C’est un nouveau record pour l'Église catholique. Dans la nuit de Pâques, plus de 10 000 adultes se feront baptiser en France. En deux ans, le nombre de catéchumènes a doublé, et presque triplé en dix ans.
Dans le diocèse de Lyon, la tendance est la même. Ils seront presque 400 à se faire baptiser cette année, alors qu’ils étaient 228 l’année dernière. Dans le même temps, le nombre de baptêmes d’enfants chute drastiquement, et les indicateurs de déchristianisation de la société se multiplient. Ce nouveau record est donc d’autant plus étonnant.
Nous sommes allés à la rencontre de ces futurs « catéchumènes » et de responsables ecclésiastiques, pour comprendre ce phénomène, et surtout interroger les défis posés pour l'Église catholique.
À la fin de la messe, en ce dimanche matin ensoleillé, un apéritif se prépare à la paroisse du Saint-Nom-de-Jésus, dans le 6e arrondissement de Lyon. Spécialement organisé pour les futurs baptisés, ce temps convivial permet à ces catéchumènes de mieux faire connaissance avec les paroissiens, car beaucoup d'entre eux n'ont pas grandi dans l'Église.
En effet, 30 % des futurs baptisés dans le diocèse de Lyon viennent de milieux athées, comme Pauline, 27 ans, écharpe violette sur les épaules comme signe reconnaissable des catéchumènes : « Une foi, ça se vit en communauté », raconte la jeune femme de 27 ans qui a d'abord acheté des livres et cheminé toute seule pour approfondir sa foi naissante :
Je viens d'une famille pas du tout croyante et dans une période un peu plus compliquée de ma vie avec un vide personnel et professionnel, je me posais beaucoup de questions. Là où je travaillais, ma fenêtre donnait sur l'église Saint-Nizier, place des Cordeliers (Lyon) et j'ai commencé à aller dans l'église à mes pauses, sans but précis [...] j'ai commencé à parler à quelqu'un, sans savoir vraiment qui, et mon cheminement a commencé comme ça
Une période de doutes, des questions existentielles, c'est aussi ce qu'a vécu Léo, qui va se faire baptiser à Saint-Genis-Laval. Issu d'une famille de tradition chrétienne (comme 45 % des futurs adultes baptisés), la foi n'était pas vraiment vécue dans sa famille : « On n'allait pas vraiment à la messe, mais on se considérait quand même comme chrétiens », précise le jeune étudiant de 23 ans qui a pu bénéficier de la présence de proches amies chrétiennes et de l'une de ses grand-mères pour répondre à ces questionnements.
Ce nombre toujours plus croissant d'adultes demandant le baptême surprend au sein même de l'Église catholique, alors même que les autres indicateurs ne cessent de dégringoler : nombre de baptêmes d'enfants, de mariages, prénoms religieux.
« Ce n'est pas l'Église qui attire, mais Dieu », sourit Mgr Olivier de Germay, archevêque du diocèse de Lyon, avant d'ajouter : « De fait, on est dans un pays qui avait massivement éloigné la question de Dieu et s'était tourné vers le progrès technologique, le matérialisme : aujourd'hui, on sent que tout ça a un peu déçu puisque ça ne répond plus aux attentes de l'être humain ».
Face à ce retour ou cette découverte de la foi chez les adultes, dont la moitié ont entre 18 et 25 ans, un défi majeur se pose : comment accueillir ces personnes ?
Pour anticiper la question, et d'abord essayer d'accompagner au mieux ces adultes dans leur parcours de découverte de la foi, des « fraternités » ont été mises en place depuis quelques années dans le diocèse de Lyon : « Sur 18 mois, en groupe, on peut avoir une rencontre par mois où on va faire un temps d'accueil avec un petit repas, un autre temps où on peut prier, et un troisième temps où on échange sur la Parole de Dieu, avec un livre pour le catéchumène et un livre pour l'accompagnateur », explique Stéphane, accompagnateur à la Paroisse Bienheureuse Pauline Jaricot de la Croix-Rousse, qui donne de son temps à côté de son travail. Un rôle essentiel face à la baisse du nombre de prêtres et cette demande croissante de baptêmes.
Marie-Hélène Robert est notamment professeure de théologie à l'Université catholique de Lyon. Elle a dirigé l'ouvrage collectif L’accueil des nouveaux convertis dans les communautés chrétiennes en 2018 :
On n'a pas changé d'époque (depuis la sortie du livre, ndlr), mais on a peut-être mieux pris conscience de la place des néophytes. Certaines communautés sont vieillissantes, mais on a moins peur des jeunes et de ce qu'ils peuvent apporter, et ça c'est fantastique. Pour moi, la première chose était d'écouter leurs besoins, leurs désirs, et à partir de là prendre en compte leur réalité, car parfois ils n'ont pas les codes (de l'Église, ndlr), ou bien certains ont peur d'être instrumentalisés : "Je vais être baptisé et après on va me demander plein de choses". Pour leur faire de la place, il faut parfois renoncer à occuper toute la place
Un défi d'intégration, lié au défi de l'intergénérationnel que Léo vit déjà avec sa grand-mère, fervente croyante, ce qui l'aide beaucoup avec les autres personnes âgées de sa paroisse à Irigny-Saint-Genis-Laval : « Au début, c'était bizarre car c'était la foi de ma grand-mère, mais maintenant ça rapproche, c'est un point d'accroche en plus [...]. L'intergénérationnel c'est génial, ça amène des discussions avec des personnes avec qui on n'aurait jamais discuté avant ».
Un enrichissement qui motive le jeune étudiant, bien décidé à poursuivre son chemin, après le baptême et à « parler de tout ça avec joie, à qui veut bien l'entendre » autour de lui.
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