JavaScript is required
Accueil
Monseigneur Kratz : « Le pape nous rappelait à la radicalité de l'Evangile »

Monseigneur Kratz : « Le pape nous rappelait à la radicalité de l'Evangile »

Un article rédigé par Baptiste Villermet - RCF Alsace, le 24 avril 2025 - Modifié le 24 avril 2025
Focus en AlsaceMonseigneur Kratz : « Le pape nous rappelait à la radicalité de l'Evangile »

Nous apprenions ce lundi 21 avril, la mort du pape François. La veille, il s'était adressé aux fidèles, une dernière fois depuis le balcon de la basilique Saint-Pierre pour célébrer Pâques. De quelle manière la nouvelle a-t-elle été perçue en Alsace dans l’Eglise catholique ? Entretien avec Monseigneur Kratz, évêque auxiliaire de Strasbourg.

© RCF Alsace© RCF Alsace

RCF Alsace : Le pape François est mort le lendemain de la résurrection du Christ. C'est un symbole très fort. Lorsque vous avez appris la nouvelle de son décès, quelle a été votre réaction ou qu'avez-vous ressenti ? 

 

Monseigneur Kratz : J’ai appris la nouvelle lundi matin, j'étais couché sur mon lit de dialyse. Je regardais la télé tout à coup une bande spéciale défile sur l'écran, annonçant la mort du pape François. Cela a d'abord été la stupéfaction, puisque la veille encore, il a donné péniblement, certes, mais il a donné la bénédiction Orbi et urbi et a même fait un tour sur la place Saint-Pierre pour prendre un bain de foule. Donc, je ne pensais pas que ça pouvait arriver aussi vite, même si on se disait que ces jours étaient quand même comptés, vu son âge et vu les comorbidités dont il était victime. 

 

RCF Alsace : En 12 ans de pontificat, le pape François aura laissé une trace indéniable. On dit souvent de lui qu'il était un pape avant-gardiste, pour d'autres, il a été une personnalité clivante. D'après vous, quelle trace majeure va-t-il laisser au sein de l'Église et que retiendra-t-on de sa personne ? 

 

M.K : Je retiens quand même qu'il a bien souvent été radical, mais ça ne veut pas dire nécessairement autoritaire. Mais il nous rappelait à la radicalité de l'Évangile, en particulier lorsqu'il nous invitait à aller aux périphéries, à la rencontre des pauvres, des marginaux, des immigrés. Finalement, il nous remet au cœur du dispositif évangélique et cette radicalité, on en a besoin, même si, après, on fait comme on peut. 

 

RCF Alsace : Est-ce que d'après vous, il est aussi parvenu à toucher les non-chrétiens également avec l'encyclique Lodato si’ et son attention particulière à l'écologie intégrale ? 

 

M.K : Je crois que là, il était vraiment prophétique et c'est vrai qu'à certains moments, on avait l'impression qu'il avait une influence plus grande en dehors de l'église que dans l'église. Mais je crois que là, il a pleinement assumé son rôle de pasteur, pas seulement pour les catholiques dont il est responsable. Il a donné une parole de sagesse et une parole prophétique pour le monde. Je crois que beaucoup de gens lui sont reconnaissants d'avoir occupé ce poste de sentinelle et de veilleur, au cœur du monde, pour nous rappeler l'urgence de faire évoluer les choses pour que notre planète puisse continuer à exister dans les années qui viennent. 

 

RCF Alsace : Et plus personnellement, si vous deviez retenir un moment en particulier de son pontificat, cela serait lequel ?

 

M.K : Le moment particulier, c'était le premier jour quand il a été élu pape. Il est arrivé au balcon et il a demandé au peuple de Rome de prier pour lui. Je me suis dit, voilà, un homme humble qui ne vient pas en chef, mais qui vient en serviteur. Et pour moi, un des plus beaux titres du pape, c'est serviteur des serviteurs de Dieu. Et ce jour-là, j'ai compris qu'on aurait affaire à une personnalité riche et nécessaire, utile au monde d'aujourd'hui, et je crois que s'il est devenu pape, c'est que le Saint-Esprit l'a voulu à cette place, à ce moment de l'histoire. 

 

RCF Alsace : Spirituellement, est-ce qu'il a pu être une source d'inspiration pour vous ?

 

M.K : Le fait de me rappeler la radicalité de l'Évangile, c'était une source d'inspiration, oui. Parce qu'on est tous fabriqués un peu pareils, on fait des compromis. On se dit, ce n'est déjà pas si mal si je vais jusque-là. Lui, nous disait non : on ne peut jamais se sentir en règle, on n'en fait jamais assez. Plus on se rapproche du Christ, plus on est appelés à se faire serviteur, et plus on est occupé par un tas d'activités. Et plus il faut aussi s'arrêter pour prier, se ressourcer, car on ne peut pas donner ce qui ne nous habite pas. 

