Vendée
On l’appelle l’Everest des mers : le départ du Vendée Globe sera donné dimanche, à 13h02 précisément, depuis les Sables-d’Olonne. C’est la course à la voile en solitaire la plus difficile. Imaginez : un tour du monde, sans escale, sans assistance, en passant par trois caps : Bonne-Espérance en Afrique du Sud, Leeuwin en Australie et Horn au bout de l’Amérique du Sud… C’est ce qui attend les 40 skippers, dont 6 femmes, engagés dans ce 10e Vendée Globe.
Ils auraient pu être plus nombreux, mais l’organisation a décidé de limiter le nombre de marins autorisés à s’élancer autour du monde.
Le Vendée Globe est très convoité, tant par les skippers que par le public. Depuis l’ouverture du village de la course le 19 octobre, il ne désemplit pas. Alain Leboeuf, président du Vendée Globe, souligne l’engouement du public pour l’événement cette année : "On avait du mal à estimer précisément l’affluence. Nous sommes probablement en train de dépasser toutes nos projections."
C’est un travail souvent dans l’ombre, mais central en termes sportifs et réglementaires
Jamais il n’y a eu autant de skippers au départ du Vendée Globe : ils sont 40 cette année. L’équipe de la direction de course s’est étoffée pour l’occasion, avec cinq personnes veillant sur les skippers pendant toute la durée de la course. Parmi eux, Hubert Lemonnier, le directeur de course : "C’est un travail souvent dans l’ombre, mais central en termes sportifs et réglementaires. Notre rôle est d’assurer la sécurité des bateaux et des marins, du premier au dernier. Nous recevons les positions des bateaux toutes les 30 minutes et vérifions que leur cap et leur vitesse restent cohérents avec l’objectif. En cas d’avarie d’un bateau qui ne pourrait pas nous prévenir, il est essentiel que nous puissions réagir rapidement pour assurer sécurité et coordination en cas de sauvetage." Hubert Lemonnier, qui était directeur de course adjoint lors du dernier Vendée Globe, a participé à distance au sauvetage de Kévin Escoffier, dont le bateau s’était coupé en deux avant de sombrer. Il avait été récupéré par un autre concurrent, Jean Le Cam, un sauvetage qui avait marqué le grand public.
C’est Yannick Bestaven qui a remporté la dernière édition, bien qu’il n’ait pas été le premier à franchir la ligne d’arrivée. Il avait bénéficié d’une compensation pour avoir participé aux recherches de Kévin Escoffier. Charlie Dalin, qui avait coupé la ligne en premier, a longtemps repensé à cette deuxième place : "J’ai accepté tout de suite, mais cela n’a pas été facile à digérer pour autant. Le jour de l’arrivée, j’étais extrêmement heureux d’avoir terminé mon premier Vendée Globe, d’avoir bouclé un tour du monde, franchi le Cap Horn… Mais en rentrant chez moi, quand tout a commencé à retomber, j’ai réalisé que j’avais raté la victoire du Vendée Globe pour 2h15. Sur 80 jours, c’est peu."
Nous savons qu’il faut aussi un peu de réussite dans la technique, dans les éventuelles collisions, dans le choix stratégique météo. Ce qui comptera, c’est de livrer une belle course malgré nos erreurs
Charlie Dalin repart cette année avec un bateau neuf. Il est parmi les favoris, tout comme Yoann Richomme, qui participe à son premier Vendée Globe, mais a remporté deux transatlantiques en moins d’un an. "L’objectif est de gagner, mais nous saurons nous satisfaire d’un autre résultat aussi. Nous ne sommes pas jusqu’au-boutistes. Nous savons qu’il faut aussi un peu de réussite dans la technique, dans les éventuelles collisions, dans le choix stratégique météo. Ce qui comptera, c’est de livrer une belle course malgré nos erreurs."
Si cette course est avant tout une compétition, elle offre aussi de belles rencontres. Le milieu de la voile est petit, et les skippers se retrouvent souvent sur différentes courses. Certains s’entraînent ensemble, ou rachètent les bateaux d’autres… C’est ainsi que Violette Dorange, la benjamine de la course, âgée de 23 ans, partira dimanche avec l’ancien bateau de Jean Le Cam, doyen de la course à 65 ans, qui s’élance pour un sixième Vendée Globe. "Jean Le Cam, c’est typiquement la personne qui m’a dit dès la première navigation : "Allez, Violette, tu fais le virement toute seule, je te regarde, t’inquiète, tu es capable de le faire." J’ai une petite mascotte, une peluche pingouin que Jean m’a donnée. Elle est dans mon bateau. Je me dis qu’il m’accompagne aussi dans cette aventure et qu’il faut que j’aille jusqu’au bout pour cette peluche," confie Violette Dorange.
Il faut espérer de l’aide de quelqu’un, de quelque chose, c’est important
La course au large revêt une forte dimension spirituelle. Une messe sera organisée demain pour les skippers aux Sables-d’Olonne. À cette occasion, ils recevront une sportelle, petite réplique de la Vierge de Rocamadour. Nombre d’entre eux prient lorsqu’ils affrontent les tempêtes. Bertrand de Broc, participant à trois éditions du Vendée Globe, témoigne : "On se raccroche à quelque chose ou à quelqu’un. On parle à je-ne-sais-pas-qui, en disant "Il faut me filer un petit coup de main, parce que là, je ne vais pas m’en sortir." Il faut espérer de l’aide de quelqu’un, de quelque chose, c’est important." Bertrand de Broc ne participe pas au Vendée Globe cette année, mais pour encourager les 40 skippers, rendez-vous dimanche à 13h02 pour le départ de ce tour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance.
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