Pâques 2019, de la douleur d’une destruction à la reconstruction d’un sens à la vie
Alors que l’Église est blessée, la voici touchée en son cœur avec la destruction partielle de la Cathédrale Notre-Dame de Paris. Notre-Dame brûle. L’information crée un véritable choc. Le Vatican exprime son incrédulité. D’aucuns pensent que la Cathédrale peut s’effondrer tellement l’incendie fait rage. Les soldats du feu prennent de grands risques pour que « l’éternel ne soit pas perdu ». De toutes parts, des parisiens accourent, des messages de tristesse du monde entier affluent. Je vois, dit la Chancelière Angela Merkel, ces atroces images de Notre-Dame en feu ; Notre-Dame est un symbole de la France et de notre culture européenne.
Il s’en est fallu de peu que Notre-Dame s’écroule. Martyrisée, elle reste debout. Le Président de la République annule la diffusion prévue à 20 heures de son message annonçant les mesures qu’il entend prendre suite au grand débat. L’heure est celle d’un combat pour sauver Notre-Dame. Tous y participent, chacun avec ce qu’il est et ce qu’il a. Les divisions se taisent. Dans ce moment tragique, l’onde d’émotion traversant la France et le monde suscite la grâce d’une union et même d’une communion, quelles que soient les convictions religieuses, spirituelles et philosophiques.
Notre-Dame a une histoire quasiment millénaire ; elle est celle de la France. Les révolutions ont pu la toucher, jamais rien n’a pu la ravager, pas même les nazis qui avaient formé le plan de la détruire. La Cathédrale est debout et les Français, comme les étrangers, qui aiment notre Pays le sont aussi. Le Président de la République avec des mots justes, dans le continuum de ceux de l’Archevêque, traduit l’espérance de tous : « Notre-Dame sera reconstruite ; elle le sera vite et elle sera encore plus belle ». La France est debout.
Un grand chantier s’ouvre. Tous, sans aucun appel, sont immédiatement présents. La générosité n’est pas seulement celle de l’argent, mais du cœur. La Cathédrale est la maison commune. Ravagées, les toitures sont tombées. A ciel ouvert, la Cathédrale demeure ce qu’elle a toujours été et sera, plus qu’un Monument, la mémoire d’une grande histoire, marquée par des évènements qui ont construit la Nation, un peuple de bâtisseurs.
Le feu dévastateur se révèle créateur d’une union, plus encore d’une fraternité. Les inessentiels sont comme brûlés, en cendres. À quelques jours de Pâques, une résurrection s’opère dans les cœurs et les esprits. Que d’hommes et de femmes se sont levés pour que cette destruction accidentelle ne soit pas signe d’un linceul mais, au contraire, d’un moment mobilisateur qui fera date dans l’Histoire.
Je vois dans ce tragique incendie les traces du récit des disciples d’Emmaüs qui, frappés par la mort du Christ, quittent la ville du Temple pour se retirer dans un village. Soudain, à la fraction du pain que le fils de l’Homme leur offre, ils se disent l’un à l’autre : « notre cœur n’était-il pas tout brûlant, alors qu’Il nous parlait ».
En cette soirée et nuit du lundi de la Semaine Sainte que de frères se sont levés, bien décidés à reconstruire la Cathédrale. Au plus profond d’eux-mêmes, chacun comprend, suivant les mots d’Antoine de Saint-Exupéry : « On ne dit rien d’essentiel sur la cathédrale si l’on ne parle que de pierres ».
La vocation d’une cathédrale est de rassembler ; elle s’opère. Notre-Dame est en souffrance. Elle le sera tant que des hommes, des femmes et des enfants ne bénéficieront pas d’espaces où ils se sentiront chez eux parce que la misère aura été vaincue ; elle doit l’être. Comment ne pas se souvenir de Victor Hugo qui a un lien si particulier avec la Cathédrale : « je ne suis pas de ceux qui croient qu’on peut supprimer la souffrance en ce monde, mais je suis de ceux qui pensent et affirment que l’on peut détruire la misère ».
Reconstruire la maison commune, c’est aussi se reconstruire pour plus d’humanité. Quel programme ! Oui, d’un mal peut sortir un bien, une Pâques, un passage ; qui ne brûle pas intérieurement de le vivre.
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