 

RCF Alsace : Une messe pour le pape François a eu lieu mercredi 23 avril à 19 h à la cathédrale de Strasbourg. Plus généralement, on sent l'importance pour les catholiques de se réunir et d'exprimer ensemble un dernier hommage, en quoi c'est important même localement de faire communauté aujourd'hui en cette période de deuil ? 

 

M.K : C'est très important parce qu'on n'est pas chrétiens tout seul. Dans des moments importants comme le décès d'un pape, il est bon pour les catholiques, peut-être même plus largement pour les chrétiens, de se retrouver pour rendre grâce pour ce qu'a été son ministère durant toutes ces années. Aussi pour confier aussi l'avenir de l'église au Seigneur, parce que vous le savez, dans quelques jours, va se réunir en conclave, qui devra désigner le successeur du pape François.

 

RCF Alsace : Jetons un œil vers l'avenir, quel défi majeur attend le successeur du pape François en cette période planétaire si troublée ? 

 

M.K : Pour moi, le programme n'est pas tracé, on ne peut pas dire ce qu'il faudra faire. Justement, une des difficultés la plus grande sûrement, c'est qu'on ne sait pas, il faudra bien se mettre à l'écoute de l'Esprit Saint, mais aussi connaître le réel. Je dis toujours qu'il y a une double conversion pour tout chrétien, conversion à Dieu et conversion au réel. Le réel, on ne le choisit pas, il nous est donné, alors souvent, on est tenté de le fuir et de se réfugier dans le passé. Je crois que ce n'est pas la bonne solution, même si nous sommes héritiers d'un passé dont il faut évidemment tenir compte. Il ne s'agit pas non plus de se projeter dans un avenir irréel, il s'agit bien de vivre l'aujourd'hui de Dieu et d'essayer ensemble de faire face aux difficultés que nous rencontrons aujourd'hui. Et la difficulté la plus importante, c'est l'avenir de la planète, l'avenir de la paix, l'avenir d'une écologie qui gaspille moins, qui ne gaspille plus, qui permet à la planète de subsister. Et à tous les Hommes qui habitent cette planète de vivre dans la paix, le respect les uns des autres et avoir le minimum vital pour vivre.

 

RCF Alsace : Et vous pensez que ces questions seront au cœur du conclave qui doit arriver prochainement ? 

 

M.K : Oui, je suis frappé par ce paradoxe que nous vivons actuellement. Nous sentons bien que beaucoup de murs s'écroulent, que des tas de choses dans l'Église ne vont pas très bien. Et en même temps, il y a des signes de renouveau et le plus grand signe que je vois pour le moment, c'est le nombre de catéchumènes dans l'Église universelle et surtout dans l'Église de France et même en Alsace chez nous. Nous avons plus de 200 adultes, grands adolescents et adultes qui ont été baptisés à la nuit pascale ou qui vont l'être dans les semaines à venir. C'est un grand signe de renouveau et un formidable signe d'espérance pour moi. 

 

RCF Alsace : Le pape François a beaucoup fait pour le dialogue interreligieux, est-ce que c'est une volonté qu'il faut poursuivre dans le futur ?

 

M.K : Nous sommes condamnés à dialoguer, à s'écouter, à se respecter et même à construire des ponts de fraternité, sinon la planète court à sa perte. Je pense que le dialogue des religions est essentiel pour la paix dans le monde. Et à Strasbourg, nous avons cette chance, car nous avons mis en place des instances de rencontres, de réflexions, de partages entre les différentes religions. D'abord entre catholiques et protestants, puis entre catholiques, protestants et juifs. Et puis maintenant entre catholiques, protestants, juifs et musulmans. Et nous sommes très heureux de ce dialogue qui est, comme je le disais, vital, essentiel pour l'avenir de notre société. 

© RCF Alsace
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Focus en Alsace
© RCF Alsace
Découvrir cette émission
Cet article vous a plu ?
partager le lien ...

RCF vit grâce à vos dons

RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation  de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !

Faire un don
Qui sommes-nous ?

RCF est créée en 1982, à l'initiative de l'archevêque de Lyon, Monseigneur Decourtray, et du Père Emmanuel Payen. Dès l'origine, RCF porte l'ambition de diffuser un message d'espérance et de proposer au plus grand nombre une lecture chrétienne de la société et de l'actualité.

Forte de 600.000 auditeurs chaque jour, RCF compte désormais 64 radios locales et 270 fréquences en France et en Belgique. Ces 64 radios associatives reconnues d'intérêt général vivent essentiellement des dons de leurs auditeurs.

Information, culture, spiritualité, vie quotidienne : RCF propose un programme grand public, généraliste, de proximité.Le réseau RCF compte 300 salariés et 3.000 bénévoles.

RCF
toujours dans
ma poche !
Téléchargez l'app RCF
Google PlayApp Store
logo RCFv2.14.0 (21796db) - ©2024 RCF Radio. Tous droits réservés. Images non libres de droits.