Il y a presque 10 ans, le 30 octobre 2009, on apprenait la mort de l’anthropologue et philosophe, Claude Lévi-Strauss. On connaît tous ses travaux sur les mythes, les systèmes de parenté, les structures et les expériences sensorielles des peuples, qui s’articulent autour de grandes oppositions, comme… Comme le cru et le cuit…
Le cru et le cuit, le vide et le plein, l’inclus et l’exclu. Mais Claude Lévi-Strauss s’est aussi beaucoup interrogé sur la notion de progrès. S’il affirme que « rien n’est joué », que « nous pouvons tout reprendre », il souligne néanmoins que le « progrès n’est ni nécessaire, ni continu ». L’humanité, selon lui, n’avance pas comme un homme gravissant pas à pas les marches d’un escalier. Elle progresse par sauts, par bonds, jamais dans le même sens, jamais dans la même direction.
L’histoire de l’humanité n’est pas une ligne droite. Elle ressemble plus à l’éparpillement de dés, jetés sur un tapis de jeu. Lévi-Strauss n’a d’ailleurs pas hésité à esquisser le portrait de ce que pourrait être l’humanité de demain.
Et à quoi ressemblera donc cette humanité de demain, ou d’après-demain ? Avant tout, elle sera végétarienne. Un jour viendra, prophétise Lévi-Strauss, « où l’idée que, pour se nourrir, les hommes élevaient et massacraient des êtres vivants », cette idée « inspirera la même répulsion qu’aux voyageurs du XVIe siècle les repas cannibales des sauvages américains, océaniens ou africains ». Nos descendants seront donc offusqués de nos habitudes carnivores, de nos abattoirs et de nos élevages industriels.
L’humanité ne sera plus cannibale, et elle sera entièrement citadine. Nos campagnes, prophétise encore Lévi-Strauss, seront désertées et retourneront à une forme de « sauvagerie », où s’expérimenteront « les plus étranges genres de vie ». Il nous reste encore quelques heures avant ce grand chamboulement des villes et des campagnes, du cru et du cuit, du végétarisme et du cannibalisme.
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