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Modèle agro-industriel français : un débat impossible ?

Modèle agro-industriel français : un débat impossible ?

Un article rédigé par Amaury Perrin - RCF, le 20 juin 2023  -  Modifié le 17 juillet 2023
Je pense donc j'agis Modèle agro-industriel français : un débat impossible ?

Le milieu agricole connaît une véritable crise. Le nombre d’agriculteurs a été divisé par quatre en 40 ans, passant de 1,6 million en 1986 à environ 400.000 en 2022. En cause, la course à la productivité qui s’est lancée à partir des années 1960 et a imposé un modèle agro-industriel principalement fondé sur le rendement. Celui-ci fait aujourd’hui l’objet de débats et se voit remis en cause. Mais la discussion entre les agriculteurs eux-mêmes et avec les industriels semble parfois difficile.

C'est la course aux machines en milieu agricole © Mark Stebnicki sur Pexels C'est la course aux machines en milieu agricole © Mark Stebnicki sur Pexels

Dans la construction actuelle de l’économie agricole, les agriculteurs sont dépendants des industriels, des banques et de la grande distribution. De plus en plus, un mécontentement général se fait ressentir, ainsi qu’un réel mal-être. En conséquence, un à deux agriculteurs se suicident chaque jour en France selon Vie Publique.

 

 

Des difficultés nombreuses et durables

 

"J’ai remarqué un certain nombre de signaux déjà dans ma jeunesse à la ferme", confie Nicolas Legendre, agriculteur de père en fils, auteur de Silence dans les champs aux éditions Arthaud. Il évoque notamment "des rapports de forces tendus au sein du monde paysan", tant entre les paysans qu’avec les entités extérieures dont ils dépendent. L’agriculteur écrivain insiste sur la "perte de sens généralisée" qui touche les paysans, pour lesquels il est compliqué de voir un avenir. Nicolas Legendre parle même d’un burnout global. 

 

Par ailleurs, il y aurait un déni de tout un pan de l’agriculture d’aujourd’hui. "Il n’y a pas qu’un seul modèle agricole en France", indique Laurence Marandola, nouvelle porte-parole de la Confédération paysanne. Selon elle, il s’agit d’un modèle dual. En effet, "une grande partie de l’agriculture est embarquée dans un phénomène massif d’agrandissement des exploitations et de pluridisciplinarité" ; l’autre partie est composée "de petites fermes qui résistent". Cette agriculture paysanne, basée sur une souveraineté alimentaire, une rémunération des agriculteurs et un travail durable sur l’environnement, représente une moindre part. 

 

 

Un système aux nombreux défauts

 

Le système agricole est jugé néfaste par les agriculteurs dont le nombre ne cesse de baisser. "Ils développent une énorme angoisse quant à l’avenir de leurs exploitations et leur transmission", affirme Laurence Marandola. Un modèle construit autour du productivisme impose "une recherche perpétuelle de rendement", explique Nicolas Legendre, qui évoque une "baisse de la main d'œuvre" et une "augmentation de la robotisation". Malheureusement, les conséquences d’un tel système ne sont que peu prises en compte et les évolutions positives paraissent peu nombreuses. 

 

En particulier, beaucoup de paysans font face à des problématiques d’endettement et de santé. "Les investissements sont lourds pour agrandir les exploitations et les mécaniser", estime Nicolas Legendre, selon lequel le tracteur est devenu "le symbole de la réussite agricole". Par ailleurs, ce modèle entraîne des problématiques environnementales, qui donnent lieu à des normes aux niveaux national et européen. "Mais cela implique des coûts supplémentaires", indique l'agriculteur. Par conséquent, 42 % des fermes françaises sont endettées et certaines régions le sont encore plus, comme la Bretagne dont le taux d’endettement s’élève à 57 % en 2020. 

 

 

Un avenir qui se dégage ?

 

Même si les choses sont complexes, "un débat doit avoir lieu", considère la porte-parole de la Confédération paysanne. Laurence Marandola insiste notamment sur la nécessité de "mettre les choses à plat pour avancer". Une volonté générale se forme ainsi au sein des agriculteurs pour déployer des solutions et lancer le changement. "Il suffit de se fixer un objectif et de savoir où on veut aller", indique Nicolas Legendre, qui souhaite une plus grande implication politique et une évolution idéologique. 

 

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© RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Je pense donc j'agis

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