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Les paysages sonores, un héritage immatériel à protéger

Les paysages sonores, un héritage immatériel à protéger

Un article rédigé par Melchior Gormand - RCF, le 22 septembre 2025 - Modifié le 22 septembre 2025
Je pense donc j'agisSons de nos villes et villages : pourquoi nous y sommes attachés

Le tintement d’une cloche, le brouhaha d’un marché, le chant des oiseaux au petit matin… Ces sons, souvent anodins, façonnent l’identité de nos villes et de nos villages. 

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Loin d’être de simples bruits de fond, ils constituent un véritable patrimoine immatériel auquel les habitants se disent profondément attachés. "Les paysages sonores sont comparables à une respiration commune", souligne Didier Blanchard, acousticien spécialisé dans l’étude des environnements sonores. Pour lui, la disparition d’un son familier, comme celui d’une cloche arrêtée ou du silence soudain d’un bistrot fermé, laisse un vide que les habitants ressentent immédiatement.

Des repères sensoriels qui rythment nos vies

Chaque son du quotidien participe à la construction de notre mémoire individuelle et collective. Les cloches d’une église, par exemple, ne se contentent pas de marquer l’heure : elles structurent le temps, annoncent les fêtes, accompagnent les célébrations. Dans les villages, elles étaient autrefois le principal moyen de communication sonore, et leur rôle symbolique demeure très fort. 

De la même façon, le murmure d’une fontaine ou les couverts d’un bistrot animé s’impriment dans la mémoire des habitants et deviennent des points d’ancrage. "Quand un paysage sonore change, les habitants ont parfois l’impression que c’est toute leur identité locale qui s’efface", observe Didier Blanchard. Ces sons deviennent ainsi des repères affectifs, comparables à des madeleines de Proust auditives.

Entre nuisances et héritage : un équilibre fragile

Pourtant, tous les sons ne sont pas perçus de la même manière. Certains habitants dénoncent des nuisances : cloches jugées trop sonores, cris d’animaux, terrasses animées jusque tard dans la nuit. Les litiges liés au bruit ne cessent de croître, au point que plusieurs maires ont dû intervenir pour défendre le patrimoine sonore de leur commune.

Ces controverses posent une question de fond : comment distinguer nuisance et héritage ? "Le problème, c’est que ce qui fait patrimoine pour les uns peut être considéré comme une gêne pour les autres", explique Didier Blanchard. "L’enjeu n’est pas de supprimer ces sons, mais de trouver un équilibre pour qu’ils restent vivants sans dégrader la qualité de vie".

Préserver et réinventer le paysage sonore de demain

À l’heure où les villes se transforment avec l’essor des mobilités douces et la baisse du trafic routier, de nouveaux paysages sonores émergent. Le silence relatif des centres-villes piétonnisés met en valeur d’autres sons : le chant des oiseaux, le bruissement des feuilles ou encore le clapotis des fontaines.

Les chercheurs et urbanistes réfléchissent à la manière de préserver cet héritage sonore tout en s’adaptant aux attentes contemporaines. Certaines initiatives visent à créer des cartographies sonores ou à enregistrer des sons emblématiques afin de constituer une mémoire numérique accessible aux générations futures. "Nous devons apprendre à écouter nos villes et nos villages autrement", insiste Didier Blanchard. "Les sons positifs, comme les pas sur le gravier ou le vent dans les arbres, méritent d’être valorisés, tandis que les pollutions sonores doivent être maîtrisées", ajoute-t-il.

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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