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"Le Dieu auquel je crois est celui des victimes"

RCF,  - Modifié le 27 mars 2019
Véronique Margron revient sur les abus sexuels dans l'Eglise et les critiques lancées contre l'institution, mais aussi contre ceux qui pointent du doigt ses faiblesses.
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En faisons-nous trop ? Ne finissons-nous pas par participer nous-mêmes au dénigrement de l’Église, à force de parler, de semaine en semaine, de la crise où elle se trouve à cause des crimes commis en son sein, des dénis et des complicités qui les ont longtemps couverts.

Nombre me disent, "mais il y a tant de gens magnifiques dans l’Église, de générosité, de solidarité envers des plus fragiles, de prêtres magnifiques et donnés, d’évêques engagés, de force aussi de la prière silencieuse, discrète…" Tout cela, et bien davantage, j’en suis non seulement totalement convaincue, mais j’en suis le témoin tous les jours, souvent émerveillée, toujours remplie de gratitude envers ces vies authentiques.
 
Et c’est bien parce que j’en suis convaincue que je ne peux détourner le regard ni l’attention du lieu du drame. Car le Dieu auquel je crois, que proclame l’Église, est le Dieu des victimes. Le Dieu qui a renoncé à sa puissance au profit de son compagnonnage humble et déterminé afin de combattre la fatalité de l’histoire. "Seul un Dieu faible peut nous venir en aide", écrivait Dietrich Bonhoeffer, martyr de la résistance allemande, exécuté à 39 ans.

Mon Dieu est celui qui prend la cause de la douleur des hommes. De toutes les douleurs. Dont ces douleurs de femmes et d’hommes dont l’enfance, la confiance furent brisées, trahies par ceux qui se réclamaient du pouvoir de Dieu. De ceux qui au nom de Dieu, ont combattu le Dieu des pauvres en le trahissant. Ces pauvres, ces victimes sont dans le cœur battant du Christ, et donc doivent l’être de son Église.
 
Alors oui, il faut demeurer encore. Pour se faire les modestes compagnes et compagnons de ces souffrants, et à travers eux du peuple des humiliés. Demeurer là pour penser, avec un a comme avec e. Pour rompre le silence et empêcher qu’il revienne. Pour écouter jusqu’aux entrailles. Demeurer là, pour pas à pas engager, avec d’autres, les transformations nécessaires. Non seulement mon Église le doit, mais le peut. Sa capacité à se transformer est dans son identité même, elle qui est née d’une crise, celle d’un Dieu très bas dont elle a fait sa seule raison d’être.

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