Lutte contre le narcotrafic : le port de plaisance de La Rochelle alerte sur le flou entretenu par la loi
En réponse à un amendement de la loi contre le narcotrafic, le conseil d'administration du port de plaisance de La Rochelle a émis une motion le 10 juin dernier. Il y exprime "ses plus vives inquiétudes" vis-à-vis du texte. On en parle avec Christelle Andrieux, vice-présidente du conseil d'administration du port de plaisance.
Christelle Andrieux est vice-présidente du port de plaisance de La Rochelle. @RCF17Le 13 juin, la loi contre le narcotrafic a été promulguée. Et elle inclut un amendement du député de Charente-Maritime Olivier Falorni (Les Démocrates) pour associer les ports de plaisance à ce combat. Le but, que les ports de plaisance hébergent une plateforme où les plaisanciers déclarent leur identité et celle de l’équipage.
Mais du côté du port de plaisance de La Rochelle, cette disposition passe mal. Le conseil d’administration a en effet publié une motion le 10 juin dernier où il s’inquiète du texte de loi, dont les modalités doivent être encadrées par des décrets. On en parle avec notre Invitée Région du 18 juin : Christelle Andrieux, la vice-présidente du conseil d’administration du port de plaisance de La Rochelle.
RCF : Quel est le but de cette motion ?
Christelle Andrieux : Le président Christian Marbach a souhaité que nous réagissions à l'annonce de ces contrôles qui devraient être faits dans les ports. On se trouve à une interface de compétences où ce n'est pas forcément le personnel du port qui pourrait être en capacité de contrôler qui que ce soit. Il y a eu des expériences où on nous a demandés d'arrêter d'envoyer des noms parce que cela ne correspondait pas au RGPD. Il y a quelque chose à clarifier et, quand le port reçoit les arrivants l'été, ils sont accueillis, on leur demande le nom du bateau et leurs noms, mais pas du tout celui de l'équipage. Chaque jour, il y a 100 bateaux extérieurs qui arrivent et nous avons six postes de saisonniers, occupés 24h/24. Rajouter cette mission qui serait obligatoire impacterait énormément toute cette organisation.
Parallèlement à cela, le président a voulu réagir en tant que marin : pour les plaisanciers, la mer est un plaisir, une façon de vivre, une liberté. On est habitués quand on sort de l'espace Schengen à subir des contrôles, mais à l'intérieur, c'était un grand confort. C'est aussi une nouvelle façon de faire.
RCF : Très concrètement, que prévoit le texte pour les ports de plaisance ?
La loi a été votée, maintenant il faut des décrets d'application. Aujourd'hui, j'ai surtout lu des contraintes financières au cas où les choses ne seraient pas faites, et pas tellement d'explications sur comment faire les choses. Pour moi, il y a une limite entre les compétences de chacun : le personnel du port de plaisance n'a pas de compétences de police, c'est la compétence de la mairie. Donc quel pouvoir vont avoir les stagiaires ou le personnel du port pour recueillir ces informations et les transmettre ? C'est une de nos questions, même si c'est évident qu'il y a des choses à mettre en place contre le narcotrafic.
RCF : Qu'est-ce que vous réclamez réellement avec cette motion ?
On a été très étonnés qu'il n'y ait pas eu plus de concertation, on a découvert un peu le texte comme cela. Je sais que c'est également ce que les maires des communes littorales ont exprimé. Au niveau des ports, comment est-ce possible ? Comment on peut s'organiser ? Quels moyens ? C'est là-dessus qu'on va demander des outils adaptés, des moyens financiers, et que les choses soient bien claires sur la responsabilité de chacun. Il y a beaucoup de choses à clarifier.
RCF : Une expérimentation de collecte des données avait cependant déjà été mise en place en 2024 au niveau du port de plaisance de La Rochelle.
C'est exact. Il y a eu tout un travail qui a été fait avec les douanes, où il était demandé aux arrivants d'aller sur le site du port et de se déclarer. C'était directement envoyé aux douanes, il fallait donner le nom du skipper et autres, mais il n'y avait pas de contrôles et le personnel du port n'était absolument pas impliqué là-dedans.
RCF : La différence majeure avec la nouvelle loi, c'est que les équipes du port doivent être impliquées dans la collecte ?
Le préfet de Charente-Maritime Brice Blondel a parlé dernièrement de mise en place d'une plateforme. Aujourd'hui, dans la loi, il est plutôt dit que cela serait de la responsabilité de la police portuaire ou des ports de faire quelque chose. C'est sans doute tout cela qui est à revoir parmi les décrets pour clarifier les choses en fonction des compétences et des responsabilités de chacun.


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