Rentrée scolaire : repenser l’éducation française selon Philippe Meirieu
La rentrée amène les traditionnelles interrogations qui entourent le modèle d’éducation français. Philippe Meirieu, spécialiste des sciences de l’éducation, prône depuis plusieurs années une école qui encourage la participation de l’élève à son apprentissage, se plaçant en opposition au traditionnel modèle de l’accumulation des connaissances. Pour la rentrée, il partage ses dernières observations sur le système d’éducation français.
Ecole © Pixabay11,8 millions d’élèves ont retrouvé le chemin de l’école lundi 1er septembre. Avec un budget de 64 milliards d’euros, l’Éducation nationale est, depuis plus de cinquante ans, le premier budget de la nation. Pourtant, les résultats de la France dans les enquêtes internationales restent mauvais, avec la dernière place des pays européens en mathématiques.
Mobiliser les élèves dans leurs apprentissages
Apprendre, oui, mais comment ? Pour Philippe Meirieu, il est impératif de mobiliser les élèves et de leur permettre de s’engager personnellement dans leur parcours d’apprentissage. "C’est ce que l’école ne parvient malheureusement pas toujours à faire, malgré l’effort de beaucoup d’enseignants," déplore le spécialiste des sciences de l’éducation.
C’est ce que l’école ne parvient malheureusement pas toujours à faire, malgré l’effort de beaucoup d’enseignants
L’apprentissage est un modèle éducatif qui se construit grâce à la mise en place, par des professeurs investis, de la mobilisation des élèves pour ne pas les laisser là où ils sont, mais bien les emmener plus loin, explique Philippe Meirieu. Il souhaite développer une intelligence à la fois du monde et d’eux-mêmes. Il se réjouit que "beaucoup d’établissements publics et privés s’efforcent de mettre l’élève en situation d’apprendre avec cette double volonté." Certains établissements ont ainsi mis en place un système d’entraide entre les élèves qui se révèle particulièrement efficace. "Quand on explique à quelqu’un, on maîtrise mieux ce que l’on sait."
Revaloriser le métier d’enseignant
Lundi 1er septembre, la ministre de l’Éducation nationale a reconnu "l’équivalent de 2 500 professeurs" manquants en cette rentrée scolaire. Pour Philippe Meirieu, cette situation découle directement d’un manque de reconnaissance, tant financière que symbolique. "Les professeurs qui mouillent la chemise, les professeurs qui se donnent à fond dans ce métier ne sont pas suffisamment reconnus pour la valeur de ce qu’ils font", s’agace le spécialiste.
Les professeurs qui mouillent la chemise, les professeurs qui se donnent à fond dans ce métier ne sont pas suffisamment reconnus pour la valeur de ce qu’ils font
L’école privée se place parfois comme une solution à ce manque de reconnaissance pour certains professeurs. Philippe Meirieu déplore que "l’école publique n’ait pas toujours été à elle-même son propre recours." Il souhaite néanmoins que les dotations aux établissements privés et publics soient proportionnées à la part qu’ils prennent dans l’éducation des plus défavorisés, dans l’optique de poursuivre la lutte contre les inégalités scolaires.
IA : bénédiction ou malédiction pour l’enseignement ?
Une question plus récente mais qui prend de l’ampleur dans l’enseignement est celle de la place de l’IA. "Il y a toute une série de songeries, je pense à ceux et celles qui imaginent que l’intelligence artificielle va remplacer les professeurs, qui sont particulièrement négatives et qui, je trouve, ne nous rendent pas service et même compromettent l’avenir de notre système éducatif", avertit Philippe Meirieu.
Je pense que nos enfants ont vraiment besoin de comprendre ce que seul l’humain peut faire : grandir en humanité, et la machine ne nous fait pas grandir en humanité.
Selon le spécialiste, il faut se saisir de cette opportunité pour recentrer la relation pédagogique avec l’élève sur le désir de savoir et sur l’engagement dans des connaissances infinies. “Je pense que nos enfants ont vraiment besoin de comprendre ce que seul l’humain peut faire : grandir en humanité, et la machine ne nous fait pas grandir en humanité.”


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