L'alpiniste Constance Schaerer rend hommage à son père dans son premier roman
Constance Schaerer, la plus jeune française à avoir atteint l'Everest, a publié son premier roman "Tu reposeras sur les plus hauts sommets du monde papa". Pour honorer les dernières volontés de son père, cette alsacienne de 26 ans a entrepris de gravir les plus hauts sommets de chaque continent.
Constance Schaerer InstagramRCF : Constance Schaerer, on vous rencontre à l'occasion de la sortie de votre livre "Tu reposeras sur les plus hauts sommets du monde Papa". Ça sort aux éditions Fayard et ça raconte tout votre parcours, toute votre histoire. Pour commencer un peu à raconter le point de départ de ce livre, il faut rappeler votre histoire. Votre père décède d'un cancer du pancréas en 2007. Vous avez alors neuf ans et quelques temps plus tard, vous découvrez qu'il a laissé une lettre dans laquelle il donne certaines indications. Que dit cette lettre ?
Constance Schaerer : Effectivement, j'ai retrouvé une lettre écrite par mon papa il y a quatre ans pour sa cérémonie d'enterrement. Il explique qu'il souhaite que ses cendres soient dispersées sur les sept sommets, donc le plus haut sommet de chaque continent. Je ne connaissais pas ce challenge à l'époque mais il est connu des alpinistes, moins du grand public.
RCF : Ce livre qu'est ce que c'est pour vous ? C'est un témoignage ? Un journal intime ? Une lettre pour répondre à celle que votre père vous a laissée ?
C.S. : C'est pour résumer, pour avoir ses écrits et qu'ils restent pour toujours. C'était son projet d'écrire un livre pour les personnes atteintes de cancer et il avait déjà commencé à le faire.
C'était important pour moi de pouvoir aller au bout de ce livre et que ses mots soient écrits dans le papier pour toujours.
Pour [lui rendre] hommage et qu'on se rappelle de lui, de notre nom de famille. Et après, c'est évidemment aussi pour tous les enfants qui ont vécu la même chose que moi donc la maladie d'un parent et la perte d'un parent. L'association [7 sommets contre la maladie, dont Constance Schaerer est la fondatrice], [existe] pour les enfants qui ont perdu un parent d'un cancer et pour pouvoir aider les familles du mieux possible avec ce que moi j'ai vécu enfant.
RCF : Accomplir les dernières volontés de votre père, ce n'est pas évident. Cela ne fait pas partie de vos plans de vie lorsque vous découvrez cette lettre mais vous finissez par vous lancer. Vous commencez par le Kilimandjaro en Afrique du Sud. Pouvez-vous nous parler de l'ascension de ce premier sommet ?
C.S. : Quelques semaines après avoir découvert la lettre, j'ai [gravi] mon premier sommet. Ce n'était pas du tout prévu. Je partais en voyage humanitaire à une heure de ce sommet et je me suis dit "ça ne peut pas être un hasard, c'est forcément un signe de mon papa". Et donc j'ai tenté cette ascension sans trop savoir si ça allait bien se passer. Parce qu'on ne sait jamais trop comment les choses peuvent évoluer en altitude. Et puis finalement j'ai réussi à atteindre le sommet sans trop de difficulté ! Après pleins d'autres signes sont arrivés sur mon chemin qui m'ont donné envie de continuer et surtout de créer mon association.
RCF : Vous parlez beaucoup de ces signes dans le livre. Pour vous, c'est quelque chose d'important ?
C.S. : En fait, avant de décéder, on avait eu des longs échanges par rapport à la mort et à ce qui allait se passer après. Il m'avait toujours dit qu'il serait encore là, jamais loin de moi et qu'il m'enverrait des signes. Qu'il fallait que je sois capable de les entendre et de les écouter. Et c'est ce que j'ai essayé de faire depuis qu'il est parti. Heureusement qu'il me l'a dit.
RCF : Depuis le Kilimandjaro, vous avez gravi le Mont Blanc (4800 mètres d'altitude), l'Aconcagua en Argentine (6962m), le Denali en Alaska (6190m) et l'Everest en mai dernier (8848m). Vous êtes plus qu'à mi-parcours du défi que vous a, en quelque sorte, lancé votre père. Que vous ont appris ces ascensions sur vous-même ?
C.S. : Toujours rester humble. La montagne gagne toujours donc il faut savoir accepter l'échec. Il faut savoir revenir en arrière. Et puis ça m'a aussi appris à prendre du temps pour moi. Dans nos sociétés, on est un peu dans des tourbillons entre les téléphones, les ordinateurs, les réseaux sociaux, les médias : ça ne s'arrête jamais ! Et c'est vrai qu'en montagne, tout se coupe. Il n'y a plus de réseau et ça fait vraiment du bien d'apprendre à se connaître profondément.
RCF : Vous diriez que la montagne, c'est votre thérapie ?
Oui, ça l'a toujours été. Parce que j'ai fait dix ans de ski à haut niveau juste après le décès de mon papa. La montagne, ça a toujours été notre refuge à tous les deux.


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