Mgr Yves Le Saux : "On n'arrête pas d'être chrétien pendant les vacances"
Dernier entretien de l'année pastorale 2024/2025 avec Mgr Yves Le Saux, évêque d'Annecy. L'occasion de regarder l'année des catholiques dans le rétroviseur : les rencontres avec les élus, les communautés face au défi d'accueillir les demandes de baptêmes, l'élection du Pape... Nous nous projetons aussi à la rentrée, avec déjà des rendez-vous pour tous les fidèles.
Mgr Yves Le Saux, évêque d'Annecy RCF : L'été est synonyme de vacances, mais aussi d’engagement, pour beaucoup de catholiques ! Ils ouvrent les églises et les font visiter, ils animent des haltes spirituelles... Dans un territoire touristique comme le nôtre, l’Eglise n’est pas en “congé total” pendant ces grandes vacances !
Mgr Yves Le Saux : Un certain nombre de vacanciers et touristes viennent trouver à la montagne un repos. Le diocèse et les paroisses font des propositions et je pense que c'est à intensifier. Un ami évêque m'a confié un jour que le début de son cheminement date d'une prière solitaire dans une chapelle de montagne. Il y a sans doute plein de personnes comme lui dans nos montagnes, soyons-y attentifs !
L'Eglise et les chrétiens sont facteurs de relations, de fraternité
RCF : Une année que vous avez placée sous le signe de l’Espérance et de la Fraternité avec votre lettre pastorale de septembre 2024. Après avoir fait le tour des paroisses l’année précédente, vous avez choisi d’échanger cette année avec des groupes, des professions : le monde de la santé, les agriculteurs, les entrepreneurs… Que gardez-vous de ces échanges ?
Mgr Yves Le Saux : Il y avait aussi des groupes intra-ecclésiaux, comme les équipes funérailles. Ils étaient heureux de relire ce qu'ils vivent, sous le prisme de l'Espérance. Quant aux autres, qui peuvent traverser des moments difficiles, comme les éleveurs ou les élus, j'ai été surpris par une véritable attente. Ils étaient contents que l'Eglise leur permette de prendre un peu de distance, par ces échanges. Nous sommes facteurs de relation ! Et j'ai des idées pour la suite.
RCF : Une année aussi marquée à nouveau par un nombre record d’adultes baptisés et confirmés dans le diocèse (90 baptêmes, 190 confirmations). Depuis votre arrivée, vous sensibilisez les communautés catholiques à l’accueil et l’intégration de ces nouveaux venus. Sentez-vous une évolution, dans les communautés ?
Mgr Yves Le Saux : Et c'est sans compter les grands ados, j'en ai confirmé 300 à la Pentecôte. Oui, ça bouge. Je pense que le chemin n'est pas terminé. L'enjeu est vraiment la capacité à les incorporer à des relations amicales et fraternelles dans les communautés. Et donc, mon souci, c'est les accompagnateurs de catéchumènes : ils sont trop peu nombreux et ils sont interrogés par l'exigence évangélique des futurs baptisés. Si l'on arrive à répondre à cet appel à incorporer les catéchumènes, la physionomie de nos paroisses va changer dans les dix années à venir.
RCF : Ces derniers mois, la conférence des évêques de France a élu un nouveau président (le cardinal J-M Aveline) et les cardinaux ont élu un nouveau Pape, Léon XIV. Quels seront leurs principaux défis, à l’un et l’autre ?
Mgr Yves Le Saux : Le cardinal Aveline a été élu largement. Par ailleurs, c'est un ami de longue date. Il a évoqué les enjeux de simplification et de bienveillance. Je pense qu'en France le défi est aussi celui de la présence chrétienne au monde : il y a une méfiance envers l'Eglise et en même temps nous sommes attendus. Quant au Pape, je garde le souvenir d'une élection rapide et sereine. Léon XIV, comme tous les papes, doit assurer la communion de l'Eglise. Il a aussi placé son pontificat sous le signe de la paix, et affirmé "Le mal ne l'emportera pas". C'est la foi de l'Eglise. Et c'est un grand défi, dans cette actualité désolante ! La sincérité de Léon XIV et son exigence de vérité me marquent. Il ne va pas utiliser la séduction et le buzz. Comme une réponse à un monde qui joue beaucoup là-dessus.
Nous n'avons pas à défendre l'identité chrétienne, nous avons à la vivre
RCF L’année pastorale va démarrer avec le rendez-vous diocésain de la Bénite Fontaine. Allez-vous publier une nouvelle lettre pastorale ?
Mgr Yves Le Saux : Un message, peut-être plus qu'une lettre. J'ai l'été pour y réfléchir ! En tous cas, la question de l'unité et de notre présence au monde me travaille. Nous n'avons pas à défendre notre identité chrétienne, nous avons à la vivre. Librement, sans complexe, sans agressivité. Vivre avec authenticité. Dans un monde avec des violences inacceptables et parfois des lois sociétales qui nous troublent.
RCF : Un mois de septembre qui sera aussi marqué par les départs et accueils de curés ou prêtres ou laïcs en mission. Quels sont les enjeux de ces mouvements ?
Mgr Yves Le Saux : Des enjeux normaux ! On n'est jamais propriétaire de sa mission : que l'on soit laïc ou ordonné ! Je pense qu'un mandat à durée déterminée est bon : il peut être renouvelé, mais il laisse l'espace pour se demander si Dieu m'appelle ailleurs. Et finalement, quoi que nous fassions, nous sommes tous au service de la même mission : manifester la charité du Christ. Je remercie tous ceux qui ont accepté paisiblement les propositions qui leur ont été faites pour la prochaine année pastorale.
RCF : Et puis une grande fête diocésaine du jubilé de l’Espérance se prépare. Rendez-vous le 29 novembre à Rochexpo. Qu’en attendez-vous ?
Mgr Yves Le Saux : Que ce soit un temps gratuit, où tout le monde se retrouve : les catéchumènes, les chercheurs de Dieu, les paroissiens, les petits, les grands, les vieux... Une catéchèse commune sera donnée par Mgr Aveline. Nous vivrons aussi un temps d'accueil de l'Espérance. Je suis sûr que si nous nous mettons ensemble humblement pour supplier le Seigneur, il peut nous traverser !
RCF : Avez-vous un conseil à donner aux catholiques, pour que cette période estivale soit porteuse, spirituellement. Pour amener Jésus dans nos valises ?
Mgr Yves Le Saux : On n'arrête pas d'être chrétien pendant les vacances ! Et c'est même une occasion de nous poser. Notre société nous propose du divertissement, mais nous reposons-nous vraiment ? Le repos, c'est probablement se réconcilier avec soi-même et peut-être avec les autres. L'été, c'est aussi le temps de la gratuité. Alors je souhaite à tous un vrai repos !


Mgr Le Saux, évêque d'Annecy et Mgr Verny, archevêque de Chambéry, évêque de Maurienne et de Tarentaise, sont régulièrement interrogés sur la vie de leurs diocèses ainsi que sur l'actualité de l'Église et du Monde.
