Le message du pape à l'occasion du 80ème anniversaire du Débarquement en Normandie

Un article rédigé par Amélie Gazeau - RCF, le 5 juin 2024 - Modifié le 6 juin 2024

À la veille du 80ème anniversaire du débarquement des alliés sur les plages normandes, le pape François a souhaité adresser un message à l'évêque de Bayeux et Lisieux, Monseigneur Habert et à tous les fidèles présents. Le souverain pontife appelle ces derniers à prier "pour les artisans de Paix", "pour les victimes de la guerre" mais aussi "pour les hommes qui veulent la guerre". Un court texte à retrouver en intégralité dans notre article.

Le pape François déambulant dans sa papamobile à Rome en juin 2024©Alessandro Sardo - Communication du VaticanLe pape François déambulant dans sa papamobile à Rome en juin 2024©Alessandro Sardo - Communication du Vatican

La France commémore le 6 juin 2024, le 80ème anniversaire du débarquement en Normandie. L'occasion pour le pape de rappeler les dégâts humains de la Deuxième Guerre mondiale. Mais aussi de souligner à quel point la paix peut être fragile, surtout aujourd'hui. 

Les Églises anglicane et catholique réunies pour une célébration œcuménique pour la paix 

Le 5 juin à 17h le Nonce apostolique de France, Monseigneur Celestino Migliore a lu le message du pape aux fidèles présents à Bayeux, en Normandie. Cette déclaration a eu lieu en amont de la cérémonie franco-britannique et œcuménique célébrée à 18:00 à la cathédrale Notre-Dame de Bayeux. Une déclaration du président de la Conférence des évêques de France (CEF), Monseigneur Eric de Moulins-Beaufort était également prévue. La célébration œcuménique était présidée par Monseigneur Jacques Habert, évêque de Bayeux et Lisieux. 

Certains membres de la famille royale britannique, comme la princesse Anne, étaient présents à la célébration, ainsi que les ambassadeurs de Grande-Bretagne, d'Australie, de Nouvelle-Zélande et du Canada. La présence d'officiels français n'a pas été communiquée.

Priez pour les hommes qui veulent la guerre, ceux qui les déclenchent, les attisent de manière insensée, les entretiennent et les prolongent inutilement, ou en tirent cyniquement profit.

Le pape exhorte chacun à prier pour "les hommes qui veulent la guerre"

Dans son message, lu par le représentant du Vatican en France, Monseigneur Celestino Migliore, le pape François invite l'assemblée à se souvenir des milliers de vies fauchées durant la guerre de 1939-1945. Sans oublier les dégâts matériels colossaux qui ont touché les villes françaises lors du débarquement comme Caen, Le Havre, Cherbourg et d'autres.

Le Saint Père rappelle au combien la paix est fragile et la guerre condamnable en reprenant les mots de Paul VI à la tribune de l'ONU le 4 octobre 1945 : "Plus jamais ça !". Au regard des tensions internationales actuelles, il nous invite à ne pas avoir "la mémoire courte" en ayant "la ferme volonté de tout mettre en œuvre pour éviter qu'un nouveau conflit mondial ouvert se produise".

Le pape François invite également chacun des fidèles, présents ou non, à prier en premier lieu pour "les hommes qui veulent la guerre, ceux qui les déclenchent, les attisent de manière insensée, les entretiennent et les prolongent inutilement, ou en tirent cyniquement profit." En ajoutant : "Que Dieu éclaire Ieurs cœurs, qu'll mette devant leurs yeux le cortège de malheurs qu'ils provoquent !". Avant d'exhorter à prier pour "les artisans de Paix" et toutes "les victimes de guerre". Un message qui nous invite à prendre conscience de l'Histoire pour ne pas reproduire les erreurs du passé.

De gauche à droite, Monseigneur Jacques Habert, évêque de Bayeux et Lisieux, le Nonce apostolique en France, Son Excellence Mgr Celestino Migliore et Monseigneur Eric de Moulins-Beaufort quelques minutes avant la célébration oécuménique à Bayeux.

