Mercredi 7 mai, premier jour du conclave, il était 21 heures lorsque la fumée s’est échappée du fameux tuyau de cuivre installé au-dessus de la Chapelle Sixtine. Elle est apparue près de deux heures après l’heure annoncée par la plupart des médias. Le temps et le silence ont ainsi pris toute leur place, révélant leur rôle central dans le choix du pape. Avec Mgr Étienne Guillet, évêque de Saint-Denis, Louis Daufresne, rédacteur en chef de RCF Notre-Dame, et Étienne Pépin, envoyé spécial à Rome, décryptage de ces éléments qui vont à rebours de la vitesse et du bruit caractéristiques de notre société.
Près de 45 000 pèlerins étaient venus des quatre coins du monde pour observer la cheminée, dans l’espoir d’apercevoir une tache blanche dans le ciel romain.
Il a fallu attendre 21 heures pour que la fumée apparaisse enfin sur le toit de la Chapelle Sixtine, à proximité immédiate de la basilique Saint-Pierre. Une fumée noire, signe qu’aucun pape n’a encore été élu par les 133 cardinaux électeurs à l’issue de ce premier scrutin. La fumée était attendue pour 19 heures, mais il a fallu patienter bien plus longtemps.
Nous sommes souvent trop pressés. Il ne faut pas céder à l’injonction médiatique d’aller vite, ni à l’impatience des fidèles
Selon Louis Daufresne, ce délai s’explique par le nombre élevé de cardinaux, mais aussi, peut-être, par une volonté délibérée de prendre son temps. "Nous sommes souvent trop pressés. Il ne faut pas céder à l’injonction médiatique d’aller vite, ni à l’impatience des fidèles."
Le choix peut demander plus de réflexion qu’en 2013, où il s’agissait de reprendre en main la Curie après la renonciation de Benoît XVI. "Aujourd’hui, vu les nombreux chantiers ouverts par le pape, une réflexion plus profonde est peut-être engagée", souligne le rédacteur en chef de RCF Notre-Dame.
Le temps du monde n’est pas celui de l’Église. L’Église agit "à temps et à contretemps" et a pris le temps, hier, d’entrer dans le conclave. Ce silence se ressentait dans la ferveur des pèlerins présents à Rome, comme en témoigne Étienne Pépin.
L’image était absolument extraordinaire
L’image des 133 cardinaux allant en procession de la chapelle Pauline à la Chapelle Sixtine pendant près d’une heure et demie, au rythme de la Litanie des saints puis du Veni Creator, a marqué les fidèles. "L’image était absolument extraordinaire."
La liturgie est le langage de l’Église dans sa relation avec Dieu. C’est elle qui rend Dieu présent dans la vie des hommes. Ce lien a bouleversé pèlerins, fidèles et passants, comme le souligne Étienne Pépin.
La Litanie des saints se distingue par son aspect hypnotique et fascinant qui nous engage dans un rapport au temps cyclique, situe Louis Daufresne : "C’est un ordre qui se déploie, qu’il faut apprendre à comprendre." En convoquant tous ces saints, les cardinaux inscrivent ce conclave dans une histoire continue.
Le silence et le temps laissent aussi place à la prière. Il y a une vertu du temps. "Il n’y a rien qui presse, affirme Mgr Guillet. Un temps plus serein, c’est aussi pour nous le temps de la prière, le temps d’habiter ce moment, décalé par rapport à l’injonction médiatique : c’est important." L’évêque de Saint-Denis invite tous les chrétiens à s’interroger : "Est-ce que moi aussi je serai loyal à ce pape-là ?".
Un temps plus serein, c’est aussi pour nous le temps de la prière, le temps d’habiter ce moment, décalé par rapport à l’injonction médiatique : c’est important
Le silence et la prière régnaient sur la place Saint-Pierre au moment de l’"Extra omnes" et de la fermeture de la porte, dont le bruit sourd a été entendu par les fidèles. Ce son portait le poids de l’histoire. "On a ressenti très fortement l’émotion à la fermeture de cette porte. Il s’est fait un silence, une torpeur sur la Via della Conciliazione. Tout le monde avait la chair de poule", rapporte Étienne Pépin. Un moment de communion et d’émotion, partagé à l’unisson avec 1,4 milliard de catholiques à travers le monde.
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