Népal, Maroc, Madagascar... La génération Z renverse des régimes
Ces dernières semaines, de nombreux pays font face à de violentes manifestations. Au Népal, au Maroc, et désormais à Madagascar, les jeunes se révoltent contre des régimes politiques qu’ils jugent oppressifs. Chercheur associé à l’institut français des relations internationales (IFRI), Thierry Vircoulon évoque les raisons de la colère de la jeunesse malgache.
Thierry Vircoulon © Mélanie NiemiecDepuis la fin du mois de septembre, un mouvement de protestation initié par la jeunesse, appelé "Gen Z Madagascar", réclame la démission du président Andry Rajoelina. Ce dernier à finalement été destitué et a fui le pays. Un militaire, le colonel Michael Randrianirina, deviendra le nouveau président par intérim le vendredi 17 octobre.
Gen Z : qui sont les "zandry" ?
La génération Z regroupe les personnes nées entre 1997 et 2010. Ayant grandi avec internet et les réseaux sociaux, elles les utilisent aisément pour exprimer leurs engagements et leurs opinions. Ces jeunes baignent dans une culture de l’instantanéité et de l’immédiateté, qui les poussent à se tenir informés en permanence.
A Madagascar, la “Gen Z” représente plus de la moitié des 32 millions d’habitants. Cela lui confère un poids démographique, politique et social majeur. Ce mouvement générationnel est aussi marqué par un désir de changement palpable dans leur quotidien. En malgache, la génération Z est souvent désignée par le terme “zandry”, qui signifie les "cadets" ou "les derniers de la lignée".
Un phénomène international
Selon Thierry Vircoulon, la jeunesse malgache s’est inspirée de celle du Népal. "Lorsqu’ils ont vu la jeunesse népalaise chasser le pouvoir kleptocratique là-bas, ils ont décidé de l'imiter", estime-t-il. Les protestations de la génération Z à Madagascar ne sont pas un phénomène isolé, mais s'inscrivent dans une dynamique internationale. Un lien particulier s'est formé entre les mouvements de la Gen Z à Madagascar et au Népal.
Les deux pays sont très éloignés géographiquement, mais unis par des revendications similaires. "Madagascar, même si faisant partie de l'Afrique, est un pays qui a des liens historiques avec l'Asie. C’est pourquoi les regards sont plus tournés vers l'Asie que vers l'Afrique", souligne le chercheur. "Il faut bien prendre en considération que ce phénomène devient international : cela s'est passé au Sri Lanka, au Népal, et même au Kenya. En ce moment, le Maroc est aussi concerné", ajoute-t-il.
Des revendications variées
L’exaspération générale liée aux coupures d’eau et d’électricité a été le principal déclencheur de la mobilisation massive des jeunes malgaches. "Depuis la crise du Covid jusqu'à maintenant, le taux de pauvreté a augmenté, passant de 70% à 75%", explique Thierry Vircoulon. Les contestations s’étendent aussi à un rejet du système politique en place, notamment du président Andry Rajoelina. Ils revendiquent une démocratie plus participative et une gouvernance renouvelée. Rappelons que Andry Rajoelina a lui-même accédé au pouvoir suite à un coup d'État en 2009. Jusqu’à sa récente destitution, il était président depuis 16 ans.
Pour Thierry Vircoulon, l’enjeu est désormais de voir si la Génération Z, à Madagascar comme dans les autres pays, sera "capable de mettre au pouvoir des gens qui seront cette fois-ci intègres". "Chasser le pouvoir, c'est une chose. Être capable de le rendre honnête et de le transformer : voici la vraie difficulté", ajoute-t-il.


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