Pourquoi les congés menstruels ne font pas l’unanimité ?
La semaine dernière, l’entreprise Carrefour a annoncé qu’elle allait prendre en charge les jours de congés supplémentaires pour ses 50.000 salariées souffrant d’endométriose. Le premier employeur privé de France suit ainsi le mouvement des congés menstruels initié par quelques PME en France. Des dispositifs visant à aider les femmes souffrant de règles douloureuses qui pourraient bientôt faire l’objet d’une loi, comme en Espagne.
Faute de loi jusqu’à maintenant, chaque entreprise ou collectivité organise ces congés menstruels comme bon lui semble. Ainsi à la mairie de Saint-Ouen en Ile-de-France, ce sont toutes les femmes souffrant de règles douloureuses qui peuvent bénéficier d’un congé ; dans le cas de Carrefour, seules celles souffrant d’endométriose pourront bénéficier de 12 jours de congés supplémentaires. Pour la présidente de l’association EndoFrance, Yasmine Candau, « c’est déjà un bon début » qui permet de rendre visible la maladie dans le milieu de l’entreprise.
Un dispositif à étendre à toutes les maladies gynécologiques
Mais pour d’autres associations, ce type de congés serait une fausse bonne idée. D’abord parce que seules les femmes ayant une Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) pourront en bénéficier. Ce qui nécessite des démarches administratives parfois longues, et complexes en raison des difficultés de diagnostic.
Aussi, ce dispositif ne concerne qu’une seule pathologie, l’endométriose. Ce que déplore Cécile Amarger, administratrice du compte Instagram « Fibrome ta mère » qui a souffert d’un fibrome utérin pendant plusieurs années. « ça me dérange un peu la priorisation, la hiérarchisation des maladies », dit-elle, en précisant que le fibrome utérin touche une femme sur trois, contre au moins une femme sur dix pour l’endométriose.
Un arrêt non carencé plutôt qu’un congé menstruel
Aujourd’hui, l’infirmière ne souffre plus car elle a subi une hystérectomie (ablation de l’utérus, NDLR) mais elle se souvient des journées de travail rendues insupportables par la maladie. « C’était aller travailler quand vous êtes plié en deux, quand vous avez des règles qui sont les chutes du Niagara », raconte-t-elle. Des douleurs qui survenaient par crise et qui rendait impossible la prévision de congés ou d’arrêts maladies. D’autant plus que ces derniers sont coûteux puisque le premier jour d’arrêt n’est jamais remboursé à cause du délai de carence.
C’est pour cette raison que l’association Osez le féminisme plaide pour la mise en place d’un arrêt non carencé plutôt que d’un congé menstruel. L’association va même plus loin en proposant que cet arrêt soit ouvert à tous, indépendamment du sexe. Cela aurait plusieurs avantages : garantir le secret médical d’une part en supprimant la mention « menstruel », mais aussi limiter le risque de discrimination à l’embauche.
Briser le tabou des règles
Car c’est bien la discrimination à l’embauche qui inquiètent le plus les associations, mais aussi le MEDEF. Le patronat craignant notamment un fort absentéisme qui profiterait davantage aux hommes dans le cadre d’embauches ou de promotions. Ce à quoi la porte-parole Violaine De Fillipis-Abate d’Osez le féminisme répond : « dans les entreprises où ça a été mis en place, le taux de prise de ces congés menstruels reste très bas ».
Pour convaincre les pessimistes, les associations appellent à « briser le tabou des règles », en misant sur des « politiques de sensibilisation dès le collège ». La clef pour soulager les femmes souffrant de maladies gynécologiques et/ou de règles douloureuses, étant d’abord d’améliorer les diagnostics et les soins.
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