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Qui était Bernard Perrin, jeune scout lyonnais mort en déportation, nouveau bienheureux de l'Église catholique ?

Qui était Bernard Perrin, jeune scout lyonnais mort en déportation, nouveau bienheureux de l'Église catholique ?

Un article rédigé par Jean-Baptiste Cocagne - RCF Lyon, le 11 décembre 2025 - Modifié le 12 décembre 2025
Tempo · Le podcast d'actualité de RCF LyonBernard Perrin, jeune scout lyonnais mort en déportation, bientôt bienheureux

L'Eglise de Lyon comptera bientôt un nouveau bienheureux. Après Pauline Jaricot en mai 2022, le martyre de Bernard Perrin « en haine de la foi » sera officiellement reconnu lors d’une célébration à Notre-Dame-de-Paris samedi 13 décembre.

 

Scout lyonnais, engagé volontairement dans le STO en solidarité avec les réquisitionnés, Bernard Perrin est mort à l’âge de 24 ans dans le camp de concentration de Güsen en Autriche en avril 1945.

 

80 ans après sa mort, comment sa figure nous parle encore aujourd’hui ? Tempo dresse le portrait de ce nouveau bienheureux lyonnais.

Bernard Perrin - DRBernard Perrin - DR

Samedi 13 novembre 2025, à la cathédrale Notre-Dame de Paris, le martyre de 50 catholiques français sera officiellement reconnu par l'Église catholique. Prêtres, laïcs, membres de la jeunesse ouvrière chrétienne, scouts, tous ont été tués par le régime nazi « en haine de la foi », a déclaré en juin dernier le pape Léon XIV. Parmi eux, un Lyonnais, Bernard Perrin. 

Né le 25 février 1921 à Lyon, dans une famille catholique plutôt bourgeoise installée dans le quartier d'Ainay en Presqu'île, Bernard Perrin exprime dès l'enfance son désir d'être « un saint curé d'Ars ». Il s'engage rapidement dans le scoutisme et rêve d'intégrer l'armée pour devenir aumônier militaire.

Mais la Seconde Guerre mondiale brise ses rêves de Saint-Cyr. En octobre 1940, Bernard Perrin se rabat sur des études de chimie à l'université catholique de Lyon. En 1943, 800 000 travailleurs ouvriers français sont réquisitionnés pour aller travailler dans les usines allemandes dans le cadre du Service du travail obligatoire (STO). Â l'âge de 22 ans, Bernard Perrin se porte volontaire pour partir en Allemagne afin d'aider spirituellement les ouvriers, comme une forme de réponse à l'appel au sacerdoce qu'il a reçu quelques années plus tôt.

Cet accompagnement spirituel s'effectue de façon clandestine, « car le régime nazi considère la foi chrétienne comme une superstition, inférieure à l'idéologie nationale-socialiste qui devait éduquer les masses et forger le Reich » selon Jérôme Perrin, l'un des neveux de Bernard. 

Bernard savait certainement que cette activité était dangereuse et malgré tout, sur place, il a tout fait pour permettre aux chrétiens de se rassembler, à la fois trouvé des prêtres pour célébrer des messes, pour qu'ils aient accès au sacrement et il a mis en place aussi un service d'entraide - matérielle et morale - pour ceux qui n'avaient pas le soutien de leur famille. 

Mais la Gestapo goûte très peu ce charisme solidaire. En 1944, Bernard Perrin est arrêté dans l'usine allemande où il travaillait pour être déporté au camp de concentration de Mauthausen-Güsen en Autriche, où il meurt en avril 1945 épuisé par le typhus. Il n'avait que 24 ans.

Ce passage dans les camps nazis a coïncidé avec une forme de croissance dans la foi pour Bernard Perrin, comme l'explique le père Denis Baudot, canoniste, prêtre lyonnais chargé d'instruire la cause de béatification de Bernard Perrin. Depuis l'ouverture de la cause en 1988 sur les conseils de l'archevêque de Lyon, le cardinal Albert Decourtray - dont il était le secrétaire particulier -, le père Baudot a rencontré une quarantaine de témoins. 

