Regard sur le poids : de l’enjeu médical à la pression sociale
Quand le poids devient un indicateur social. Qu’on le redoute ou qu’on l’ignore, le poids est scruté dans nos sociétés. Mais derrière l’IMC (Indice de masse corporelle) et les balances se cache un reflet des normes sociales et des inégalités.
© FreepikTrop minces, trop gros, jamais comme il faut, l’apparence devient le reflet d’une appartenance de classe, parfois de genre, parfois même d’origine. En France, l’obésité touche plus fortement les catégories populaires, tandis que la minceur est souvent associée à la discipline et au prestige.
Poids et société, un miroir des inégalités
Pour Myriam Douste-Lombre, diététicienne et hypnothérapeute, le poids n’est pas toujours synonyme de maladie. "On peut très bien être en surpoids aux yeux des autres et pourtant être en bonne santé", souligne-t-elle. Anne-Sophie Joly, présidente fondatrice du Collectif national des associations d’obèses (CNAO) complète : "il faut faire attention à votre santé parce que vous n’en avez qu’une. Et après, pas de culpabilisation, il faut de la bienveillance vis-à-vis de soi-même".
La société fonctionne avec le joli catalogue des normes.
Le poids, facteur de discrimination. Au-delà de la santé, le poids peut être source de stigmatisation. Anne-Sophie Joly rappelle les résultats d’une étude : "deux candidates ayant le même niveau d’études, si l’une est en surpoids, elle sera déclassée de deux niveaux d’études par rapport à une candidate à stature normale". Cette discrimination s’étend aux emplois, aux réseaux sociaux et à la vie quotidienne, renforçant un sentiment d’exclusion. Marie, auditrice de l'émission Je pense donc j'agis, illustre ce phénomène : "la société fonctionne avec le joli catalogue des normes… Les enfants sont construits avec l’image qu’ils vont donner". Myriam Douste-Lombre précise que cette pression s’exerce dès l’enfance. "On va créer un problème chez l’enfant qui n’en a pas, alors que l’enfant n’y pensait même pas".
Les images véhiculées par les médias renforcent ces normes. Myriam Douste-Lombre souligne "qu'il y a une explosion de la chirurgie esthétique très jeune… c’est une normalisation d’un corps qui pose problème". Anne-Sophie Joly ajoute que "les réseaux sociaux ont signé pour la première fois en janvier pour éviter des images blessantes ou incitant à la surconsommation".
Du jugement à la bienveillance, comment repenser notre rapport au corps
L’éducation joue un rôle central dans le rapport au corps. "Les enfants restent des enfants, ce n’est pas eux qui décident", rappelle Myriam Douste-Lombre. Anne-Sophie Joly rappelle également la complexité génétique : "si les deux parents ont un problème de poids, l’enfant a 80 % de chance de récupérer la génétique". Les témoignages montrent que la discrimination ne touche pas que les personnes en surpoids. Karine raconte son parcours : "On ne parle beaucoup d’obésité, mais pas assez de la maigreur. À l’étranger, j’étais acceptée pour ma minceur, alors qu’en France, c’était un poids social lourd à porter". Arnaud renchérit : "Même les personnes maigres font face à des discriminations… c’est un problème socio-culturel".
L'obésité est la discrimination la plus tolérée dans le monde.
Mode et accessibilité : un autre biais social. Les vêtements illustrent également les contraintes sociales liées au poids. Fabienne et Sabine témoignent "qu'à partir de la taille 44-46, c’est très difficile de trouver des vêtements confortables et stylés. Les marques ne se lancent pas sur ce créneau pour des raisons économiques". Myriam Douste-Lombre explique que "les patrons de base en France ne sont pas les mêmes qu’en Italie ou en Espagne… il faut souvent se diriger vers des boutiques spécialisées". Vers une bienveillance universelle. "Le poids de vos mots peut être des poignards… l’obésité est la discrimination la plus tolérée dans le monde. Il faut changer ça. Plus vous apporterez votre amour sans parler de son poids, plus l’enfant trouvera confiance en lui et prendra soin de sa santé à son rythme", conclut Anne-Sophie Joly.


Cette émission interactive présentée par Melchior Gormand est une invitation à la réflexion et à l’action. Une heure pour réfléchir et prendre du recul sur l’actualité, et pour agir, avec les témoignages d’acteurs de terrain pour se mettre en mouvement et s’engager dans la construction du monde de demain.
Intervenez en direct au 01 56 56 44 00, dans le groupe Facebook Je pense donc j'agis ou écrivez à direct@rcf.fr




