« L’empreinte belge » ferme ses portes à Namur et Dinant : dix ans d’aventure au service des créateurs locaux
Après une décennie à mettre en lumière des centaines de créateurs locaux, les magasins « L’empreinte belge » de Namur et Dinant tirent leur révérence. Leur fondatrice, Héloïse Richard, revient sur cette expérience unique, ses joies, ses difficultés, et esquisse l’avenir d’un projet qui ne disparaît pas tout à fait.
©L'empreinte BelgeEn 2015, Héloïse Richard, alors issue du monde de la publicité, décide de changer de cap. « Dans mon métier, je devais souvent dire non à des petits créateurs qui n’avaient pas les moyens de se payer une campagne publicitaire. J’ai eu envie de leur donner une chance autrement », raconte-t-elle.
De cette réflexion naît « L’empreinte belge », une boutique atypique installée rue Godfroid à Namur, avant de déménager rue des Carmes trois ans plus tard. Un quartier connu pour ses commerces indépendants et son esprit circuit court.
L’idée : créer une véritable « caverne d’Ali Baba » pour artisans et designers. Tous les trois mois, la boutique changeait intégralement de visage pour accueillir une nouvelle sélection de créateurs venus des quatre coins de la Belgique. « Cela permettait de mettre en valeur un maximum de talents », souligne la fondatrice. À son apogée, pas moins de 216 créateurs étaient représentés par trimestre.
Fort du succès namurois, « L’empreinte belge » ouvre une seconde adresse en 2022, cette fois à Dinant. Avec une particularité : proposer uniquement des produits issus de créateurs de la région dinantaise ou de ses environs immédiats.
« L’idée était d’aller encore plus loin dans le circuit ultra-court, et de renforcer le lien entre les habitants et les artisans de leur propre territoire », précise Héloïse Richard.
Plus qu’un magasin : une aventure humaine
Derrière les murs, « L’empreinte belge » était bien plus qu’un espace de vente. « C’était un lieu de vie, de rencontres, d’échanges entre créateurs et clients », explique la fondatrice.
Les visiteurs venaient y chercher bien plus qu’un produit : une histoire, une démarche, une relation humaine. « Les clients savaient qu’en achetant ici, ils soutenaient directement une personne, pas une machine, pas une multinationale. »
L’expérience a profondément marqué Héloïse Richard : « Ce que je retiens, c’est la bienveillance des gens. »
Pourquoi fermer après dix ans ?
La décision de mettre un terme à cette aventure n’a pas été simple. Mais au fil des années, les obstacles se sont accumulés.
La crise sanitaire d’abord : déclarés « non essentiels », les magasins de créateurs ont souffert d’une visibilité réduite, tandis que le réflexe d’achat en ligne s’est renforcé. « Pendant le covid, commander sur internet est devenu encore plus facile et moins cher. Ce réflexe est resté », déplore Héloïse Richard.
À cela s’ajoutent d’autres freins bien connus des commerçants de centre-ville : le coût des parkings, la hausse générale du coût de la vie, les travaux à Namur qui compliquent l’accès. « Tout cela mis bout à bout, c’est devenu lourd. Je suis fatiguée de ramer dans un sens où il y a de moins en moins de convaincus », avoue-t-elle avec franchise.
La fondatrice parle de cette fermeture avec un mélange de regret et de fierté. « Je suis déçue de devoir mettre fin au projet, mais « L’empreinte belge » était une chouette histoire, une histoire remplie de sens. »
Au bout de dix ans, je laisse ma place. Et Dieu sait qu’il y a de la place à prendre pour celles et ceux qui veulent continuer à se battre pour le commerce local.
Le commerce local face à ses défis
Pour Héloïse Richard, la situation de Namur n’est pas un cas isolé. Les commerces de proximité doivent sans cesse se réinventer pour exister.
Acheter sur internet est facile. Alors si on veut que les gens franchissent la porte d’une boutique, il faut leur offrir une expérience différente, humaine, chaleureuse. Il faut une plus-value, sinon personne ne viendra.
Ce constat, partagé par de nombreux commerçants, illustre les défis que connaissent les centres-villes wallons, pris en étau entre le poids du e-commerce et le coût de la vie.
Une page se tourne, mais l’histoire continue
La fermeture des magasins de Namur et Dinant ne signifie pas la disparition du projet. « L’empreinte belge » va désormais se décliner autrement, à travers des événements ponctuels : marchés de créateurs, marchés du terroir, brocantes de l’illustration, un domaine cher au cœur de la fondatrice.
Ce format plus souple permettra à Héloïse Richard de souffler. « J’ai besoin de retrouver un peu de sérénité et de calme avant de reprendre mon bateau et de retraverser des tempêtes ».
Pour l’heure, aucun autre projet concret n’est prévu. Après une décennie intense, la priorité est de prendre du recul et du repos. Mais une chose est sûre : « L’empreinte belge » continuera de vivre encore un peu, sous une autre forme mais fidèle à son ADN : mettre en lumière la créativité locale.


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