Les témoins que j'ai entendus, qui ont connu Bernard Perrin à Lyon m'ont dit "Bernard Perrin n'était pas un saint plus que nous". C'est quand Bernard a été confronté aux épreuves des chantiers de jeunesse, puis du service du travail obligatoire, puis du camp de concentration, qu'on a vu Bernard progresser dans son témoignage, dans son service des autres. Il s'est révélé. Ce sont finalement les derniers témoins qui l'ont connu à travers ces trois camps d'hiver successifs qui ont fini par repérer et dire que Bernard avait vécu une réelle ascension spirituelle et qu'ils en avaient été touchés. Ils disaient tous qu'il n'était pas possible de vivre comme il a vécu s'il n'était pas animé par quelque chose de plus fort, c'est-à-dire la foi chrétienne. Tous reconnaissaient que quand on est dans un camp de concentration, on s'occupe de chaussettes trouées, de patates, on pense à sa survie et on n'a pas le souci des autres, comme l'a eu Bernard Perrin.

Pour rédiger le dossier de cause de béatification, le père Denis Baudot a pu s'appuyer sur 170 lettres écrites par Bernard Perrin, où il parlait souvent de Dieu et conservées par l'une de ses sœurs. « Dans ses lettres, on voit bien qu'il se considère comme scout et séminariste. C'est très marquant » souligne le prêtre canoniste.

On avait une photo de lui dans la maison familiale. C'est vraiment une figure qui nous a accompagnés, c'était un peu un modèle. Toute notre enfance a été bercée en quelque sorte par le souvenir de notre oncle. Il rayonnait du service des autres, de la foi partagée et déjà aussi de l'amour, même pour les ennemis, alors que ses compagnons de détention étaient ravagés par la haine. Lui avait des paroles de pardon, de réconciliation déjà éclairées avant l'heure. 

Marion, Pauline, Karine et Paul du groupe scout Bernard-Perrin à Genas-Chassieu © RCF Lyon novembre 2025Marion, Pauline, Karine et Paul du groupe scout Bernard-Perrin à Genas-Chassieu © RCF Lyon novembre 2025

Cet héritage spirituel de Bernard Perrin passe aussi par un groupe scout de l'Est lyonnais qui porte son nom depuis 1991, le groupe des Scouts et guides de France de Genas-Chassieu Bernard Perrin, qui accueille aujourd'hui 110 jeunes. Ce scout du début du XXe siècle inspire encore des jeunes, 80 ans après sa mort, comme Marion Vinit, cheftaine chez les louveteaux-jeannettes. Elle a peu à peu découvert l'histoire de celui dont le nom ornait sa chemise.

En tant que cheftaine, c'est une responsabilité d'expliquer aux plus jeunes comment une personne qui, au final, était un simple scout, qui a fait sa promesse comme eux, a fini par être béatifié. Bernard Perrin est un exemple qui montre qu'ils peuvent finir comme lui, que l'engagement qu'ils font dans les scouts, ce ne sera pas juste un engagement les samedis après-midis, avec les copains scouts, ça va être aussi un engagement dans la société. Bernard Perrin était une personne engagée, jusqu'au bout, fidèle à sa promesse et aux valeurs scouts. Il n'a jamais arrêté d'être scout, même quand il ne portait pas sa chemise. 

Une délégation importante du groupe scout Bernard-Perrin sera présente à la cathédrale Notre-Dame-de-Paris pour la cérémonie de béatification. Ils rencontreront à cette occasion des membres de la famille de Bernard Perrin, fortement mobilisée pour cette cérémonie mettant à l'honneur l'un des leurs. 

Tempo · Le podcast d'actualité de RCF Lyon
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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