non seulement déclenché une guerre frontale avec l'Ukraine, mais il a également provoqué une guerre idéologique avec le reste des pays européens, ce qui est déjà le cas depuis une quinzaine d'années", explique Bruno Tertrais. 

Se présenter comme le dernier bastion de soi-disant valeurs conservatrices occidentales, des vraies valeurs européennes.

"La Russie de Vladimir Poutine a cherché à se présenter, et c'est une mascarade complète à mon sens, comme le dernier bastion de soi-disant valeurs conservatrices occidentales, des vraies valeurs européennes. C'est le discours du Kremlin, y compris au sens religieux, d'ailleurs.", détaille le géopolitogue. 

Mesurer le PIB et le budget de la défense, ça ne suffit pas à décrire la réalité de la menace. 

La Russie représente une menace pour l'Europe. Mais sur le plan économique, son PIB est largement inférieur à celui des 27. En 2023, Moscou affichait 2 milliards de dollars, contre plus de 27 pour les européens. "Je prends l'exemple des cyberattaques, qui sont constantes maintenant. Elles ne coûtent vraiment rien. Donc, mesurer le PIB et le budget de la défense, ça ne suffit pas à décrire la réalité de la menace", souligne le spécialiste. "C'est pareil pour la guerre d'influence sur les réseaux sociaux : ça ne coûte vraiment pas cher de la faire, tout simplement", poursuit-il. La Russie est suspectée d'ingérence dans certaines élections européennes, et de propager certaines fausses nouvelles sur le Vieux Continent.  

Une relation d'adversaire entre les Etats-Unis et l'Europe

"Les Etats-Unis et l'Europe ont toujours été concurrents", affirme Bruno Tertrais que ça soit sur le plan industriel, sur le plan de l'aéronautique ou de l'armement. 

Donald Trump a l'ambition, d'avoir le prix Nobel de la paix.

Depuis son retour à la Maison-Blanche Donald Trump n'a pas l'ambition de maintenir l'ordre libéral. Il souhaite mettre fin au conflit israélo-palestinien et à celui en Ukraine, car il ne souhaite pas déployer son armée. En revanche, de façon plus surprenante, "il a l'ambition d'avoir le prix Nobel de la paix", souligne le géopolitogue. 

Donald Trump affiche une volonté délibérée d'affaiblir l'Europe.

Il n'a cessé d'afficher une "volonté délibérée d'affaiblir l'Europe", explique Bruno Tertrais. En réaction à cette menace, les dirigeants européens se réunissent aujourd'hui à Bruxelles pour un sommet extraordinaire. Ils discuteront de l'avenir de la défense européenne et de l'Ukraine. Une question centrale émerge alors, est-ce que l'Europe peut assumer seule un conflit avec les troupes russes ?

La défense européenne n'est pas encore prête 

"La défense de l'Europe, elle se fait encore par l'OTAN. Autrement dit, jusqu'à preuve du contraire, les Américains restent dans l'OTAN. Ils sont engagés à exercer une forme de leadership, en tout cas de cette défense, avec des forces américaines présentes en permanence sur le continent", rappelle le géopolitogue. Néanmoins, si les Etats-Unis venaient à quitter l'OTAN, cela voudrait donc dire que l'Europe devrait donc assurer sa défense seule. "Ce à quoi elle n'est pas encore prête", explique Bruno Tertrais. 

L'importance du jeu d'alliance 

Un allié au sens traditionnel du terme est "quelqu'un pour qui l'on va se battre", rappelle le géopolitogue. Aujourd'hui, l'Europe n'a pas d'autre alliance que celle avec les Etats-Unis. Cependant, "elle a des partenariats commerciaux et militaires avec le Canada et la Turquie" commente Bruno Tertrais. 

A quel moment est-ce qu'un État peut jouer le rôle de lieu d'accueil acceptable pour plusieurs parties ?

Dans ce jeu d'alliance, l'Europe peut craindre un rapprochement grandissant entre les Etats-Unis de Donald Trump et la Russie de Vladimir Poutine. Face à cette situation, peut intervenir un intermédiaire de paix. "Mais on n'a pas forcément besoin d'intermédiaire. Cette idée selon laquelle il faut absolument un médiateur, un intermédiaire pour régler une crise, n'est pas forcément quelque chose de réel", précise le géopolitologue. "La question est plutôt de savoir à quel moment est-ce qu'un État peut jouer le rôle de lieu d'accueil acceptable pour plusieurs parties", poursuit Bruno Tertrais. On appelle cela la diplomatie hôtelière

On voit les pays comme la Turquie ou comme l'Arabie Saoudite se poser aujourd'hui comme lieu naturel de discussion 

Traditionnellement, on pense à la Suisse ou encore à l'Autriche. Néanmoins, "on voit les pays comme la Turquie ou comme l'Arabie Saoudite se poser aujourd'hui comme lieu naturel de discussion. Pouvant éventuellement mener à la paix, ne serait-ce que de manière temporaire", explique Bruno Tertrais. Il conclut en rappelant que "lorsque la paix ne se fait pas, c'est rarement par manque d'intermédiaire." 

Après l'allocution présidentielle, les 27 pays de l'Union européenne se sont réunis pour un sommet à Bruxelles jeudi 6 mars. 

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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