 

Le message du pape en intégralité


« À Son Excellence Monseigneur Jacques Habert
Évêque de Bayeux et Lisieux

Je suis heureux de m'unir, par la pensée et la prière, à tous ceux qui sont réunis en cette cathédrale de Bayeux pour commémorer le 80ème anniversaire du débarquement des forces alliées en Normandie. Je salue toutes les Autorités civiles, religieuses et militaires présentes.


Nous avons en mémoire le souvenir de ce colossal et impressionnant effort collectif et militaire accompli pour obtenir le retour à la liberté. Et nous pensons aussi à ce que cet effort a coûté : ces cimetières immenses où s'alignent par milliers les tombes de soldats — très jeunes pour la plupart, et, pour beaucoup, venus de loin — qui ont héroïquement donné leur vie, permettant ainsi la fin de la Seconde Guerre Mondiale et le rétablissement de la paix, une paix qui — du moins en Europe — aura duré près de 80 ans.

Le débarquement présente également à l'esprit, suscitant l'effroi, l'image de ces villes de Normandie complétement dévastées : Caen, Le Havre, Saint-Lô, Cherbourg, Flers, Rouen, Lisieux, Falaise, Argentan... et tant d'autres ; et nous voulons faire mémoire des innombrables victimes civiles innocentes et de tous ceux qui ont souffert de ces terribles bombardements.


Mais le débarquement évoque, plus généralement, le désastre qu'a représenté cet épouvantable conflit mondial où tant d'hommes et de femmes, d'enfants, ont souffert, tant de familles ont été déchirées, tant de ruines ont été provoquées. Il serait inutile et hypocrite d'en faire mémoire sans le condamner et le rejeter définitivement ; sans renouveler le cri de Saint Paul VI à la tribune de l’0NU, le 4 octobre 1965 : Plus jamais la guerre ! Si, durant plusieurs décennies, le souvenir des erreurs du passé a soutenu la ferme volonté de tout mettre en œuvre pour éviter qu'un nouveau conflit mondial ouvert se produise, je constate avec tristesse qu'il n'en est plus de même aujourd'hui et que les hommes ont la mémoire courte. Puisse cette commémoration nous aider à nous la faire retrouver !


Il est inquiétant, en effet, que l'hypothèse d’un conflit généralisé soit parfois de nouveau sérieusement prise en considération, que les peuples soient peu à peu familiarisés à cette éventualité inacceptable. Les peuples veulent la paix ! Ils veulent des conditions de stabilité, de sécurité et de prospérité où chacun puisse accomplir sereinement son devoir et sa destinée. Ruiner ce noble ordre des choses pour des ambitions idéologiques, nationalistes, économiques est une faute grave devant les hommes et devant l'histoire, un péché devant Dieu.

Ainsi, Excellence, je souhaite m'unir à votre prière et à celle de tous ceux qui sont réunis dans votre Cathédrale :


Prions pour les hommes qui veulent les guerres, ceux qui les déclenchent, les attisent de manière insensée, les entretiennent et les prolongent inutilement, ou en tirent cyniquement profit. Que Dieu éclaire Ieurs cœurs, qu'll mette devant leurs yeux le cortège de malheurs qu'ils provoquent !


Prions pour les artisans de paix. Vouloir la paix n'est pas une lâcheté, elle demande au contraire le plus grand courage, le courage de savoir renoncer à quelque chose. Même si le jugement des hommes est parfois sévère et injuste envers eux, « les artisans de paix seront appelés fils de Dieu » (H£ 5, 9). Que, s'opposant aux logiques implacables et obstinées de l'affrontement, ils sachent ouvrir des chemins pacifiques de rencontres et de dialogue. Qu'ils persévèrent inlassablement dans leurs démarches et que leurs efforts soient couronnés de succès.


Prions enfin pour les victimes des guerres ; les guerres du passé comme les guerres présentes. Que Dieu accueille auprès de Lui tous ceux qui sont morts dans ces terribles conflits, qu'Il vienne au secours de tous ceux qui en souffrent aujourd'hui ; les pauvres et les faibles, les personnes âgées, les femmes et les enfants sont toujours les premières victimes de ces tragédies.


Que Dieu ait pitié de nous ! Invoquant la protection de Saint Michel, Patron de la Normandie, et 1'intercession de la Sainte Vierge Marie, Reine de la Paix, j'accorde de grand cœur, à chacun, ma Bénédiction."
 

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