L'amiral Bernard Rogel, un marin à l'Elysée
Pister des sous-marins russes pendant la guerre froide, commander un sous-marin nucléaire à l’âge de 34 ans et participer au plus près à la dissuasion nucléaire. Voilà quelques-unes des missions accomplies par l’amiral Bernard Rogel en tant que chef d’état-major de la marine d’abord, puis comme chef d’état-major particulier des présidents de la république François Hollande et Emmanuel Macron durant son premier mandat… Il raconte cette vie intense au plus près de l’histoire, dans son livre intitulé « Un marin à l’Elysée », aux éditions Tallandier.
Issu d’une famille modeste, il a franchi « l’escalier social » pour devenir l’un des personnages les plus puissants de l’armée française. L’amiral Bernard Rogel en est lui-même conscient : « c’est le parcours extraordinaire d’un homme ordinaire » permis grâce au dur travail. Un travail qui lui a ouvert les portes de la prestigieuse école navale. Et s’il a choisi la Marine, c’est parce que ce natif de Brest a toujours « été attiré par la mer ». « J’avais à la fois le désir de rêves, de nouvelles conquêtes, mais aussi de servir les autres et finalement c’est ce qui m’a guidé tout au long de ma vie », affirme-t-il.
20.000 lieues sous les mers
Sa passion et sa force de travail vont l’emmener dans les pas de son frère aîné : dans un sous-marin à 2000 nœuds sous la mer. Et il garde des souvenirs mémorables de son premier stage au cœur de ce mastodonte des mers : « j’ai été tout de suite conquis par la patte humaine des sous-marins. Plus que sur un bateau, vous dépendez de tout le monde parce qu’il y a une notion de sécurité très importante. Donc ce respect, cette confiance en l’autre, cet esprit d’équipage, il est particulièrement fort sur les sous-marins », sourit-il.
Petit à petit, l’amiral Bernard Rogel a monté les échelons dans ce monde à part, coupé du reste du monde tant au niveau de la localisation que de la communication. Jusqu’à contrôler l’un des quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, qui a pour vocation de transporter des missiles de dissuasion. « C’est l’objet le plus complexe que l’homme a inventé, dit-il empreint de fascination, ça comporte un réacteur nucléaire, une centrale nucléaire, une base de lancement spatiale. C’est une ville et tout ça évolue à plusieurs centaines de mètres de profondeur ». Mais même à la tête de ces sous-marins armés jusqu’aux dents, l’ancien chef d’Etat-major de la Marine a toujours gardé son sang-froid. « On ne se dit tous les 4 matins qu’on va appuyer sur le bouton, mais on est prêt », assure-t-il avec sérénité et guidé par « la certitude que c’est bien de défendre la paix ».
L’oreille stratégique des présidents
Du galon, l’amiral Bernard Rogel en a pris aussi en devenant chef d’état-major particulier, autrement dit conseiller des présidents de la République en matière de défense et de sécurité. Ce rôle de « traducteur du politique vers le militaire, et inversement », il l’a tenu d’abord en tant qu’adjoint sous Jacques Chirac puis pleinement auprès de François Hollande et d’Emmanuel Macron, lors de son premier mandat. Jour et nuit, il a travaillé auprès du chef de l’Etat, le voyant parfois plusieurs fois dans une seule journée et participant à toutes les réunions et visites ayant trait à l’international « parce qu’il y a toujours un sujet de défense ou de sécurité ». Un engagement permanent qui l’a même poussé à acquérir un lit de camp pour camper dans son bureau lors de périodes de crises.
Attaché à travailler dans une « relation de confiance et de totale franchise » avec les différents chefs de l’Etat qu’il a accompagné, l’amiral Bernard Rogel a toujours mis un point d’honneur à tout leur dire. « Je ne pouvais pas imaginer travailler autrement. Dans ce domaine au plus près de la sécurité de nos compatriotes et de la survie de la nation, on ne peut pas faire des circonvolutions ou se taire […] Il faut que le président accepte d’entendre ce que parfois il n’a pas envie d’entendre », estime-t-il. Une façon d’être et d’échanger constante, et ce en dépit même des orientations politiques des présidents. « La sensibilité politique n’a rien à voir là-dedans. Notre seule préoccupation c’est la défense des citoyens », insiste-t-il.
Il faut que le président accepte d’entendre ce que parfois il n’a pas envie d’entendre
Aujourd’hui retiré de la vie militaire, l’amiral Bernard Rogel poursuit son engagement pour la maritimisation du monde et de la France, qui n’est autre que la deuxième zone maritime mondiale. Après des mois et des mois passés en mer, sous les mers ou dans son bureau de l’Elysée, il se consacre désormais à sa famille « extrêmement soudée » qui a longtemps été son « refuge » entre deux missions. Enfin, il n’oublie pas son rôle de transmission auprès des jeunes lors d’interventions dans les lycées et à l’université, mais aussi au travers de son dernier livre autobiographique donc. Un livre où il dévoile les coulisses de la Marine nationale, sans jamais outrepasser son devoir de réserve, valable jusqu'à sa mort.
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